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Rama Valayden: «Le peuple a été nourri par des peurs et non des débats lucides»

16 septembre 2022, 21:00

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Rama Valayden: «Le peuple a été nourri par des peurs et non des débats lucides»

Quelle est l’urgence d’une transition constitutionnelle ?
Une transition constitutionnelle est urgente car notre Constitution ne répond plus à nos besoins. L’Assemblée nationale ne siège que 30 jours par an et ne discute pas des sujets d’actualité mais que des projets de loi. Les travaux sont devenus une farce. Le speaker jette le discrédit sur notre démocratie, et notre Constitution est impuissante. Une élection est contestée, et les actions en justice prennent des mois et des mois avant que l’affaire soit entendue. Pendant ce temps, la Cour suprême kenyane a déterminé l’issue entre Dinga et Ruto en moins de 21 jours. Vous vous rappelez de l’élection présidentielle Bush-Gore ? Déterminée en moins d’un mois par la Cour suprême des États-Unis.

Pourquoi ceux qui bénéficient du système actuel voudront-ils le changer ?
Ils chercheront des boucs émissaires multiformes pour nous empêcher d’avancer. Partout à travers le monde, les bénéficiaires ont utilisé la peur pour faire reculer le progrès. Ils iront même jusqu’à gargariser notre discours mais pour dire que «the time is not ripe». Voyez ce qui vient de se passer au Chili. Pourtant quelques années de cela, ils ont voté pour faire amender la Constitution Pinochet et aujourd’hui, la Constitution moderne est rejetée car l’avortement devenu un sujet incontournable des discussions. Les gardiens du système viendront à la rescousse, un travail pédagogique jettera de nouvelles bases. On peut devenir le symbole d’un Human Rights Country. L’exemple à suivre…

Nous parlons d’une Constitution 2.0 depuis des lustres. Pourquoi est-ce si difficile de joindre le geste aux discours ?
Parce que ceux et celles qui parlent ne veulent pas. Ils/elles ont fait de notre Constitution un instrument tabou. On y touche à compte-gouttes. Regardez comment on a réagi vis-à-vis de la motion pour faire de Maurice une République. Le peuple n’était pas invité dans le débat. Seulement les seigneurs. Pas de pédagogie ! On est face à une monarchie constitutionnelle. Monarchie système républicain, on ne sait pas… on ne veut point de débats. C’est difficile parce que le peuple a été nourri par des peurs et non par des débats lucides. C’est pour cette raison que nous proposons une transition de cinq ans pour permettre une vraie pédagogie, voire un débat en profondeur.

«À Maurice, on divise même nos morts. Il faut commencer par abolir le Best Loser System.»

La Constitution mauricienne a été écrite en Grande-Bretagne et taillée sur mesure pour perpétuer le «Divide and Rule». Quels changements de fond faudrait-il apporter ?
Les Britanniques sont connus pour avoir perfectionné le système de Divide & Rule en Inde. Religions, castes, sous-castes, Nord vs Sud, Aryens vs Dravidiens, différences linguistiques, ainsi de suite. À Maurice, le Divide & Rule se trouve dans notre Best Loser System qui nous divise sur une base religieuse, pays d’origine et un autre qui est fourre-tout. L’Electoral Boundaries Commission divise les circonscriptions sur une base ethnique. Comment peut-on bâtir une nation avec des divisions inhérentes. En Angleterre, chrétiens, musulmans, hindous sont enterrés dans le même cimetière sans place réservée à chaque religion.

À Maurice, on divise même nos morts. Il faut commencer par abolir le Best Loser System. L’Electoral Boundaries Commission doit être revue pour donner un vrai sens au principe «equal weight for each vote». Ensuite, aucune constitution n’est politiquement neutre. Linion Pep Morisien (LPM) croit profondément dans le principe «one earth, one race». Il faut changer les lois. La Freedom of Information Act proposée par LPM apportera la transparence à tous les niveaux et permettra l’éclosion de la méritocratie. Un système d’éducation ouvert jettera des bases pour l’homme nouveau.

Le LPM se remet-il de la démission de Bruneau Laurette. Que répondez-vous à ceux qui disent que les membres du parti ne sont pas suffisamment connus ?
Je ne dirai aucun mal sur Bruneau. On a commencé une mission ensemble mais malheureusement… je ne tomberai pas dans la tentation de jeter l’opprobre sur lui. J’espère qu’il se remet de sa démission. S’agissant de la deuxième partie de votre question, je dois dire qu’il y a des anciens militants au sens large du terme, c’est-à-dire moi-même, Jean-Claude Barbier, José Moirt, Ivor Tan Yan, un jeune syndicaliste innovateur, Mirella Chauvin, Danielle Turner, Habeeb Sayed-Hossen, Raouf Khodabaccus, des personnes connues sauf par ceux et celles qui ne suivent pas l’actualité comme certains observateurs qui sont les gardiens d’un système pourri. Quant aux nouveaux et nouvelles, il faut une date de naissance politique, un sens du combat, un engagement. En politique, on ne fait pas son nom du jour au lendemain. À moins que vous n’êtes fils, fille, gendre et belle-fille des seigneurs de notre République. LPM est pour la collégialité. Alors que certains vivent pour le combat, d’autres se vautrent dans l’idolâtrie.