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Corinne Forest: une gardienne du patrimoine mondial a rendu les clés

29 août 2022, 11:34

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Corinne Forest: une gardienne du patrimoine mondial a rendu les clés

Un titre aride : «Head of Technical Unit» à l’«Aapravasi Ghat Trust Fund». Derrière la fonction, il y avait Corinne Forest, une passionnée. Ardente défenseure du patrimoine, dont le lieu de débarquement des engagés inscrit sur la liste de l’Unesco, grâce à sa contribution.

Corinne Forest, gardienne du patrimoine mondial, celle qui maîtrisait tout l’écheveau de règlements contraignants dans la zone tampon autour du site, a rendu les clés. Elle est décédée mercredi dernier, en France, des suites d’une longue maladie. Elle avait 47 ans. En 2004, l’historienne Vijaya Teelock avait recruté Corinne Forest à l’Aapravasi Ghat Trust Fund (AGTF). Au téléphone, la voix de l’historienne se brise. «Nous avons beaucoup travaillé ensemble. C’est pourquoi sa disparition me touche beaucoup.» Les souvenirs affluent. 

À l’époque, Vijaya Teelock est présidente de l’AGTF. Mais c’est à l’université de Maurice que, quelque temps auparavant, elle rencontre Corinne Forest, une diplômée de l’École du Louvre venue postuler à Réduit. La Lilloise avait suivi son compagnon à Maurice. «Il n’y avait pas trop de débouchés dans la muséologie à l’université de Maurice.» Comme, à la même période, il est question d’envoyer le dossier d’inscription de l’Aapravasi Ghat à l’Unesco (le site a été inscrit en 2008), «je me suis dit qu’avoir une diplômée de l’École du Louvre serait idéal. J’ai convaincu le board de recruter Corinne Forest comme muséologue». 

Encore une fois, Corinne Forest ne s’est pas cantonnée à une définition de poste. «Elle n’était pas que muséologue. À l’époque, il n’y avait pas encore d’organigramme. Elle est entrée dans tous les projets», se souvient Vijaya Teelock. «Tous les rapports techniques pour le dossier d’inscription, c’est elle. Que ce soit les jours fériés, la veille du Nouvel An, elle a travaillé nuit et jour pour que le dossier soit bouclé pour être envoyé à l’Unesco. Ce qui ressortait chez Corinne, c’était son professionnalisme.» Elle était auteure et projet manager du plan de gestion des visiteurs à l’Aapravasi Ghat (2007-2008). Elle a contribué au Planning Policy Guidance de la zone tampon de ce patrimoine mondial. Elle a aussi contribué aux travaux et au rapport de la Commission Justice et Vérité. 

On retient aussi ses diplômes, dont un doctorat en anthropologie sociale terminé en 2018, à l’École des hautes études en sciences sociales (EHESS). Sa thèse : «Le rôle du patrimoine dans la construction nationale à l’île Maurice». Ou encore une maîtrise en archéologie de l’université Paris 1 Panthéon Sorbonne. Ainsi que tous les lieux qu’elle a marqués de son empreinte : l’exposition permanente du Beekrumsing Ramlallah Interpretation Centre à l’Aapravasi Ghat (2014), l’exposition permanente du musée de la Poste (2008), l’exposition permanente du Folk Museum au Mahatma Gandhi Institute (2005). Elle avait aussi collaboré au festival Porlwi, en 2016, pour l’exposition temporaire, «Une île mondialisée». Et, en 2017, pour L’escalier rouge, Rue de la Balance, installation artistique de Porlwi by Nature et Oliver Maingard, à côté du Grenier. 

Pour Corinne Forest, «un musée est révélateur de la façon dont les gens digèrent leur passé. Cela explique beaucoup de choses».