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Journée internationale: La femme confrontée à davantage de défis en 2022

8 mars 2022, 10:21

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Journée internationale: La femme confrontée à davantage de défis en 2022

Dur dur d’être une femme en 2022. Qu’elle soit épouse, maman et salariée ou professionnelle et non mariée, pour sa survie, celle-ci est confrontée à d’innombrables défis quotidiens qui ne cessent d’affluer au fil du temps. Comment vit la Mauricienne à cette époque ? Quelles difficultés et discriminations brave-t-elle ? Tour d’horizon à l’occasion de la Journée mondiale des femmes célébrée ce mardi 8 mars

Réveil  à 6 heures, préparation des repas pour son fils handicapé, lavage du linge et ménage en parallèle, bains, habillage, trajets vers l’école et le travail. La vie de Yushra est chronométrée. Et ce n’est que le début. «Il y a cinq ans, mon époux nous a laissés et s’est remarié. Je suis seule à gérer mon enfant, mon boulot, nos dépenses et notre petite vie. On s’accroche tous les deux pour ne pas sombrer.»

Multitâche, forte de ces circonstances, cette maman de 36 ans est sur tous les fronts. «Ça ne s’arrête jamais. Je suis comme une machine qui fonctionne en 24/7 et qui n’a pas le droit de défaillir. Si je flanche, personne ne volera à mon secours. Peu importe les circonstances, je dois tenir le coup. Le plus important, c’est mon enfant. C’est ainsi qu’on vit en étant une femme en 2022», ajoute-t-elle.

De son côté, Jacqueline Ah Why, la quarantaine, énumère une diversité de défis auxquels la Mauricienne d’aujourd’hui est confrontée. «Malgré tous les progrès, le regard de la société sur une femme célibataire vivant seule n’a pas beaucoup évolué. Elle est jugée et mal comprise. On la perçoit comme étant fragile et un être qui doit forcément se trouver un compagnon, même si c’est une professionnelle. C’est vraiment dommage, en 2022. Avec mon travail, mon quotidien et mes ambitions, je suis confrontée à de plus en plus de défis.»

Idem pour MarieClaude, la soixantaine, qui se bat contre un cancer sans rechigner à ses obligations familiales. «Je lutte contre la maladie depuis des années. J’ai cumulé au moins trois opérations mais le cancer a resurgi. Je continue à m’occuper de mes tâches ménagères et fais des petits boulots pour aider mes enfants. Si je ne le fais pas, qui s’en chargera ?» se demande-t-elle.

Face à ces enjeux, la femme doit être plus forte que jamais mentalement, précise Jacqueline Ah Why. Confrontée à davantage de responsabilités à notre ère et jonglant entre vie familiale, professionnelle et sociétale, elle est parfois dépassée. «À mon sens, ce n’est pas un signe de faiblesse. Bien au contraire, c’est une indication qu’elle doit se reposer, se revigorer et revenir plus confiante et forte. Sa force est qu’elle peut tomber mais se relèvera toujours.»

Comment vit donc la Mauricienne en 2022 ? Nos intervenants égratignent tous la société patriarcale dans laquelle évolue toujours la femme aujourd’hui, en dépit des progrès en termes de women empowerment, d’introduction des lois sur la violence domestique, entre autres conventions.

Selon Prisheela Mottee, présidente et fondatrice de l’association Raise Brave Girls, c’est toujours un défi pour la femme de vivre en 2022 face aux sous-entendus et clichés relatifs à son rôle. «Depuis des années, les femmes ont appris à s’adapter dans cette société évolutive et à adopter divers rôles de mère, maman professionnelle, mère célibataire et maman célibataire qui travaille etc. Mais, finalement, rappelons-nous qu’une femme a sa propre identité indépendamment de ses rôles par rapport à ses responsabilités. Peu importe la classe sociale ou le niveau d’éducation, elles ne reculent jamais devant leurs responsabilités comme elles maîtrisent l’art d’être multitâche.»

«Dans la tête des employeurs, l’homme est considéré plus fiable que la femme, ce qui n’est pas nécessairement le cas. La loi protège-t-elle la femme suffisamment ?»

Le pouvoir des femmes tient à la détermination individuelle qui se forge avec la compétence, l’autonomie et la connexion. Pour sa part, Trisha Gukhool, consultante en genre, soutient que malgré les défis, les femmes sont toujours capables de les relever. «Le prix de l’essence a flambé, de même que ceux des produits essentiels. Je ne peux imaginer les répercussions sur les familles en difficultés financières, surtout les ménages gérés par des femmes et des mères-célibataires.» Pour elle, il incombe de reconnaître les accomplissements de ces femmes dans les sphères sociales, culturelles, économiques, politiques et domestiques.

