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Didier Sooben: «Les structures d’enquêtes sont gangrénées par les pouvoirs gouvernementaux»

11 juillet 2022, 17:59

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Didier Sooben: «Les structures d’enquêtes sont gangrénées par les pouvoirs gouvernementaux»

Écrivant sur le tricentenaire du peuplement de Maurice, Didier Sooben, président de l’association Dis-moi Réunion, revient sur les droits humains suite aux tortures policières diffusées. Selon lui, la formation des citoyens et des forces de l’ordre est vitale pour préserver les droits humains.

Comment réagissez-vous suite aux vidéos de torture par des policiers qui ont des effets sur Maurice internationalement ? 
Il y a de l’abus. Car ceux censés veiller à la sécurité du peuple sont eux-mêmes dans de telles dérives. Admettons qu’on change de postulat et qu’on se dise que ces contrevenants ont commis des infractions et méritent des sanctions. Quand on voit la manière dont ces sanctions justement sont appliquées, hélas, on constate qu’il n’y a pas de différence entre la faute commise et la faute réprimandée par ces tortures. J’ai vu plusieurs de ces cas de torture présumée. L’un d’eux m’a interpellé en particulier : celui d’une femme qui a été fouillée et déshabillée devant une caméra. Cela fait pas mal d’échos. 

Localement, l’Independent Police Complaints Commission recueille les plaintes des citoyens contre la police et enquête. Est-ce la bonne structure ? 
Ils sont muselés, dans un sens. En voyant les structures, notamment celles où vous avez des nominés politiques, il n’y a plus l’indépendance de pouvoir mener à bien les actions ou d’aboutir aux décisions requises. En étant politisées, les structures d’enquêtes sont gangrénées par les pouvoirs gouvernementaux. Les dirigeants nomment leurs personnes à la tête de telles instances, ce qui risque de les rendre caduques. 

Quels sont les recours pour les Réunionnais en cas de brutalité policière soupçonnée ? 
À La Réunion, nous avons la Ligue des Droits de l’homme, entre autres organisations. C’est rare de voir de tels cas passer sous silence. Je ne vous dis pas qu’il n’y en a pas. Certes, il y en a mais puisque nous évoluons dans une société de liberté et de dignité respectée, nous avons des organismes qui montent au créneau pour en faire la revendication. On peut d’ailleurs faire appel devant plusieurs instances judiciaires dont la cour suprême. Il existe d’autres tribunaux où on peut présenter son cas, rencontrer le juge, demander la révision du cas si on sent que les droits n’ont pas été respectés. 

Que faire pour Maurice au niveau des droits humains ? 
Il faut former des personnes. Au vu des dérives, on se demande comment Maurice en est arrivé là. Et, à mon avis, c’est parce que les citoyens ne connaissent pas leurs droits. On parle bien souvent de justice mais, fondamentalement, ils en ignorent les paramètres. Ces droits doivent être respectés comme il se doit. Évidemment, ces formations doivent également s’étendre, en priorité, aux forces de l’ordre. Ce sont des gardiens de la sécurité intérieure. Quand on voit comment ces gardiens deviennent des truands, clairement, il y a un problème.