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Inflation et aide aux ménages: partage équitable de la responsabilité sociale…

30 mai 2022, 19:00

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Inflation et aide aux ménages: partage équitable de la responsabilité sociale…

La poussée inflationniste ne semble pas ralentir, ne laissant rien présager de bon pour les mois à venir. En Chine, l’indice des prix à la consommation (CPI) passe à 2,1 % en avril contre 1,5 % le mois précédent, forçant la People’s Bank of China à user de méthodes agiles de politique monétaire pour soutenir l’économie dans un contexte d’incertitudes croissantes. Aux États-Unis, le CPI a bondi à 8,3 % en avril par rapport à l’année précédente, mais une baisse par rapport au niveau record de 8,5 % atteint en mars. Au Royaume-Uni, l’inflation a atteint un niveau record de 9 %, jamais atteint depuis 1982. 

À Maurice, une situation que plusieurs observateurs voyaient venir depuis des mois, l’inflation a atteint 11 % en avril, sans compter une dépréciation continuelle de la roupie depuis des mois, et rien ne laisse espérer que la situation s’améliorera de sitôt. 

Face à cette situation, les gouvernements à travers le monde rivalisent d’idées pour soutenir leur population, que cela soit à travers un durcissement de la politique monétaire, à l’instar de la tentative mauricienne avec une hausse du Repo Rate passant à 2 %, des mesures sociales ou l’aide internationale, entre autres. Dans tous les cas, la tendance qui s’affiche est que le combat contre l’inflation est l’affaire de tous, et pas seulement du gouvernement. À titre d’exemple, au Royaume-Uni, Rishi Sunak a annoncé un ensemble de mesures d’aide, à hauteur de 15 milliards de GBP pour les ménages confrontés à la crise, financées en partie par une taxe exceptionnelle, temporaire et ciblée de 5 milliards de GBP sur les sociétés opérant dans l’énergie, ayant fait des profits. 

À Maurice, si le secteur privé s’est fait entendre durant la crise du Covid-19, il est depuis plus discret, mais actif quand même par des initiatives palliatives, à l’instar de projets sociaux dans plusieurs régions. En avril, pour répondre «en urgence» à la situation économique, Business Mauritius (BM) et la communauté des affaires ont exprimé «leur volonté de travailler en bonne intelligence avec toutes les parties prenantes du pays, le gouvernement, la société civile, les ONG, pour trouver des solutions immédiates dans l’intérêt général et particulièrement celui des plus touchés… Business Mauritius est prête à soutenir la création d’un Moris Solider. Par cette proposition et avant même l’adoption d’un prochain budget, nous visons à venir en aide aux ménages les plus vulnérables et les plus touchés par la hausse du coût de la vie, en renforçant leur sécurité alimentaire à travers un réseau d’épiceries solidaires», peut-on lire dans un communiqué. 

Hausse de la corporate tax ? 

C’est une initiative encourageante et dans l’esprit d’un partenariat public-privé, d’autant plus que le soutien, sous condition, de la Mauritius Investment Corporation (MIC) aux entreprises du privé s’élevait à Rs 45 milliards au 30 avril. On se souviendra de l’aide étatique aux entreprises pendant le Covid, avec le Wage Assistance Scheme de Rs 18 milliards entre mars et septembre 2021. Une aide de Rs 2 milliards s’y est ajoutée pour le tourisme pour les mois d’octobre et novembre. Si depuis, la situation reste difficile pour certaines entreprises, d’autres affichent des niveaux de profitabilité intéressants, certaines faisant des profits de plus Rs 500 millions sur l’année financière, incluant des groupes opérant dans le tourisme. Est-ce qu’une augmentation temporaire de la corporate tax, actuellement à 15 % est envisageable ? Ou le privé pourrait-il trouver d’autres moyens d’alléger le poids de l’inflation sur la population en considérant une augmentation progressive des salaires pour ceux ne touchant pas de salaires mirobolants ? L’équation n’est pas si simple. 

Il faut ici mettre en contexte le récent débat sur l’augmentation du salaire minimum. En avril, du côté de BM, on mettait en exergue qu’une augmentation du salaire minimum ferait pression pour une augmentation des autres salaires plus élevés également, alors que les entreprises ont déjà de lourdes charges sociales, la CSG et la compensation salariale, entre autres. Aussi, il ne faut pas oublier que les entreprises sont pour la plupart encore fragiles et sortent à peine de la crise. «Si nous allons vers une révision du salaire minimum, l’entreprise seule ne pourra pas soutenir cette charge. Nous ne sommes pas contre l’idée, mais l’État devra partager les coûts», disait-on à BM. En effet, l’alourdissement des charges sociales des deux dernières années pèse de son poids dans le choix et la capacité des entreprises à recruter. Il ne faut pas oublier que le crédit bancaire du secteur privé s’élevait à Rs 215 milliards à mars 2022. 

L’État a bien évidemment son rôle à jouer en commençant par réduire les gaspillages maintes et maintes fois décriés par le bureau de l’Audit et, pourquoi pas, un geste temporaire, mais pas moins symbolique de réduire les salaires ou avantages des parlementaires ? L’État pourrait aussi ouvrir la porte à plus de projets pouvant générer de l’emploi sous la plateforme public-privé. Par ailleurs, la population se doit d’être tout aussi responsable, en réduisant ses attentes de bénéfices sociaux, de manière temporaire. Les jeunes au chômage ont leur part à faire, considérant le taux élevé de chômage chez eux, de 27,7 % en 2021, alors que des entreprises disent avoir du mal à recruter. La lutte contre l’inflation et la hausse du coût de la vie, doit être l’affaire de tous.