Indépendamment de la couche sociale ou du groupe ethnique, indique le sociologue Ibrahim Koodoruth, aujourd’hui, «la femme est toujours considérée comme une citoyenne de deuxième classe», dans le sens que les hommes peuvent se permettre certaines choses, à l’inverse des femmes. Par exemple, explique-t-il, pour son anniversaire, l’homme pourra aisément inviter ses amis et collègues chez lui. Mais pour la femme, ce sera risqué d’en parler à son conjoint. «Il dira sans doute qu’il doit y réfléchir et qu’il y a le qu’en-dira-t-on, etc.»

Sur papier, le statut d’égalité et le progrès des femmes sont présents mais est-ce véritablement mis en pratique, se demande-til. «Comme on est dans une société patriarcale, l’homme est avantagé à plusieurs niveaux. Et avec le Covid-19, le statut de la femme a pris un grand coup. L’État doit comprendre qu’il faut concrétiser ces égalités car à chaque secousse, c’est la Mauricienne qui en sera la victime», déclare-t-il.

Bruneau Woomed, coach, formateur et observateur de la société, constate un épanouissement professionnel et une présence plus marquée des femmes. Plusieurs d’entre elles parviennent à réaliser qu’elles sont dans des relations toxiques et à agir en conséquence. Mais, à côté, la réalité des responsabilités maritales, familiales et professionnelles des plus exigeantes les rattrape. «Des fois, ces forces jouent dans le sens contraire. Beaucoup de femmes arrivent à s’en sortir tandis que d’autres vivent cela difficilement, surtout en l’absence de soutien voulu de leur famille ou conjoint. Il y a de nouveaux obstacles à surmonter.»

Quelles sont justement les difficultés et discriminations que bravent les femmes en 2022 ? Trisha Gukhool les situe à plusieurs niveaux : une féminisation de la pauvreté à 11 %, 41 % des femmes en emploi comparées à 72 % d’hommes et une sous-représentation de ces dernières dans la prise de décision et en politique.

Selon la consultante, un des enjeux prioritaires est le changement climatique. «En 2022, nous avons vécu deux cyclones majeurs à Maurice. Les femmes ont-elles accès aux capacités, ressources et mécanismes d’adaptation pour résister aux catastrophes naturelles ?»

Pour Prisheela Mottee, les préjugés accablent les femmes de par leur statut marital. Parallèlement, des discriminations prévalent en termes d’apparence physique. «En 2022, les discriminations se répercutent dans diverses sphères de vie. Par exemple, le glass-ceiling n’a pas encore été brisé au niveau des comités de direction ou du top management. De plus, toutes les entreprises ne sont pas pourvues de salles d’allaitement, ce qui est un droit humain de base puisqu’on ne veut pas exclure les femmes du marché du travail.»

D’autres formes de discrimination incluent le harcèlement de rue avec davantage de femmes-victimes et une difficulté à le prouver. D’autres problèmes incluent l’accès aux facilités d’infrastructures. Le plus gros défi, estime Bruneau Woomed, est de trouver cet équilibre entre le travail et la vie sociale. Il renchérit sur le manque d’infrastructures pour accompagner la femme professionnelle et maman.

«Comment faire si les enfants ne vont pas bien ? Comment concilier à la fois le côté professionnel et maternel ? Mon souhait est que les entreprises offrent plus de soutien aux employées pour trouver ce juste milieu. Certains supérieurs sont encore de la vieille école et usent de leur pouvoir pour rabaisser les gens, dont les femmes. Mais ce type de discrimination évolue en général.»

D’ailleurs, sur le plan professionnel, Ibrahim Koodoruth affirme que les premières à être licenciées sont toujours des femmes. «C’est malheureux. Dans la tête des employeurs, l’homme est considéré plus fiable que la femme, ce qui n’est pas nécessairement le cas. La loi protège-t-elle la femme suffisamment ? Y at-il une éducation au niveau des employeurs ? Il faut voir tout cela dans la pratique», confie-t-il.

Plus nombreuses mais plus vulnérables

<p>Les données de Statistics Mauritius dénotent plusieurs aspects intéressants sur la femme mauricienne en 2020. En voici les points saillants :</p>

<p>&nbsp;639 712 femmes étaient répertoriées contre 626 028 hommes en termes de population locale.</p>

<p>&nbsp;En 2020, on compte 13 684 femmes de plus que les hommes. Et, en moyenne, elles vivent jusqu&rsquo;à 6,8 années de plus que leurs homologues masculins.</p>

<p>Le taux de mortalité lié au diabète, aux maladies cardiaques, cérébrovasculaires et à l&rsquo;hypertension était de 55,6 % chez les Mauriciennes, comparé à 51,6 % chez les hommes.</p>

<p>&nbsp;11,9 % des femmes professionnelles étaient à la tête des entreprises, contrairement aux hommes qui affichent un taux supérieur de 18,6 %.</p>

<p>&nbsp;Les femmes au chômage sont plus qualifiées puisque 22 % d&rsquo;entre elles possèdent des diplômes universitaires contre 17,5 % chez les hommes.</p>

<p>&nbsp;En 2020, 6 735 femmes se sont mariées alors qu&rsquo;en 2011, 241 141 femmes de 15 à 75 ans étaient mariées.</p>