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Chagos : Navin Ramgoolam est en train de revoir sa copie, selon Parvèz Dookhy

19 janvier 2011, 00:00

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Chagos : Navin Ramgoolam est en train de revoir sa copie, selon Parvèz Dookhy

Aucune plainte de l’Etat mauricien n’a été enregistrée à ce jour par le Tribunal International de la Mer, malgré  l’annonce faite  par le Premier ministre en décembre dernier. Parvèz Dookhy, expert en droit international, énonce trois causes possibles à ce qui pourrait être une « volte-face ».

«Je dois vous informer que le différend sur le parc marin des Chagos n’a pas été soumis au Tribunal international du droit de la mer», a répondu l’attachée de presse de l’autorité onusienne, Julia Ritter, suite à une demande d’informations qu’a faite lexpress.mu auprès du greffier du Tribunal international.

Lexpress.mu a sollicité une réaction du Bureau du Premier ministre. En attendant que le gouvernement décide de réagir officiellement à notre information, Parvèz Dookhy, avocat mauricien exerçant à Paris, ne semble pas surpris par cette nouvelle. Il soutient même que cela pourrait être une reculade de l’Etat mauricien après que ce dernier ait compris la portée réelle de sa stratégie. Il s’agirait d’une mauvaise stratégie, selon l’avocat.

«Je pense, d’emblée, qu’il y a trois possibilités qui pourraient expliquer le fait que Maurice n’ait  pas encore saisi le Tribunal en bonne et due forme», explique Parvèz Dookhy.

Les hypothèses émises par l’expert en droit international partent tous du postulat que le gouvernement mauricien est en train de revoir certaines choses dans cette affaire.

«Le gouvernement mauricien revoit sa requête au Tribunal de la mer, corrige les erreurs factuelles telle la référence à la «population indigène» en se référant aux Chagossiens, ce qui est manifestement inexact. Ce sont des habitants des îles des Chagos, dont Diégo Garcia», estime Parvèz Dookhy.

Il donne un autre exemple de ce qui devrait être revu dans le document remis au gouvernement britannique. «S’agissant des révélations de Wikileaks, dans sa requête le gouvernement mauricien fait référence aux publications d’un journal paru à Maurice. Le gouvernement mauricien aurait dû citer Wikileaks directement et en intégralité», affirme l’homme de loi.

En deuxième lieu, selon Me Dookhy, Navin Ramgoolam s’est sans doute rendu compte que la stratégie d’entamer un procès contre le Royaume-Uni sur l’aspect de la Zone Marine Protégée, est une erreur tactique et stratégique.

«Cette action est très risquée pour Maurice. Car, le Tribunal ne peut exercer sa compétence à l’encontre de l’Angleterre lorsqu’il y a dans l’affaire soumise à son appréciation une difficulté portant sur la souveraineté. Or, la question de la souveraineté sera bien en filigrane dans le débat sur la zone marine protégée. Donc, le Tribunal peut se déclarer incompétent tout simplement», soutient Parvèz Dookhy.

D’autre part,  le tribunal peut donner tort à Maurice sur le fond. Ce qui serait, selon l’avocat, un sérieux coup dur pour entamer d’autres actions pour la souveraineté de Maurice. Ce sera en effet néfaste pour des actions futures d’avoir contre soi  une décision d’un tribunal international.

Me Dookhy maintient que l’Etat mauricien avait d’autres moyens de contester la zone marine protégée devant la Haute Cour de Londres. «Ainsi, on aurait dû attaquer l’Angleterre pour misuse of power et invoquer la violation des droits de l’homme que comporte la création de la zone marine protégée en vertu de la Human Rights Act de 1998. On ne fait pas usage d’une telle argumentation devant le Tribunal de la Mer», poursuit Parvèz Dookhy dans son analyse.

Il rappelle que la problématique principale reste la récupération de notre souveraineté sur les Chagos et qu’il existe d’autres actions possibles à ce niveau. Il propose en autre une saisine de la Cour internationale de justice et, parallèlement,  une action entamée par les Chagossiens victimes contre la Reine Elisabeth en personne pour crime contre l’humanité.

«Cette action est un moyen de pression considérable que Maurice exercera sur l’Angleterre. Or, l’action devant le Tribunal de la mer est une perte de temps et en la matière, plus le temps passe, plus il est difficile de revenir en arrière», s’inquiète l’expert en droit international.

Finalement, la troisième hypothèse de l’homme de loi exerçant dans la capitale française est que Navin Ramgoolam a déjà cédé aux pressions des britanniques. «Soit des pressions de nature diplomatique contre l’Etat mauricien, soit des pressions de nature personnelle contre lui», précise Parvèz Dookhy.