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Maurice v/s Maldives: les futures frontières maritimes doivent passer près des Chagos

9 février 2022, 22:00

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Maurice v/s Maldives: les futures frontières maritimes doivent passer près des Chagos

Depuis 12 ans Maurice bataille avec les Maldives pour délimiter les frontières maritimes entre les deux États insulaires. L’affaire a été portée devant le Tribunal international du droit de la mer. Comme Maurice doit soumettre sa réplique dans cette affaire d’ici le 14 avril, un voyage aux Chagos a été organisé. Ils se trouvent dans la région où doivent passer ces frontières maritimes.

Pourquoi maintenant?

La date butoir est le 14 avril 2022. Maurice a deux mois pour soumettre sa réplique, dans le second tour des procédures devant la Chambre spéciale du Tribunal international du droit de la mer. Maurice et les Maldives ont porté leur différend concernant la délimitation des frontières maritimes devant cette instance en 2019.

Pour mieux répondre aux Maldives en cour, Maurice finance un voyage au Nord de l’archipel des Chagos, dirigé par l’ambassadeur Jagdish Koonjul, représentant permanent de Maurice auprès des Nations unies.

Géographiquement, les Maldives sont beaucoup plus près des Chagos que Maurice. L’atoll Addu des Maldives se trouve à 300 milles nautiques de Diego Garcia, la seule île habitée des Chagos. Ce différend concernant les frontières maritimes remonte à 2010. Jusqu’en 2019, aucune solution n’a été trouvée, d’où le recours au Tribunal international du droit de la mer. Une fois le document de Maurice soumis, la Chambre spéciale du tribunal a donné aux Maldives jusqu’au 15 août 2022 pour répondre à Maurice.

Des frontières maritimes qui valent de l’or

Beaucoup n’avaient pas entendu parler de Bleinhem Reef – c’est là où se rend la délégation dirigée par Jagdish Koonjul – jusque-là. L’océanographe Vassen Kauppaymootoo explique que Blenheim Reef est un récif submergé avec un important réservoir de biodiversité.

Mais son intérêt est surtout en termes de zone économique exclusive. «Quand un petit morceau de rocher dépasse de l’eau, il y a une Zone économique exclusive de 250 milles nautiques autour qui peut s’étendre à 300milles nautiques si on a l’extension du plateau continental.» Le plateau continental représentant, de manière sommaire, le prolongement des zones côtières.

En janvier 2021, le Tribunal international du droit de la mer soulignait que «Maurice avait certains droits relativement à l’archipel des Chagos, y compris des droits de pêche (…) le droit de bénéficier de toute découverte minière ou pétrolière».

Maldives, la douloureuse

Des accords ont déjà été trouvés avec d’autres voisins – les Seychelles et la France au nom de La Réunion – concernant la délimitation des zones économiques exclusives et le plateau continental. C’est une tout autre histoire avec les Maldives. Devant le tribunal de la mer, ce pays a émis une série d’objections. Parmi celles-ci, que le Royaume-Uni était une tierce partie indispensable dans ce procès. Parce que les Chagos revendiqués par Maurice font partie du British Indian Ocean Territory.

Mais la Chambre spéciale a estimé que «quels que soient les intérêts que le Royaume-Uni pourrait encore avoir relativement à l’archipel des Chagos, ils ne feraient pas de lui un État titulaire d’intérêts juridiques suffisants qui serait affecté par la délimitation de la frontière maritime autour de l’archipel des Chagos, et encore moins une tierce partie indispensable».

Les Maldives ont aussi contesté la souveraineté de Maurice sur l’archipel des Chagos. C’est là que sont entrées en jeu les deux cartes maîtresses de Maurice. D’abord, l’avis consultatif de la cour internationale de justice du 25 février 2019, qui statue que les Britanniques doivent mettre fin à leur administration des Chagos et restituer ce territoire à Maurice. Suivi de la résolution votée à l’Assemblée générale des Nations unies en mai 2019. Et donnant un délai de six mois aux Britanniques pour se retirer des Chagos.

Voyage «historique»

Le voyage aux Chagos organisé par Maurice est revenu en force dans le Budget 2021-2022. Une enveloppe de Rs 50 millions avait été allouée à ce projet et le Premier ministre affirmait alors qu’il dirigerait la délégation.

Le dernier voyage organisé aux Chagos par Maurice date de 2006. Dix ans plus tard, en 2016, au moment du renouvellement du bail des Américains à Diego Garcia, les Britanniques interdisent aux Chagossiens de revenir dans l’archipel. Les Britanniques créent un Chagossian Support Package, un fonds de 40 millions de livres sterling, pour améliorer le sort des Chagossiens en Angleterre, à Maurice et aux Seychelles.

En 2020, on apprendra que seul 1 % des fonds ont été utilisés. Le Support Package a surtout servi à financer les heritage visits, de courts séjours dans l’archipel, pour les natifs et leurs descendants. Ces visites tous frais payés par les Britanniques divisent les Chagossiens. Il y a ceux qui ont accepté ces voyages. Il y a ceux qui, comme Olivier Bancoult du Groupe réfugiés Chagos, ont contesté cette façon de faire. Il a entré une action légale devant la Cour suprême à Londres pour contester l’interdiction du droit de retour et le Support Package. Procédure qui n’a pas abouti.