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Sextorsion: Filles mineures, arnaques majeures

22 août 2021, 22:10

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Sextorsion: Filles mineures, arnaques majeures

Le sexe et la Toile sont un filon que certains exploitent pour gagner de l’argent sans se soucier des répercussions comme dans l’affaire Telegram ou la pédopornographie à Rodrigues. On note toujours des comptes sur les réseaux sociaux qui vendent les charmes des femmes auprès d’une clientèle. C’est une affaire 100 % mauricienne d’après les informations que nous avons glanées et récoltées de mineures…

Difficile  à dire s’il y a bien un réseau qui opère sur les réseaux sociaux, mais depuis quelque temps des comptes se multiplient pour inviter les gens à payer pour du voyeurisme. Des photos de femmes ressemblant à des Mauriciennes invitent la gent masculine à des appels vidéo et ces jeunes filles indiquent qu’elles sont mineures. Leur liste d’amis est d’ailleurs composée d’hommes. Le tarif est de Rs 300 à Rs 500, forfait qui comprend des photos intimes et des vidéos. Pour du vidéo live, il faut ajouter de Rs 200 à Rs 300. Le paiement s’effectue par Juice et les clientes l’exigent en avance avec une capture d’écran comme preuve de paiement pour effectuer leur show et envoyer des photos. La conversation se déroule sur l’application de messagerie WhatsApp.

Certains mordent à l’hameçon, comme ce jeune habitant de Beau-Bassin, qui par curiosité a envoyé de l’argent à l’une des jeunes filles, que nous appellerons Marina. Il verse d’abord Rs 300 par Juice mais ne re- çoit aucune photo. Il insiste et reçoit comme réponse : «Met Rs 200 ankor ladan lerla mo send twa li. Mo pé perdi. Kouma mo gagn li mo send twa.» Mais aucune photo en retour malgré ce supplément et Marina insiste pour Rs 200 de plus. Cette fois, elle essuie un refus et son langage change avec des menaces. «To avoy kas apré to gagn vinn blackmail mwa Mo pé al post to foto ek niméro kont lor bann paz FB pou dir tonn avoy kas apré to pé vinn blackmail mwa pou nudity ek mo éna 17 ans.» Pour ne pas mettre sa menace à exécution, elle exige Rs 500, sinon elle portera plainte à la police. Après plusieurs autres menaces, une trentaine de minutes à tergiverser, elle finira par bloquer la conversation avec son interlocuteur.

Autre victime, même schéma : un habitant de Terre-Rouge s’est fait arnaquer récemment sur les réseaux, intrigué par la proposition d’une jeune femme. Cette dernière ne précise pas si elle est mineure. «Nous avons d’abord débuté une discussion après qu’elle m’a ajouté comme ami sur Facebook. Après une bonne heure à envoyer des messages, elle a commencé à me faire toutes sortes de propositions. Linn dir mwa li fer sa parski li pé bien bizin inpé kas.» Le jeune homme tombe aussitôt dans le panneau. Mais après avoir envoyé l’argent demandé, soit Rs 700, il ne recevra rien en retour.

«Linn koumans dir mwa mo pa pou gagn nanié, al get gard si mo le.» Il a alors décidé de ne rien faire contre la personne et l’a aussitôt bloquée. Mais il soutient que depuis, il reçoit souvent des demandes d’amis louches sur son réseau social. «Je suis sûr qu’elles sont plusieurs à le faire ou une personne sous différents pseudonymes. Je ne parle plus aux gens que je ne connais pas...»

Un autre jeune homme, qui a bien voulu se confier à nous, explique qu’il a déjà eu ce genre de proposition en début d’année. Tout comme le reste de nos interlocuteurs, c’est sur Facebook que tout commence. «Une fille qui porte le même nom de famille que ma copine m’a ajouté sur les réseaux sociaux. Je pensais qu’il s’agissait d’un membre de sa famille mais en fait ça n’avait rien à voir.» Il explique que la jeune fille, qui n’a pas l’air d’avoir plus de 16 ans, poste des stories sur Facebook avec des photos en petite tenue, proposant de dévoiler plus contre de l’argent.

«Elle m’a envoyé un message le jour même où je l’ai ajoutée pour me demander si j’étais intéressé mais je n’ai rien répondu. Cela m’a beaucoup choqué car elle faisait très jeune. Je ne sais pas si c’est un faux profil mais j’ai attendu de confirmer avec ma copine qu’il ne s’agissait pas d’un membre de sa famille et je l’ai bloquée», explique le jeune homme. Il indique qu’après cet épisode qui date de février, il continue à avoir des demandes d’amies de cette jeune fille sous d’autres noms.

D’ailleurs, à la rédaction de l’express, nous avons nous-mêmes vu plusieurs jeunes filles et jeunes femmes qui faisaient ce genre de propositions pour de l’argent en faisant des incursions sur des groupes chats, sur Messenger et Telegram. La majorité des posts que nous avons vus, partagés par des hommes ou des filles elles-mêmes, étaient de filles mineures.

Du côté de la police, l’inspecteur Shiva Coothen explique que dans ce genre de cas, les filles qui proposent ce genre «d’affaire» et les hommes qui envoient de l’argent sous prétexte d’être intéressés commettent un délit. «À aucun moment une personne n’a le droit de vendre des photos ou vidéos obscènes sur les réseaux sociaux. Les hommes qui approchent ces filles sachant qu’elles sont mineures commettent un délit de plus.» Il s’agit là, ajoute-t-il, de sextorsion. Est-ce que la Cybercrime Unit ne voit pas ce genre de posts ? Selon l’inspecteur, s’il n’y a pas de plaintes, la Cybercrime Unit ne peut pas savoir qu’il y a ce genre de choses. «Les réseaux sociaux sont vastes, il faut savoir quoi chercher pour le faire.»

L’Ombudsperson for Children, Rita Venkatasawmy, indique pour sa part que les réseaux sociaux sont devenus un terrible danger pour les jeunes quand il n’y a pas de bonne gestion. «Tout ce que je peux vous dire, c’est qu’il faudrait que ceux concernés aient le courage de porter plainte afin que nous puissions enquêter car c’est grave.» Les hommes à qui nous avons parlé, affirment qu’ils ne veulent pas aller de l’avant pour éviter des problèmes. Nous avons essayé de contacter une des filles qui vend ses photos, mais nos coups de fil sont restés sans réponse.