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Dr Pauvaday: «Combien de parlementaires (…) ont été vaccinés au Sinopharm ?»

8 novembre 2021, 13:01

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Dr Pauvaday: «Combien de parlementaires (…) ont été vaccinés au Sinopharm ?»

Le nombre de morts du Covid-19 augmente de façon inquiétante même chez les vaccinés. Dans l’entretien qui suit, le Dr Keyvoobalan (Vassen) Pauvaday fait le point sur les traitements disponibles et les médicaments que doit commander au plus vite le gouvernement afin de mieux contrôler la pandémie.

Le ministère de la Santé a annoncé ce vendredi que le comité technique a approuvé le médicament antiviral Fabiflu ainsi que le Ronapreve pour le traitement contre le Covid-19. Qu’en pensez-vous ? 
Le Ronapreve, qui est en forme d’injection, a, en effet, été utilisé avec succès pour la première fois, en dehors des essais cliniques, sur le président Trump en octobre 2020. Ce médicament a été approuvé par l’instance régulatrice du Royaume-Uni en août 2021. Il s’agit d’un médicament qui est déjà utilisé dans plusieurs pays. Certaines études ont démontré que le Ronapreve réduit les risques d’hospitalisation et de mortalité par 70 %. 

Le Fabiflu, aussi connu comme le Favipiravir, est quant à lui bien moins efficace. Une méta-analyse publiée récemment a indiqué que ce médicament ne diminue ni la mortalité, ni le besoin de ventilation chez les patients présentant des symptômes modérés ou sévères. D’ailleurs, dans un article publié sur hindustantimes.com en juin 2021, il semblerait que le ministère indien de l’Union Health and FamilyWelfare ait revu son protocole de traitement et qu’il ait enlevé le Favipiravir des traitements recommandés. Je comprends ainsi difficilement les raisons pour lesquelles on va de l’avant avec l’achat de ce médicament pour le traitement contre le Covid-19. 

D’après vous, est-ce qu’on aurait pu sauver des vies si on avait déjà le Ronapreve à Maurice ? 
J’ai mentionné plus tôt que le Ronapreve réduit les risques d’hospitalisation et de mortalité de façon assez conséquente, je vous laisse donc déduire la réponse à votre question.

Est-ce qu’il y a d’autres médicaments que le comité technique aurait dû considérer ? 
L’instance régulatrice du Royaume-Uni a approuvé le Molnupiravir la semaine dernière. Ce médicament est en forme de comprimé et constitue donc un traitement pouvant être effectué à domicile. D’après certaines études, ce traitement diminuerait les risques d’hospitalisation ou de mortalité par 50 %. De plus, le Health Secretary britannique Sajid Javid a considéré ce traitement comme un «game changer». Plusieurs pays, dont le Royaume-Uni, l’Australie, Singapour et la Corée du Sud, ont déjà signé des accords pour l’achat de ce médicament. Je pense qu’on devrait en faire autant. Il ne serait pas acceptable que notre comité technique prenne des mois pour l’approbation de ce traitement – comme cela a été le cas pour le Ronapreve – sachant que les procédures pour l’achat de ce médicament sont également très laborieuses. 

Il y aussi le Paxlovid, un nouveau médicament développé par Pfizer qui réduit apparemment les risques d’hospitalisation ou de décès par 89 %. Ce médicament est en attente d’approbation par l’instance régulatrice des États-Unis. Il n’empêche que le Royaume-Uni a déjà passé des commandes pour obtenir ce médicament au plus vite. Il faudrait là aussi suivre la situation de près et commander ce médicament dès qu’il obtient les approbations nécessaires.

