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Le Pérou, pays le plus touché par le Covid, se souvient de ses morts

3 novembre 2021, 10:10

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Le Pérou, pays le plus touché par le Covid, se souvient de ses morts

Des visages souriants sur fond de ciel azur: dans les maisons des quartiers pauvres de Piura, à l'extrême nord du Pérou, de grands posters ravivent la mémoire des morts du Covid-19 dans ce pays qui détient le triste record mondial de mortalité par habitant.

«Cette maudite maladie m'a pris mes parents, c'est une blessure tellement grande qu'on ne peut pas l'effacer», dit dans un sanglot Esmilda Alvarado, 58 ans. Dans sa maison d'un quartier populaire de Piura, ville de 400 000 habitants, elle montre une photo de ses parents morts après avoir été contaminés par une de leurs petites-filles.

«Ma mère était quelqu'un de dynamique, mon père aussi (...) Je prenais soin d'eux, je passais du temps avec eux. J'ai même arrêté de travailler pour prendre soin d'eux», raconte-t-elle.

Avant l'apparition du coronavirus, Piura, située à quelque 1 000 km au nord de Lima, à la frontière de l'Equateur, était connue pour ses plages ensoleillées, sa pêche et sa production agricole variée dans une campagne baignée de rivières.

Mais en quelques mois, elle est devenue l'épicentre de la pandémie dans un pays qui affiche le plus haut taux de mortalité au monde, avec fin octobre plus de 607 décès pour 100.000 habitants - contre 286 au Brésil ou 174 en France - selon un décompte de l'AFP à partir de données officielles.

Rosa Elias de Montalban, 65 ans, a perdu son mari. Dans sa petite maison, elle a collé une affiche le montrant avec deux grandes ailes, tel un ange.

«Comme ça je le vois tous les jours et il demeure dans la maison, comme s'il était vivant», raconte la sexagénaire sans pouvoir retenir ses larmes.

«Crainte d'une "nouvelle vague" »

Le Pérou, 33 millions d'habitants, a enregistré officiellement 2,2 millions de cas et le nombre de morts dépasse les 200 000, dont 12 000 dans la région de Piura.

A l'origine de ce triste record mondial, une pauvreté qui touche 30% de la population, des logements surpeuplés, un système de santé précaire souffrant d'un sous-investissement chronique, selon les experts.

Le secteur informel est aussi important et de nombreux Péruviens n'ont pas respecté les confinements instaurés par les autorités, car ils devaient sortir travailler pour survivre.

Lorsque les centres médicaux de Sullana, deuxième ville la plus peuplée de la région (230 000 habitants), ont été au bord de la rupture, le ministère de la Santé a réquisitionné le stade municipal.

 

«En raison de la pandémie, nous avons dû prendre possession des vestiaires et d'autres (salles) pour installer un hôpital de campagne», explique à l'AFP le médecin infectiologue Luis Alfredo Espinoza.

Sous les tribunes ont été installés un service de réanimation de 16 lits et une zone d'hospitalisation pouvant accueillir 240 malades.

Devant l'une des arches du stade, trônent trois grandes citernes contenant 13 000 litres d'oxygène, dont les pénuries ont été criantes pendant plusieurs mois dans tout le pays.

«Je ne pouvais pas respirer, ma poitrine sifflait. J'ai prié Dieu» et «je suis allée mieux», raconte à l'AFP Maria Magdalena Yarleque, 57 ans, qui a contracté le virus malgré deux doses de vaccin.

 

«J'ai vaincu la maladie, Dieu merci ! Je remercie les médecins de l'hôpital», se réjouit Segundo Calderon, un cultivateur de mangues de 69 ans hospitalisé pendant un mois.

Après un pic en août, les infections sont en baisse. La région tente de retrouver une vie normale, mais les touristes sont encore peu nombreux et les écoles n'ont que partiellement repris les cours.

Surtout les médecins savent qu'il ne faut pas baisser la garde et s'efforcent de faire progresser la vaccination.

«Au cours des 15 derniers jours, il y a eu une augmentation de la présence du variant Delta. La troisième vague arrive», s'alarme le Dr Espinoza.

Des brigades sanitaires, protégées par leur combinaison de bio-protection bleu clair font le tour des villages pour vacciner les volontaires. Pour l'heure, 54% des Péruviens de plus de 12 ans ont reçu deux doses de vaccin.