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Russie: deuil, obsèques et débat après une fusillade scolaire

12 mai 2021, 19:54

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Russie: deuil, obsèques et débat après une fusillade scolaire

La république russe du Tatarstan enterrait mercredi ses morts au lendemain de la fusillade qui a emporté sept enfants et deux enseignants, déclenchant un débat au sein du pouvoir sur l'accès aux armes et l'usage de l'internet.

Parmi les funérailles, celles dans la matinée d'Elvira Ignatieva, 26 ans, une professeure d'anglais abattue par le tireur de 19 ans alors qu'elle tentait, selon certains, de sauver un enfant.

Des dizaines d'anonymes ont déposé des fleurs, des peluches et des bougies devant l'école n°175 de Kazan, capitale du Tatarstan, où Ilnaz Galiaviev, 19 ans, un ancien élève, a fait irruption pour semer la mort armé d'un fusil avant d'être arrêté par la police.

Il s'agit de la pire fusillade dans un établissement russe depuis 2018, un drame relativement rare dans un pays où le contrôle des armes est strict, mais où les violences impliquant des élèves sont en augmentation.

Les sept enfants tués étaient de la même classe de 4e, soit âgés en principe de 13-14 ans. Vingt-trois personnes, dont 20 mineurs, sont hospitalisées, dont plusieurs dans un état grave.

Fuyant les tirs, certains enfants se sont blessés en sautant par les fenêtres du 3 étage.

Elle a défendu ses enfants

Les premiers enterrements ont eu lieu dans la matinée, notamment celui d'Elvira Ignatieva, la professeure d'anglais.

«C'est elle qui a pris une balle en premier, dans la tête. Puis ce malfrat a tiré sur les enfants. Elle a voulu les protéger, elle ne s'est pas cachée», a raconté à l'AFP l'oncle de la victime, Talgat Goumerov, 65 ans.

«Elle était dans la classe des 4e A, celle où tous les enfants ont été abattus (...) elle est sortie voir ce qu'il se passait et on lui a tiré dessus. On dit qu'elle a protégé un enfant», raconte Darina Katioukhina, une élève de la défunte venue à l'enterrement.

Le corps de la victime, selon la tradition tatare, une minorité musulmane en Russie, était enveloppé d'un drap vert et entouré de dizaines de personnes récitant le Coran.

Débat sur les armes et internet

Selon les enquêteurs, le tireur doit être formellement inculpé mercredi avant qu'un juge décide d'un placement en détention.

Le Comité d'enquête a précisé que des proches du tireur avaient indiqué lors d'interrogatoires que «depuis le début d'année, il montrait un comportement agressif et irascible».

L'année dernière, il souffrait de graves migraines et lors d'une consultation «une maladie cérébrale a été diagnostiquée», selon cette source.

Enfin l'état d'agitation du suspect «gêne les procédures d'investigations», relève cet organe en charge des principales enquêtes criminelles en Russie.

Une vidéo diffusée mardi l'a montré torse nu et couvert de sang allongé dans une cellule, hurlant être «Dieu» et avoir tué car il «déteste tout le monde».

Le jeune homme de 19 ans avait quitté l'école N°175 il y a quatre ans pour suivre une formation d'informaticien dont il a été exclu le mois dernier.

D'après des médias locaux, il avait annoncé son intention d'attaquer l'établissement sur un compte de la messagerie Telegram appelé «Dieu».

Selon les autorités, il avait obtenu légalement son arme, fin avril, certificat d'aptitude mentale à l'appui comme l'exige la loi.

Ce drame a donc relancé plusieurs débats. Le président Vladimir Poutine a d'abord ordonné de revoir les règles du port d'armes et un durcissement pourrait être étudié dès la semaine prochaine par les députés.

Le président de la chambre basse du Parlement, Viatcheslav Volodine, a jugé lui «nécessaire» de débattre afin de «mettre fin à l'anonymat sur internet», pour lutter contre la diffusion «de messages violents et glorifiant l'extrémisme».

Cette déclaration intervient alors que le Kremlin cherche à accroître son emprise sur les contenus en ligne, notamment liés à l'opposition.

Un sénateur, Alexandre Bachkine, propose enfin de règlementer les jeux vidéo violents qu'il juge «extrêmement dangereux» pour la santé mentale des adolescents.

La fusillade de mardi rappelle celle d'octobre 2018, lorsqu'un adolescent avait tué 19 personnes avant de se suicider dans un lycée de Crimée, péninsule ukrainienne annexée par Moscou.

M. Poutine avait alors blâmé «la mondialisation», estimant que le phénomène des fusillades scolaires provenait des Etats-Unis.