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Perspectives politiques pour 2022

4 janvier 2022, 22:00

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Perspectives politiques pour 2022

• En perspective : mini-remaniement ministériel pour donner un coup de neuf au GM et des tentatives d’arriver à un équilibre 1-1-1 entre le Parti travailliste (PTr), le Mouvement militant mauricien (MMM) et le Parti mauricien social démocrate (PMSD) au sein de l’opposition parlementaire.

Il n’y a pas de trêve en politique, même si officiellement le Parlement reprendra le 29 mars 2022. Tant dans le camp gouvernemental que parmi les oppositions parlementaires et extraparlementaires, on reprendra les mêmes pour recommencer l’année, avec l’accent sur la communication pour le gouvernement en ballotage défavorable à cause des casseroles qu’il traîne, de même que pour les oppositions qui devraient harmoniser leurs violons, alors que le titre de leader de l’opposition revient sur le tapis en ce début 2022 et que les municipales pourraient être, une nouvelle fois, renvoyées aux calendes grecques.

Image gouvernementale 

Dans les démocraties modernes, la communication n’est pas un vain mot; elle est le véhicule de l’action et de la réforme au service de l’intérêt général, semble-t-on avoir réalisé au sein du pouvoir, dont l’objectif est de refaire son image. À l’hôtel du gouvernement, face aux critiques acerbes des citoyens-internautes, l’on se dit conscient qu’à l’heure des réseaux sociaux, «il est plus que nécessaire de maîtriser le message adressé aux Mauriciens et non pas faire perdurer la confrontation au niveau de l’ICTA et l’IBA. Ce travail doit être laissé à des professionnels, et non pas à des amateurs qui pensent que leurs posts aident le gouvernement. Les ministres et les PPS devraient revoir leur communication et mieux coordonner celle-ci. On demandera aussi à ceux qui gravitent autour du pouvoir de ne pas poster leurs fêtes, voitures, voyages ou villas, voire leurs pensées, parce que nous allons entrer dans un contexte difficile et qu’il faut qu’on se montre solidaire avec la masse», nous explique un ministre, qui connaît bien les rouages du gouvernement. Il concède que «le gouvernement s’est éloigné du peuple depuis sa réélection, à cause du Covid-19, mais pas uniquement. Certains ministres et nominés politiques n’ont pas été à la hauteur…» 

Contacté, un adviser du Prime Minister’s Office (PMO) dit ne pas être au courant d’un prochain remaniement ministériel et pense surtout que «le gouvernement a trouvé ses marques malgré la pandémie qui a tout compliqué». Il avoue que les dossiers Tourisme, Santé, Éducation, Finances auraient pu avoir été mieux gérés «si les ministres avaient un peu plus d’expérience politique, raison pour laquelle il leur faut encore du temps». Mais cette analyse est rejetée par plusieurs au sein du Mouvement socialiste militant (MSM), qui estiment qu’après deux ans de rodage, le gouvernement doit améliorer son image et contrer toute perception de glissement autocratique. «C’est pour cela, du reste, que nous avons fait pression pour que le discours charcuté du cardinal Piat soit rediffusé in toto. Cette maladresse affecte tout le parti…» 

Inflation et impotence de la Banque centrale 

Après le scandale Molnupiravir, qui a choqué l’opinion et révélé les dessous pourris des procédures d’achats d’urgence d’équipements et de médicaments (qui perdurent malgré les épisodes antérieurs de Pack & Blister, le départ du ministre du Commerce Yogida Sawmynaden et du directeur de la STC, Jonathan Ramasawmy, et la publication des courriels personnels d’un conseiller du PMO avec les fournisseurs), le gouvernement a connu une fin d’année agitée, qui a vite fait oublier le feel-good factor du boni de fin d’année, et ravivé les craintes liées à l’inflation. Face à leurs mandants, les membres du gouvernement ont réalisé que l’augmentation conséquente du prix des carburants a eu l’effet d’un coup de massue sur la population. 

Face aux cris de la rue, le PMO a jugé utile de décréter le 3 janvier un jour férié, histoire de calmer l’opinion. «Mais dès le 4 janvier, les critiques vont reprendre quand on ira faire le plein aux stations-service, ou quand il faudra affronter les hausses en cascade. Les gens ne comprennent pas le contexte international et nous demandent de baisser les taxes», confie un élu du gouvernement, qui estime que ce dernier n’avait pas le choix que de majorer les prix. 

