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Jakir Hossain enseveli sous la boue: un décès de trop sur le lieu de travail…

19 juillet 2022, 17:00

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Jakir Hossain enseveli sous la boue: un décès de trop sur le lieu de travail…

Un décès de trop sur le lieu de travail. Cela attriste le syndicaliste Fayzal Ally Beegun. «Cela me révolte aussi. En pensant que, tous les mois, des travailleurs se blessent sur leur lieu de travail. Et je ne parle pas uniquement des étrangers, mais aussi des Mauriciens.» Il se souvient des quatre travailleurs bangladais qui ont péri dans un accident d’autobus à Pailles. 

Pour revenir sur le cas du Bangladais Jakir Hossain, 42 ans, qui a perdu la vie ce week-end, le syndicaliste suggère que des mesures plus strictes soient appliquées pour vérifier et valider l’expertise que certains travailleurs disent détenir. «Il faudrait que ces travailleurs viennent avec des certificats pour justifier les travaux pour lesquels ils ont été employés. Ainsi, on pourrait éviter des accidents.» 

Selon lui, certaines compagnies peuvent dispenser quelques formations, mais auparavant, il faut s’assurer que la personne comprenne tout le fonctionnement. «Beaucoup cherchent à faire des heures supplémentaires, et sont prêts à faire n’importe quel boulot pour quelques sous en plus. Cela, même au péril de leur vie.» 

Il demande que des unités du ministère du Travail, notamment la Special Migrant Unit ou encore celle de Health and Safety, aient plus de pouvoir pour faire appliquer la loi. «On découvre que des machinistes recrutés au sein des usines travaillent comme bonnes à tout faire, ou encore comme agents de sécurité. Des emplois pour lesquels ils n’ont pas postulé. Mais ils ne peuvent rien dire car les patrons les paient pour ces travaux.» Pour lui, si ces deux entités avaient plus de pouvoir, elles auraient pu déjà mettre à l’amende les compagnies. 

Pour sa part, Reeaz Chuttoo, président de la Confédération des travailleurs du secteur privé (CTSP), est également indigné par ce énième décès d’un employé sur son lieu de travail. «Jeudi dernier, nous avons animé une conférence de presse pour demander où en sont les amendements sur la santé et la sécurité des travailleurs. Depuis 2007, nous demandons que tous les employeurs aient un Risk Assessment sur leur lieu de travail. Toutefois, ils n’ont aucune obligation de donner une copie aux travailleurs, ni même au ministère. Mais nous demandons justement que les employés puissent avoir accès à ce Risk Assessment.» 

Ainsi, en publiant le Risk Assessment Matrix, tous les employés sauront où ils doivent doubler de vigilance et de précaution. Avec cette méthode, plusieurs vies auraient pu être sauvées. «Depuis mars dernier, le ministre Soodesh Callichurn avait dit que cela allait être introduit au Parlement et jusqu’à ce jour, toujours rien. Je lance un appel au ministre pour que cela puisse être pris au plus vite.» 

Le président de la CTSP soutient que, par le passé, plusieurs fonctionnaires ont conseillé aux différents ministres d’instaurer cette mesure, mais à ce jour, personne ne l’a encore fait. «Il est triste que nous ne puissions pas intenter un procès à l’employeur car selon la loi, une third party ne peut pas step in. Et les héritiers, je ne crois pas qu’ils pourront le faire, car ce sont des gens à faible revenu.» Il espère que sa voix sera entendue par le ministre concerné. 

Au ministère du Travail, on attend les conclusions de l’enquête pour commenter ce cas. L’Occupational Safety & Health Division a déjà commencé à enquêter de son côté sur cette affaire.
 

Un bon travailleur, soutient la direction 

<p>On ressent le froid qui pénètre à travers les vitres de la voiture. Et la pluie qui s&rsquo;en donne à coeur joie. La région de Beemanique, située entre Midlands et Nouvelle-France semble, ce lundi, pleurer un de ses valeureux ouvriers. Les machines sont à l&rsquo;arrêt, en signe de deuil envers cet employé que beaucoup pleurent. Au sein de<em> Beemanique Stone Crusher Ltd</em>, la compagnie qui l&rsquo;employait, tous ceux qui ont côtoyé Jakir Hossain ont des mots gentils à son égard. <em>&laquo;C&rsquo;était un bon travailleur et quelqu&rsquo;un de respectable.&raquo; Même au niveau de la direction, on le décrit comme un &laquo;employé sympa, qui ne posait pas de problèmes&raquo;</em>. Il faut dire que cela faisait cinq ans que le Bangladais travaillait pour cette compagnie, son contrat ayant même été renouvelé à maintes reprises. Il laisse derrière lui deux enfants et une famille inconsolable. Sa dépouille sera rapatriée vers son pays.</p>

 

Autre décès survenu presque un an plus tôt 

<p>On se souvient aussi d&rsquo;un autre travailleur qui a trouvé la mort sur le chantier au <em>Beemanique Stone Crusher </em>en août dernier. En effet, Ravind Joypaul, 38 ans, n&rsquo;a pas survécu à ses blessures. Les faits se sont produits lorsqu&rsquo;une grosse pierre s&rsquo;est décrochée d&rsquo;une falaise et s&rsquo;est écrasée sur son excavateur, le piégeant dans la cabine. Il s&rsquo;est retrouvé à une quinzaine de mètres au-dessous du niveau du sol. Ravind Joypaul travaillait pour le compte d&rsquo;un contracteur. Les secours mandés sur les lieux n&rsquo;ont pu que constater son décès.</p>

 

Les machines sont à l’arrêt en signe de deuil au sein de la compagnie.  © Dev Ramkhelawon

 

Le corps du Bangladais en attente d’être rapatrié 

<p>Le corps du Bangladais Jakir Hossain a été livré lundi matin au service funéraire Al Insaan, qui a effectué les rituels en vue des funérailles du Bangladais dans son pays d&rsquo;origine. La dépouille sera rapatriée cette semaine. La direction de la compagnie <em>Beemanique Stone Crusher Ltd</em> a pris la décision de décréter lundi jour de deuil en hommage à la victime.&nbsp;</p>

<p>Jakir Hossain a été retrouvé enseveli sous une coulée de boue sur un chantier à Nouvelle-France. Il pilotait un excavateur lorsque l&rsquo;appareil est tombé dans un trou vers 21 heures, samedi. La victime est restée coincée dans la pelleteuse avant d&rsquo;être recouverte par une chape de boue. Il a fallu l&rsquo;intervention de plusieurs unités de la police et des pompiers pour extirper Jakir Hossain dimanche, vers 6 h 40.&nbsp;</p>

<p>La police de Nouvelle-France a recueilli la version des responsables de l&rsquo;entreprise, dimanche. L&rsquo;enquête se poursuit pour faire la lumière sur les circonstances de ce drame.</p>