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Cannabis médical: la longue attente des patients et des spécialistes

15 avril 2022, 10:00

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Cannabis médical: la longue attente des patients et des spécialistes

Dans une vidéo qui circule depuis le début de la semaine, les Mauriciens ont découvert une mère effondrée et désemparée face à la souffrance de son enfant. En larmes, elle implore que le traitement à l’huile de cannabis soit donnée à sa fille car il devient de plus en plus difficile d’apaiser les douleurs de l’enfant. Pour l’instant, elle est traitée au Valium et autres médicaments, dont les effets secondaires sont insupportables.

L’idée de l’utilisation du cannabis à des fins médicales a été évoquée dans le rapport Lam Shang Leen. Par la suite, une étude menée par diverses instances sur les vertus et le taux en tétrahydrocannabinol dans le chanvre été lancée. Un comité technique, présidé par le Professeur Teeshan Bahorun, directeur du Mauritius Research and Innovation Council (MRIC), a été mis en place en 2020 pour mener une étude sur le cannabis médical. Le rapport, rendu public en 2021, est en faveur de l’introduction du CBD dans les traitements médicaux.

Lors de la dernière séance de l’Assemblée nationale, le Dr Farhad Aumeer a évoqué le cas de cette petite fille de trois ans. Le ministre de la Santé, le Dr Kailesh Jagutpal, a répondu que la petite fille pouvait faire une demande pour aller se faire traiter à l’extérieur et qu’il se documentera sur son cas, sans donner plus de détails concernant le cannabis thérapeutique. Cependant, cela ne veut pas dire que le rapport a été enterré. Une source bien renseignée au ministère indique que quatre sous-comités ont été mis en place. Ils ont pour but d’identifier les compositions psychoactives et les vertus thérapeutiques, mais aussi d’évaluer les preuves scientifiques et de se pencher sur l’aspect légal.

Selon nos sources, le Steering Committee pour le cannabis médical, composé de plusieurs médecins du public et du privé, a décidé que le cannabis médical sera importé mais sera accessible uniquement dans les centres médicaux publics. Le traitement au CBD ne sera pas uniquement en forme d’huile mais aussi en comprimés et injections, entre autres. «C’est surtout pour le contrôle que cela a été décidé», révèle notre source. Par ailleurs, à la suite de la rencontre des professionnels de santé, il avait été décidé qu’une formation serait donnée aux spécialistes, travaillant dans le public, qui souhaitent soigner des malades avec le cannabis thérapeutique.

Nos sources ajoutent qu’une circulaire a été adressée à tous les spécialistes des hôpitaux qui souhaitent faire partie de la formation. Malgré l’intérêt de plusieurs, il n’y a pas encore eu de suite. «Quand est-ce que les formations commenceront ? Par qui seront-elles dispensées ? On n’a aucune idée.»

Le budget fait défaut

Le Professeur Theeshan Bahorun non plus ne sait pas quand seront dispensées ces formations ou quand l’importation débutera. «C’est au ministère de la Santé de prendre les devants en suivant les recommandations du rapport», explique-t-il, en ajoutant que tous les approbations ont déjà été données. Cependant, d’autres sources proches du dossier affirment que ce ne sera pas de sitôt. «Ce n’est pas vraiment une priorité pour le ministère de la Santé. Pour dispenser des formations aux spécialistes, il faudra faire appel à des experts internationaux et à en croire les bruits de couloirs, l’envie est là mais le budget n’y est pas.»

Mais cet avis n’est pas partagé, même si l’on concède que l’attente est longue. «Cela a toujours été une priorité», révèle un neurologue du public qui affirme que tous les jours, le CBD aurait apaisé, voire sauver, des vies dans nos institutions médicales. «J’en parlais justement avec un confrère oncologue récemment, tous les jours des familles pleurent en voyant souffrir leurs proches. Le cannabis thérapeutique aurait aidé à grandement alléger la douleur. Il est dommage que cela prenne tant de temps pour devenir une réalité à Maurice.»

Le Dr Taroonsing Ramkoosalsing, ancien psychiatre et consultant en charge à l’hôpital Brown-Sequard, à Beau-Bassin, abonde dans le même sens. Il indique que le CBD pourrait rendre la vie meilleure à tellement de patients. «Ceux qui souffrent de douleurs chroniques, de sclérose en plaques, de Parkinson ou de cancer en auraient bénéficié. Il est prouvé que les patients qui font de la chimiothérapie retrouvent l’appétit après le traitement au CBD. Puis, il est démontré qu’il ralentit la progression du cancer», avance-t-il.

Pour ceux qui souffrent d’épilepsie, les traitements offerts avec les nombreux médicaments, comme le Keppra, le Rivotril, la Mysoline, le Phenobarbital, l’Epanutin, entre autres, contrôlent la maladie à 70 % uniquement dans presque tous les cas. «Le cannabidiol aidera par conséquent pour les 30 % restants.»

Contacté, un préposé au ministère de la Sante a affirmé qu’aucune déclaration ne sera faite à ce sujet car il y aurait une question parlementaire à ce propos bientôt.