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Production d’électricité: la biomasse et le gaz comme alternatives

10 mai 2022, 22:00

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Production d’électricité: la biomasse et le gaz comme alternatives

Le coût du charbon a poussé le producteur indépendant d’électricité Terragen à éteindre sa turbine de 74 MW qui alimentait le Central Electricity Board (CEB). Avec la cherté de l’énergie fossile, il est clair que la transition énergétique est devenue une urgence. Nombreux sont ceux qui militent pour l’énergie verte, tandis que d’autres maintiennent que ce n’est approprié. La biomasse est une option.

Beaucoup de gaz et un peu de soleil

Quelle est donc la situation dans un contexte où le prix du charbon prend l’ascenseur alors que ce combustible est hautement polluant ? Clency Bibi, le président de la CEB Staff Association, affirme qu’il faut trouver une solution à court terme et pour le long terme. D’emblée, il ne suggère pas plus d’investissement dans l’énergie verte, mais plutôt dans une nouvelle centrale thermique. «Dans la présente conjoncture, la seule mesure appropriée pour le CEB demeure l’installation immédiate d’une turbine à combustion de 40 à 45 MW à Fort-George comme la première phase d’un projet pour une centrale à gaz à cycle combiné (CCGT)», propose-t-il. 

Ce projet s’accouplerait avec un CCGT ayant une capacité de 120 à 140 W pour le long terme. Les travaux pour ce type de centrale thermique, ajoute-t-il, prendront plus de temps et les moteurs pour la centrale à gaz à cycle combiné, utilisant du gaz naturel liquéfié, sont moins polluants. «Un terrain a déjà été identifié à Fort-Gorge. Il y a même des câbles de hautes tensions qui y ont été installés pour le transfert d’électricité. Le projet était d’ailleurs en bonne voie, mais il y a eu une guerre entre le ministère des Finances et celui de l’Énergie qui a fait tout capoter», indique-t-il. 

Cependant, il ne néglige pas l’énergie renouvelable dans ses propositions pour le court terme. Tout en rappelant que le gouvernement doit encourager davantage de projets photovoltaïques et éoliens, Clency Bibi regrette que le CEB ait du retard par rapport à la modernisation de son réseau. «Il nous faut des smart-grid comme cela a été fait dans plusieurs pays. Il est très important pour que la balance se fasse automatiquement entre l’électricité produite par l’énergie renouvelable et celle des centrales thermiques», conseille-t-il. Le syndicaliste propose aussi des études de nouvelles variétés de cannes pour avoir de meilleures bagasses afin de remplacer le charbon. 

Un ancien cadre du CEB est aussi persuadé qu’un CCGT pourrait aussi être la solution. Le système est simple, dit-il, la centrale fonctionnera avec deux moteurs roulant avec du gaz naturel liquéfié qui est moins cher. Un troisième moteur tournera grâce à la chaleur fournie par les deux moteurs. «Un CCGT est compétitif, mais il faut un investissement entre Rs 6 et Rs 7 milliards. En tout cas, ce sera un bon projet pour le long terme», reconnaît-il. 

Cependant, l’ancien du CEB admet que la biomasse aurait pu être une solution pour remplacer le charbon, mais il regrette qu’il n’y ait eu aucune étude sérieuse sur ce combustible.

L’énergie renouvelable «pas toujours fiable»

Le pays ne pourra pas compter uniquement sur l’énergie verte pour produire de l’électricité. Du moins, c’est l’avis de quelques spécialistes. Les écologistes et autres défenseurs de l’environnement exigent que le CEB et les producteurs d’électricité délaissent l’énergie fossile pour l’énergie renouvelable comme le solaire ou l’éolien. D’ailleurs, le gouvernement a fixé comme objectif que d’ici 2025, et au plus tard 2030, entre 30 et 60 % d’électricité distribuée sera produite à partir de l’énergie verte. 

