Bangkok vibre pour le choc entre Liverpool et Manchester United, en ce mardi à 17h00, un match d'exhibition de rêve pour les Thaïlandais férus de football mais que le prix excessif des places, conséquence des visées lucratives de l'événement, rebute.

Les deux clubs anglais donnent le coup d'envoi d'une période promotionnelle intense pour les géants européens, qui profitent de l'intersaison pour rendre visite à leurs supporters les plus éloignés.

«Reds» et «Red Devils», tout comme le Paris SG, au Japon, et Tottenham, en Corée du Sud, ont pris leurs billets pour l'Asie, où ils figurent en tête des équipes les plus populaires.

Alors que d'autres ont choisi l'Amérique du Nord, tels le Bayern ou le Real Madrid, ces mastodontes prolongent à l'autre bout de la planète leur rivalité, mais sur un terrain plus économique que sportif.

«Les clubs partent en tournée pour se préparer pour la saison à venir, mais aussi pour les bénéfices financiers qu'ils en tirent», explique à l'AFP Simon Chadwick, directeur du Centre sportif eurasien de l'EM Lyon Business School.

«Cela comprend une prime de participation, une part des revenus billetterie, le merchandising... Ils veulent aussi créer ou maintenir l'adhésion des fans, qui peut leur rapporter sur le long terme», poursuit l'expert.

135 euros minimum

A Bangkok, des centaines de fans locaux ont réservé le week-end dernier un accueil de rockstars aux deux équipes, malgré l'absence de l'idole de Manchester United Cristiano Ronaldo, retenu en Europe par un problème familial.

«Nous sommes là pour vous, j'espère qu'on pourra passer du bon temps ensemble», a lancé dimanche l'entraîneur de Liverpool, Jürgen Klopp, quelques instants après avoir rendu hommage, avec ses joueurs, à un portrait du roi Rama X à l'aéroport.

Les deux clubs ont enchaîné opérations commerciales et entraînements, lors de leurs premières heures au royaume.

Il fallait bien Marcus Rashford ou Mohamed Salah pour dissiper des semaines de polémiques sur le prix exagéré des billets, qui empêche une partie des fans de se joindre à la fête. Il restait vendredi 5 à 6.000 tickets disponibles, selon l'organisateur.

La place la moins chère au stade Rajamangala (environ 60 000 sièges) s'élève à 5 000 bahts, soit environ 135 euros, dans un pays où le revenu moyen mensuel par ménage dépassait à peine 730 euros en 2021. C'est 50 fois le tarif minimum d'une rencontre des locaux du Bangkok United (100 bahts).

«C'est trop cher», regrette Pete Warinsee, chargé du fan club officiel de Manchester United en Thaïlande (environ 400 adhérents), qui ne va pas payer pour ce «match sans enjeu».

«D'autres membres préfèrent économiser pour aller voir Manchester jouer dans son stade d'Old Trafford, où la place coûte pour nous 2.500 bahts», développe-t-il.

Vaches à lait

«Il y a les deux plus grands clubs au monde, le tarif reflète ça. La part pour que ça soit viable pour le promoteur local est aussi importante. Aucune dépense n'a été lésinée», comme l'installation d'une pelouse aux standards anglais, se défend Marcus Luer, PDG de l'agence de marketing sportif TSA qui a travaillé sur l'organisation de la soirée, marquée aussi par un concert avant le coup d'envoi.

«Je suis heureux d'avoir obtenu une place. C'est un match qui va rester pour toujours dans ma mémoire», s'est réjoui Naruebodee Chankol, 27 ans, maillot de Liverpool sur les épaules, croisé à l'aéroport.

A Singapour, où Liverpool poursuit sa tournée, la place la moins chère s'élève à environ 100 euros pour la confrontation des Reds contre Crystal Palace, jeudi.

«Après la pandémie, les clubs européens pensent qu'il y a une demande refoulée, supérieure à la normale, comme on le constate dans l'industrie aéronautique. D'où le prix premium des places», estime Simon Chadwick.

«Les clubs veulent aussi se refaire financièrement après le Covid. Mais cette stratégie commence à se retourner contre eux. C'est une erreur de considérer les fans asiatiques comme des vaches à lait. Eux aussi ont souffert pendant la crise sanitaire !», rappelle-t-il.

Malgré leur approche «opportuniste et à court terme» critiquée par le spécialiste, Manchester United et Liverpool comptent bien profiter au maximum de leur bain de foule en Thaïlande, premier rayon de soleil d'une saison qui s'annonce longue.