Priya Hein: «rire en belle» à Riambel

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Primé l’an dernier par le prix Jean Fanchette 2021, Riambel, le roman de Priya Hein, vient de paraître. Il est disponible en librairie chez nous. 

L’écrivain serait-il cousin du volcan ? Le jaillissement des mots s’apparentant aux torrents de lave sortant du ventre de la terre on ne sait jamais quand. Riambel, le roman de Priya Hein a des allures d’éruption. Un roman qui décrit des réalités aussi dures que la roche basaltique. Des malaises incandescents comme la lave. Riambel vient de paraître aux Éditions du Globe à Paris. Le roman de Priya Hein traduit de l’anglais par Haddiyyah Tegally avait été primé l’an dernier par le jury du prix Jean Fanchette présidé par Jean Marie Le Clézio. 

«Rire en belle», s’amuse la voix de la narratrice. Triturant plus qu’elle ne joue avec les sonorités de son villagecalvaire. Car elle vient de l’envers du décor. De l’autre côté de la rue. Celle qui passe en face de chez les riches, bifurquant au beau milieu des vicissitudes de la misère. 

L’écrivain serait-il cousin du volcan ? En avant-propos, Priya Hein confie sa suffocation après le «can’t breathe» de George Floyd en 2020. Le bouchon a sauté. 

«Rire en belle». Mais d’un rire jaune. Dans une écriture en hachure. Nerveuse, parfois haletante. Une économie de mots pour dire l’inavouable, l’impardonnable. Un style saccadé parce que la narratrice «No-é-mie – mon nom veut protester». Dans la chaleur étouffante de la côte, la peau transpire à force d’avoir «trop peur de fermer les yeux. Peur de baisser la garde. Sinon les démons de la nuit pourraient se glisser en toi». 

La mère, domestique, y entraîne sa fille Noemie. Cela a l’air d’être un avenir assuré. Ce sera le malheur du haut de toute l’assurance d’une jeune fille de 16 ans. Priya Hein ouvre grand l’univers féminin. La cuisine. À la fois plaisir du palais et asservissement. Confort et malaise dans tout se côtoient, dans le roman de Priya Hein. Un roman qu’elle épice à coup de kari krevet, de salad ourit, de satini pom damour. Mais toutes les saveurs du monde ne peuvent faire oublier le goût des atrocités de l’esclavage. Les violences physiques et sexuelles. Les regards, les mentalités. Des chaînes qui ne sont pas encore toutes tombées. L’écrivain serait-il cousin du volcan ?

Verdict: ce qu’avait dit le jury 

L’an dernier, le jury du prix Jean Fanchette, présidé par Jean Marie Le Clézio, prix Nobel de littérature 2008, a distingué Riambel. De ce qui n’était encore qu’un manuscrit, le prix Nobel avait dit que le jury du prix Jean Fanchette l’avait choisi après délibération, «d’un commun accord. Ce choix a été motivé par l’originalité du texte, qui aborde avec audace la difficile relation entre les ethnies à Maurice, la rupture sociale entre les possédants et leurs serviteurs, et aussi la condition des femmes. Tout l’art de ce roman est dans le sentiment de pudeur mêlé d’indignation, et dans la pratique du non-dit, agrémenté d’humour».

Extrait: note de l’autrice 

«J’ai vécu trente ans à l’étranger, en tant qu’immigrée. Bien souvent, il m’a été demandé, par ceux appartenant à la majorité locale, de me conformer. Mais qu’est-ce que cela signifie ? En anglais "to conform" signifie respecter les règles et les normes – être semblable d’un point de vue formel, être d’un même type –, avoir un comportement en accord avec les usages acceptés socialement. En français "se conformer" signifie obéir et avoir un comportement en accord avec les conventions sociales et idéologiques préexistantes, se couler dans le moule. Alors, ma question est : qui impose ces règles ?»

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