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Russie: sept ans de prison pour avoir dénoncé l'assaut contre l'Ukraine

8 juillet 2022, 16:23

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Russie: sept ans de prison pour avoir dénoncé l'assaut contre l'Ukraine

Un élu municipal moscovite, Alexeï Gorinov, a été condamné à sept ans de prison ce vendredi 8 juillet, pour avoir dénoncé l'assaut russe contre l'Ukraine, en pleine vague répressive pour faire taire toute critique sur l'offensive décidée par Vladimir Poutine.

Depuis le 24 février, date de l'entrée des forces russes en Ukraine, les autorités ont introduit une série de lois pour punir de lourdes peines ceux qui réprouvent publiquement cette attaque, bannissant au passage l'emploi des mots «guerre» et «invasion».

La juge Olessia Mendeleïeva a reconnu l'opposant de 60 ans coupable d'avoir «disséminé des informations clairement mensongères» sur l'armée russe en usant de «ses fonctions officielles» et de l'avoir fait dans le cadre d'un groupe organisé motivé par la «haine politique».

«Le redressement de l'accusé est impossible sans peine de privation de liberté», a estimé la magistrate avant de le condamner à sept ans de détention dans une colonie pénitentiaire.

Avant qu'elle ne prononce cette peine, le public du procès a applaudi le prévenu, conduisant à l'expulsion de la salle des personnes venues le soutenir.

M. Gorinov est le premier opposant, un élu qui plus est, à écoper d'une peine de prison ferme pour ses prises de position contre l'intervention russe en Ukraine, mais d'autres militants attendent actuellement en détention leur procès.

Sept années volées

Peu avant la sentence, debout dans la cage de verre réservée à l'accusé, l'homme aux cheveux gris, le visage tendu et le regard perçant, a tenu devant les caméras une feuille barrée des mots «Il vous la faut encore, cette guerre?»

Une autre députée municipale, Elena Kotenotchkina, est accusée des mêmes faits, mais elle n'est pas jugée car elle a fui la Russie, comme de nombreux militants d'opposition du fait de la répression qui s'est encore accrue en Russie ces derniers mois.

Juriste de formation, M. Gorinov avait été arrêté en avril pour avoir dénoncé le 15 mars la «guerre» et l'«agression» de Moscou contre l'Ukraine, pendant une réunion de son assemblée municipale de quartier, session filmée et retransmise sur YouTube, ce qui pour le tribunal constitue des circonstances aggravantes.

«Tous les efforts de la société civile doivent servir à mettre fin à la guerre et à entraîner le retrait des forces russes du territoire ukrainien», avait-il notamment déclaré.

M. Gorinov, qui est incarcéré depuis le 26 avril à Moscou, va faire appel de sa condamnation, selon son avocate, Katerina Tertoukhina, jugeant qu'il avait été puni pour «ses mots, ses opinions, ses convictions».

«Alexeï (Gorinov) a dit:  Ils m'ont volé mon printemps, mon été. Ils m'ont pris sept années de ma vie. Il va se battre et nous serons à ses côtés», a-t-elle ajouté.

Contre les guerres

Jeudi, lors d'une précédente audience, M. Gorinov avait martelé être «contre toutes les guerres».

Il a aussi cité les noms de villes ukrainiennes comme Boutcha où les forces russes sont accusées de crimes de guerre, exactions que les autorités russes qualifient de mensonges ou de mises en scène.

Depuis le lancement de l'offensive en Ukraine le 24 février, des dizaines de personnes l'ayant critiquée publiquement ont été poursuivies en Russie.

La plupart ont été condamnées à des amendes, mais d'autres risquent de lourdes peines de prison, notamment Vladimir Kara-Mourza, l'une des rares figures de l'opposition restée en Russie.

Autre exemple, celui d'Alexandra Skotchilenko, une artiste de Saint-Pétersbourg emprisonnée depuis avril et qui attend son procès pour avoir collé dans un supermarché des étiquettes pacifistes.

La Russie, qui est déjà engagée depuis de longues années dans une répression des voix critiques du Kremlin, a considérablement durci son arsenal pénal pour faire taire ou punir ceux qui dénoncent le pouvoir russe.

Cette semaine, le Parlement a adopté une série de textes prévoyant de lourdes peines de prison au langage très vague pour réprimer les appels à agir contre sa sécurité ou encore la coopération «confidentielle» avec des étrangers.

Depuis février, la Russie a aussi bloqué sur son territoire de nombreux médias russes et étrangers ainsi que certains des plus grands réseaux sociaux, comme Twitter, Facebook et Instagram.