Êtes-vous satisfait de la prise en charge des malades en ce moment ? 
Je pense déjà avoir répondu en partie à cette question. Il faut d’urgence faire en sorte que les molécules efficaces puissent être utilisées afin d’améliorer le traitement contre le Covid-19. En plus de cela, il semblerait qu’il y ait des manquements dans la gestion des patients soumis au traitement à domicile. Je suis inquiet par le nombre de décès des patients soumis au traitement à domicile. Il me semble qu’il y ait un problème au niveau de l’évaluation des cas à risque et du suivi des cas. Est-ce qu’on est en contact régulier avec ces patients afin de détecter à temps les dégradations pour ainsi pouvoir organiser rapidement un transfert vers les institutions de santé appropriées ? Est-ce qu’il y a un «risk score system» ou un algorithme en place pour évaluer ces cas et prédire les risques afin d’aider dans la prise de décision concernant le traitement et le suivi le plus approprié ? 

Il y a une perception dans la population que le vaccin Sinopharm est moins efficace, qu’en pensez-vous ? 
Ma réponse à cette question prendra la forme interrogative. Combien de parlementaires ou de membres du corps médical ont été vaccinés au Sinopharm ? Je pense que c’est la responsabilité du ministère de réagir par rapport à cette inquiétude de la population. Le ministère détient toutes les données, que ce soit en termes du taux d’infections, d’hospitalisations, ou de décès parmi les vaccinés. À ce sujet, une analyse approfondie devrait être menée dans les plus brefs délais et rendue publique afin d’apaiser l’inquiétude de la population. Cette analyse fondée sur des données factuelles aiderait aussi à déterminer les combinaisons de vaccins les plus appropriées pour le choix des vaccins utilisés comme «booster». Par exemple, s’il s’avérait que le Sinopharm est effectivement moins efficace, alors il faudrait donner une priorité aux personnes ayant reçu ce vaccin pour ces doses dites «booster» qui devraient alors être un vaccin autre que le Sinopharm.

Est-ce que le nombre de décès parmi les vaccinés est inquiétant ? 
En Angleterre, parmi 51 000 morts du Covid-19, seulement 256 étaient vaccinés à double dose. Encore une fois, le ministère détient les chiffres. Il faudrait procéder à des analyses de comparaison de nos chiffres avec celles des autres pays et rendre ces analyses publiques. 

Pour un pays comme Maurice, je pense qu’on aurait dû avoir plus de planification et se limiter à deux types de vaccin seulement, l’AstraZeneca et le Pfizer. Au ministère de la Santé, on n’a pas suffisamment d’expérience concernant les médicaments fabriqués en Chine ou en Russie. En matière de santé publique, la priorité est et sera toujours la santé de la population – il faudrait donc éviter de prendre des décisions fondées sur des considérations géopolitiques ou autres. 

Pensez-vous qu’on aurait sauvé des vies avec une différente stratégie de vaccination ? 
Une analyse approfondie des données répondrait à cette question. 

Pour conclure, pensez-vous qu’on aurait dû ouvrir les frontières et estce que la population est devenue totalement irresponsable ? 
Oui, sans nul doute, on devait ouvrir les frontières. La fermeture des frontières n’est qu’une mesure temporaire prise en guise de préparation pour affronter la pandémie. Pendant cette période, on est censé recueillir le plus d’informations possible afin de pouvoir mieux gérer la pandémie lorsqu’on serait inévitablement amené à y faire face. On a eu amplement de temps depuis l’année dernière pour faire tout cela. Avec une stratégie de vaccination plus efficace, on aurait pu ouvrir les frontières bien plus tôt, et avec moins d’effets néfastes sur l’économie. 

Le manque de transparence concernant la situation du Covid-19 à Maurice a largement contribué à rendre la population moins vigilante. On a considérablement diminué le nombre de tests PCR qu’on faisait, ce qui diminuait donc le nombre de cas détectés par cette voie. Suite à la publication des résultats des tests PCR uniquement, la population a compris que le Covid-19 était en nette régression, et il y a eu un relâchement par rapport aux mesures barrières. Afin d’éviter cela, on aurait dû publier les résultats des rapid tests également. Ainsi, la population aurait compris que la pandémie était toujours d’actualité et qu’il ne fallait pas baisser les bras.