Toutefois, bien que les producteurs indépendants et les experts en électricité soient unanimes à dire qu’il faut accélérer la transition énergétique, nombreux sont ceux qui sont persuadés qu’avec le climat local et le type d’économie, Maurice ne pourra pas compter uniquement sur le vent ou le soleil pour produire de l’électricité. Clency Bibi concède que ces sources d’énergie ont des limites. «Prenez par exemple le soleil. Le CEB n’a pas de batterie pour stocker l’électricité pendant la journée. De plus, en hiver, le taux de production d’électricité baissera. Il faut que ce soit clair. Je ne dis pas non aux énergies renouvelables qui soulageront le CEB et ceux qui ont des panneaux photovoltaïques chez eux, mais il faut le voir sur un plan national. Cela ralentira le développement économique car les usines auront besoin de plus d’électricité», explique-t-il. Le syndicaliste est d’avis que passer à 100 % à l’énergie verte sera dangereux pour le pays et qu’une telle décision mettra en péril le secteur de l’industrie à Maurice, d’autant que les fermes photovoltaïques ou éoliennes ne peuvent pas augmenter leur production en un quart de tour contrairement à une centrale thermique. 

Un ancien cadre du CEB maintient également que l’énergie solaire a des limites tout comme l’éolienne. «Ces types d’énergie contribuent d’une façon minimale à satisfaire la demande. D’ailleurs, dans le cas des fermes solaires, elles sont en service la journée seulement ou en période de beau temps. Leurs batteries utilisées pour stocker l’électricité ont une capacité limitée. Elles entrent en service pour deux ou trois heures uniquement quand il y a des fluctuations», maintient-il. De plus, déclare l’ancien cadre du CEB, les cyclones violents qui affectent cette partie de l’océan Indien pourraient avoir un impact sur les parcs éoliens alors qu’en Europe, tel n’est pas le cas. D’ailleurs, il ajoute que si en Europe il y a des fermes éoliennes en pleine mer, il est peu probable que le même modèle soit implanté à Maurice. «Est-ce que les fonds marins autour de Maurice sont coralliens ou basaltiques ? Les bases de ces turbines éoliennes ne tiendront jamais si c’est corallien car elles subissent beaucoup de stress. Elles céderont», explique-t-il. 

D’autre part, en se basant sur les chiffres de 2020, l’ancien cadre du CEB ajoute que les fermes éoliennes et solaires n’ont produit que 158 GWh d’électricité alors les centrales thermiques ont fourni environ 2 312 GWh d’électricité. «Je ne pense pas que d’ici 2030 le gouvernement atteindra son objectif. Il faut arrêter les débats stériles. Il faut venir avec des projets concrets pour la transition énergétique», insiste-t-il.

Les IPP prêts pour la transition énergétique

D’après nos renseignements, les trois gros producteurs d’électricité indépendants (IPP) sont en mesure d’entamer leur transition énergétique à la fin de leur contrat avec le CEB. D’après nos renseignements, ils ont déjà fait part de leur intention au gouvernement, mais ils attendent une réponse. Terragen, dit-on, a des projets dans le domaine de l’énergie renouvelable et de la biomasse. Il est en mesure d’importer des combustibles autres que le charbon. 

Le Chief Executive Officer d’Alteo, Fabien de Marassé Enouf, maintient qu’avec le coût d’hydrocarbures, le pays sera affecté. «Nous considérons qu’il est crucial d’oeuvrer dès maintenant pour une transition énergétique rapide et efficace, afin de produire plus d’énergie verte à Maurice. Alteo est prêt à travailler avec le CEB et les autorités en ce sens, avec notamment un projet de centrale 100 % biomasse à Union Flacq, ou encore des projets solaires et éoliens dans l’est de l’île», dit-il. 

Omnicane se situe dans la durée au coeur de la transition énergétique, déclare-t-on du côté de la centrale thermique. «Nous prenons les dispositions qui s’imposent à cet effet, pour nous aligner sur les engagements des autorités pour réussir cette transition résolument au-delà de 2030», avance ce producteur d’électricité.