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L’express 60 ans l Fabrice Bauluck, champion du monde pour la première fois… : «C’était assez intimidant de découvrir ce monde-là»

23 mai 2023, 19:36

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L’express 60 ans l Fabrice Bauluck, champion du monde pour la première fois… : «C’était assez intimidant de découvrir ce monde-là»

2004 : une année que le kickboxer Fabrice Bauluck n’oubliera jamais. C’est là qu’il devenait le troisième Mauricien à décrocher un titre de champion du monde après David Li Yuen Fong en karaté et Mario Bienvenu en boxe française. Parti en toute discrétion en Italie, l’adolescent timide de Beau-Vallon est donc accueilli en héros national à son retour au pays le mardi 21 septembre 2004. Le néo-champion du monde junior de kick-boxing en low-kick est alors âgé de 16 ans. Pour lui, ce premier exploit chez les -51 kg a été le point de départ d’une riche carrière. Aujourd’hui – en 2023 – alors qu’il décrochait dimanche sa 10e médaille d’or lors de la Coupe du monde en Turquie, le sportif hors-pair se classe parmi les géants du sport mauricien. Retour sur ses confidences dans cet entretien…

En descendant de l’avion, vous êtes reçu comme un VIP. À ce moment-là, qu’est-ce que vous vous dites ?
J’étais assez stressé. À l’époque, je communiquais peu et je devais faire face à la presse. Je me sentais également un peu perdu au milieu de la foule. Les élèves du collège Hamilton (NdlR, l’établissement scolaire que fréquentait Fabrice Bauluck) étaient sur place. J’étais assez surpris car à l’époque, je me sentais invisible. Et tout d’un coup, j’étais au centre de toutes les attentions.

À 16 ans, comment gère-ton cette soudaine popularité ?
C’était un moment particulier de ma vie. Les gens ont commencé à me reconnaître dans la rue. Au départ, je me sentais un peu gêné car je suis une personne timide et introvertie. Mais j’ai fini par m’y faire. J’ai gardé la tête sur les épaules. J’ai surtout travaillé sur moi-même pour sortir de ma coquille et j’ai appris à m’exprimer en public. Ces acquis me sont utiles maintenant, que ce soit en tant qu’adulte ou que sportif de haut niveau.

Pratiquement 19 ans se sont écoulés depuis votre sacre en Italie, le dimanche 19 septembre 2004. Vous souvenez-vous de vos sentiments quand on vous a déclaré champion du monde ?
Sur le moment, je n’ai pas réalisé. J’étais la surprise du tournoi. Sur le papier, je n’étais rien mais j’avais battu le Kazakh Baurz Kudergergenov. Il était très bon et le combat était très serré.

Qu’est-ce qui vous a aidé à faire la différence ?
Cette finale était un bonus. Je n’avais rien à perdre et je n’avais pas de pression. Je voulais simplement me faire plaisir. La veille, mon entraîneur Judex Jeannot m’avait encouragé à me relâcher et à savourer chaque seconde. Je l’ai fait et ça a marché.

Vous remportez cette finale aux points, mais vous bouclez les deux précédents combats avant la limite…
Oui. J’avais pris mes repères lors de mon premier combat contre le représentant de la Bosnie-Herzégovine. Par la suite, ma victoire par KO contre le Croate Juricev Sudac m’avait mis en confiance. Après cette demi-finale, j’avais le sentiment d’avoir déjà accompli ma mission.

Ces Championnats du monde juniors étaient la première compétition internationale à laquelle vous participiez. Aviez-vous des appréhensions en quittant Maurice ?
La préparation pour cette compétition a été dure. La transition de mon club à la sélection n’a pas été facile. J’ai dû m’ajuster et m’adapter rapidement car on n’avait pas beaucoup de temps. La préparation s’est faite en quatre ou cinq mois. Et quand j’ai quitté Maurice pour l’Italie, j’allais vers l’inconnu. Comme c’était la première participation de Maurice chez les juniors, on n’avait pas de repères. C’était assez intimidant de découvrir ce monde. En plus, l’entraîneur Judex Jeannot ne nous avait pas accompagnés. Il était resté au pays et nous donnait les instructions par téléphone, la veille. Mais psychologiquement, le travail avait commencé à Maurice. Il avait consolidé notre mental.

Mais à peine rentré, vous déclarez dans une interview publiée dans «l’express» du 22 septembre 2004 : «Il faudra essayer d’aller chercher le titre en senior dans quelques années.» D’où vous vient toute cette ambition ?
J’aime les défis. Après l’or chez les juniors, c’était légitime de viser le titre chez les seniors. Pour moi, c’était une suite logique. Un championnat n’est pas une finalité, c’est juste une étape du parcours. J’ai fonctionné de cette façon tout au long de ma carrière.

Vous avez réussi votre pari en tout cas. Quelle est la clé de votre succès ?
Travailler, travailler et travailler. Un statut, ça demande de la responsabilité. Une fois le titre acquis, ma prérogative a été de maintenir le niveau. Il n’était plus question de monter sur un ring et livrer une performance qui ne reflète pas mon statut de champion du monde.

Derrière le succès de Fabrice Bauluck et du kickboxing mauricien, il y a un homme, Judex Jeannot. C’est quoi sa formule gagnante ?
Il a toujours visé l’excellence. Pour lui, le fait qu’on vive sur une petite île loin des grands circuits du kick-boxing ne doit pas être un handicap. Il est convaincu que c’est celui qui travaille le plus qui fera la différence sur le ring. Le gagnant d’un combat est celui qui a été le plus rusé et qui a le plus cru en ses chances. Par ailleurs, le progrès et la performance ont toujours été des éléments capitaux dans sa philosophie. Il a su mettre en place une méthode de travail qui favorise une progression constante. Nos résultats année après année l’attestent.

On relève aussi une grande complicité entre vous deux…
Oui, Judex Jeannot est pour moi un guide. Il m’a transmis une philosophie de vie très importante : «Toujours regarder devant et ne jamais s’éterniser sur le passé.»

L’adolescent de 2004 est aujourd’hui chef de famille. A-t-il beaucoup changé ?
J’ai simplement mûri. Mais, malgré la réussite, je suis resté fidèle à ce que je suis. Mes titres de champion du monde ne m’ont pas fait oublier mes valeurs. Au contraire, je m’y suis accroché. Mais je reste un grand rêveur. Petit, j’imaginais des scénarios dans ma tête. Je me voyais déjà champion du monde. Ces rêves sont devenus des objectifs, puis une réalité. Aujourd’hui, j’encourage mes enfants à rêver et à être curieux. Pour moi, c’est un point de départ pour se construire des objectifs.

Après vos titres de champion du monde, avez-vous d’autres rêves sportifs ?
La cerise sur le gâteau serait de décrocher un ultime titre de champion du monde en professionnel. À ce moment-là, je pourrai dire que j’ai remporté tout ce qui était possible de gagner.  

Quels sont vos souhaits pour le sport mauricien ?
Que le sport soit un élément unificateur pour le peuple mauricien et qu’il contribue à une meilleure société. Que nos sportifs continuent à faire rêver la nation et que leurs performances au plus haut niveau rendent fiers les Mauriciens de tous horizons.