N’est-ce pas l’impuissance de la Banque de Maurice (BoM), qui a choisi de privilégier la dépréciation de la roupie et qui a perdu son pouvoir d’intervention sur le marché en raison de son balance sheet dans le rouge ? «Il vous faut poser la question au ministre des Finances et au gouverneur de la BoM ! Vous avez transféré des fonds d’un compte à un autre, vous avez été rappelés à l’ordre par le FMI et, aujourd’hui, c’est le petit peuple qui paie le prix cher des relations incestueuses entre le ministère des Finances et la BoM…», s’élèvent plus d’un technocrate avaient de la Banque centrale, qui sont contre l’ingérence politicienne outrancière, tant à la BoM qu’à la FSC. 

«Après deux ans, certains ministres ne passent plus en raison des promesses non-tenues dans leur circonscription ou de la gestion maladroite de leurs dossiers. Renganaden Padayachy est un beau parleur, mais il n’arrive pas à sortir l’économie de son impasse durable, et au numéro 13, on se dit déçu de son travail sur le terrain.» (... ) Il continuer a surestimé les arrivées touristiques. Il a déçu les pensionnés qui n’ont pas eu de compensation sur un coût de la vie qui ne cesse de grimper, même si les chiffres de l’inflation ne reflètent pas la vérité des ménages…, explique S. R., un ancient agent du MSM, qui a pris ses distances du parti. 

Outre le Premier ministre et Padayachy, les autres ministres parmi les critiqués sur le terrain sont, entre autres, Kailesh Jagutpal (Santé, Molnupiravir), Joe Lesjongard (CEB et CWA), Steven Obeegadoo (Tourisme et Logement), Leela Devi Dookun-Luchoomun (Éducation), Kalpana Koonjoo- Shah (Droits de l’enfant), Stephan Toussaint (Jeunesse & Sports), qui ont été au-dessous des attentes dans leur circonscription. Ils seront suivis de près. 

*** 

Dans le camp de l’opposition, où l’on brasse large, l’idée émise par Roshi Bhadain et Rama Valayden, selon laquelle les élus du PMSD, MMM et du PTr devraient démissionner du Parlement, a été largement rejetée. Ce qui révèle les divergences d’opinion et d’intérêts au sein des partis et groupes qui constituent les oppositions au régime. Alors que Bhadain et Valayden ne sont pas directement concernés, car n’étant pas au Parlement, la situation demeure confuse au sein de l’opposition parlementaire. 

Le 3 mars 2021, après la démission d’Arvin Boolell comme leader de l’opposition, à la suite d’un différend entre le MMM et le PTr au sujet du poste de Premier ministre (alors que les élections ne se tiendront pas avant 2024), Xavier-Luc prendra le relais de Boolell «afin de ne pas laisser un vacuum face au gouvernement». Le leader des Bleus, qui compte désormais (seulement) trois autres députés bleus (après le départ de Salim Abbas Mamode du PMSD pour rejoindre le train du pouvoir), veut remettre le poste sur la table des discussions. 

«Je suis conscient qu’il y a lieu de garder un équilibre entre les trois principaux partis. Je n’ai aucun problème à renoncer au poste de leader de l’opposition après une année dans ce rôle. Je prendrais volontiers mon ancien rôle comme président du Public Accounts Committee, si le poste de leader de l’opposition revient au MMM ou au PTR, et que le poste de whip est occupé par un Mauve ou un Rouge», confie Xavier-Luc Duval. Il estime que chaque parti devrait prendre un des trois postes officiels qui revient de droit à l’opposition. «Le partage doit être équitable. Pas question que l’un garde deux des trois pour les Rouges ou les Mauves. Le 1-1-1 doit primer et refléter les souhaits des mandants.» Notons que le PTr compte 12 sièges au Parlement, le MMM, 9 et le PMSD, 4. 

Dans les rangs des Mauves, personne n’a souhaité commenter la recomposition de l’opposition. L’un d’eux a précisé que «Paul Bérenger n’est pas intéressé par ce poste et préfère laisser la place aux jeunes», alors que certains détracteurs parlent d’une tactique dilatoire du leader du MMM, qui préfère ne pas avoir à affronter Pravind Jugnauth, en restant spectateur du duel MSM/ PMSD, afin de ne fermer aucune porte. «Il sait que Ramgoolam, revanchard, pourrait claquer la porte du MMM…» Les Rouges, eux, avancent qu’il est encore tôt pour tout finaliser et préfèrent attendre que le leader se remette sur pied avant…. «Il nous faut aussi savoir si le gouvernement va donner les élections municipales cette année, ou s’il va encore se réfugier derrière le Covid-19…»