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Marche du 13 février - l’après: un programme d’alternance dans le viseur

15 février 2021, 18:30

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Marche du 13 février - l’après: un programme d’alternance dans le viseur

Les membres de l’opposition et ceux de Linyon Sitwayin se sont rencontrés à un rythme accéléré ces deux dernières semaines pour organiser la marche de samedi. Que se passera-t-il maintenant après cette première grande activité de 2021 ?

Arvin Boolell, porte-parole de l’opposition, soutient que la prochaine rencontre, qui n’est pas encore fixée, permettra aux participants de faire un post-mortem du rassemblement de samedi. «Ensuite, on mettra sur pied un comité pour discuter des points de l’accord signé le mardi 9 février. Après le succès de la marche, nous devons nous atteler à rédiger un programme basé sur les points de l’accord signé», affirme le leader de l’opposition. Il ajoute que les Mauriciens qui sont descendus dans la rue, samedi, de même que des milliers d’autres qui sont d’accord avec une telle activité souhaitent une société équitable, juste et transparente. «Ce sera l’objectif de ce programme», avance-t-il.

Bruneau Laurette, porte-parole de Linyon Sitwayin, parle lui aussi d’un «debriefing» qui devrait se tenir dans les jours à venir avant que ses camarades et lui ne travaillent sur un programme d’alternance. «Peut-être que les camarades de Linyon Sitwayin travailleront de leur côté pour la préparation d’un tel document et qu’ensuite on en discutera avec les politiciens.» Il estime que la préparation d’un tel document prendra environ deux mois. En attendant, Lininyon Sitwayin compte aussi discuter avec l’opposition de certaines questions qui pourraient être soulevées au Parlement, dont la reprise des travaux est prévue dans un peu plus d’un mois. «La mouvance a été déclenchée pour le départ de ce gouvernement et le combat sera gagné», dit-il.

En revanche, c’est encore le flou au ni- veau des discussions pour les élections municipales. Le leader du Mouvement miitant mauricien (MMM), Paul Bérenger, a indiqué que la question autour de ces élections sera prise au niveau des partis politiques après le 13 février et on a appris que le parti sera appelé à entamer des discussions en interne peut-être dès ce soir au cours de la réunion de son bureau politique.

Arvin Boolell estime que la question sera discutée en temps et lieu, d’autant que selon lui, il reste encore du temps pour ce scrutin. Du côté du Parti mauricien social-démocrate (PMSD), son secrétaire général, Mamade Khodabaccus, estime qu’il faut suivre ce qui va se passer au niveau du Mouvement socialiste militant (MSM) dans les jours à venir. Selon lui, d’autres défections au niveau de la majorité gouvernementale ne sont pas à écarter. Il parle d’une brèche qui s’est opérée au niveau du Mouveman Liberater (ML) avec la présence de Ken Fong, un des plus fidèles d’Ivan Collendavelloo, à la marche du samedi. Le «move» de Nando Bodha sera suivi également, car à ce stade on ne connaît pas encore sa réelle intention, rejoindre un parti ou créer une autre force.

Pravind Jugnauth à Tyack samedi : «L’entente de l’opposition est un panier à crabes»

Au moment même où des milliers des Mauriciens marchaient dans la capitale, le Premier ministre, Pravind Jugnauth, se trouvait dans le Sud, plus précisément à Tyack, Rivière-des-Anguilles dans le cadre d’une cérémonie marquant les 100 ans de l’Arya Samaj. Il a vivement réagi contre l’action de l’opposition et de cette union des citoyens et qualifié l’entente de l’opposition de «panier à crabes» qui vise à déstabiliser le gouvernement pour prendre le pouvoir. «Se enn bann frustré ki pa aksepté ki zot inn perdi eleksion, ki pa respecté bann institusion e zot pe konplote pou fer dezord dan pei.»

Le Premier ministre a déclaré qu’il ne faut pas croire que c’est la marche de samedi dernier qui déterminera celui qui dirigera le pays. Il a été très sévère vis-à-vis de Bruneau Laurette en disant «ki ena dimounn ki finn entrené an Israël e zordi pe lev kou de pwin. Ils veulent refaire ce qui s’est passé en 1999».

Pour Pravind Jugnauth, c’est «une alliance de bandits qui montent communauté contre communauté». Il a poursuivi en disant que certains vont jusqu’à questionner les origines de son épouse et de ses enfants. Il a ajouté qu’il ne va tolérer ces personnes-là. Il estime que «si ces personnes-là étaient des vrais patriotes, ils auraient dû donner un coup de main pour redresser l’économie qui a été affectée par le Covid-19 au lieu de déstabiliser le pays».

Ces paroles de Pravind Jugnauth sont passées au journal télévisé de la MBC au milieu du bulletin, juste après un petit reportage sur la marche dans la capitale. La MBC a quand même montré des images des membres de l’opposition tout en mentionnant leurs noms. Évidemment les images de la foule ont été manipulées pour faire croire aux téléspectateurs qu’il n’y avait pas grand monde à Port-Louis.

Certains Mauriciens n’ont pas voulu participer à cause des politiciens

Ils n’ont pas voulu prendre part à la manifestation. Plusieurs Mauriciens sont restés chez eux ou se sont rendus ailleurs qu’à la marche, alors que pour les précédents rassemblements, ils avaient marqué leur présence, cela sans hésiter une seconde.

«J’ai participé à la manifestation à Port-Louis et Mahébourg l’année dernière mais cette fois je n’ai pas voulu y aller car je ne me sentais pas à l’aise de répondre à l’appel de politiciens qui eux-mêmes, n’ont pas été à la hauteur lorsqu’ils étaient au pouvoir», explique Rajen, jeune entrepreneur de 25 ans.

Lorna, une mère de 33 ans, abonde dans le même sens. Cette jeune femme avait participé à toutes les précédentes marches. Très ancrée dans le social, elle explique qu’elle n’était pas présente le 13 février pour ne pas «être hypocrite». «Que l’on ne se méprenne pas. Je suis parmi les premières à vouloir que le gouvernement du MSM bour deor. Mais je ne veux pas être hypocrite en marchant avec d’autres personnes qui eux aussi ont menti et fait pleurer la population à un moment. Beaucoup m’ont encouragée à y aller pour le pays et de ne pas considérer les leaders politiques qui seraient présents, mais je n’ai pas voulu.»

En effet, beaucoup de Mauriciens ayant participé au rassemblement affirment qu’ils ont marché pour leur pay-set non pour les leaders de l’opposition. Toutefois, quelques personnes présentes disent ne pas avoir apprécié certains déroulements. À l’instar de Shaama. La jeune femme a déploré le fait que certains des politiciens qui sont venus n’ont pas vraiment marché comme des citoyens : «Ils sont venus avec leurs gardes du corps, qui n’ont pas hésité à bousculer les gens dans la foule. Il y a même un enfant qui est tombé à la suite des bousculades de ses gros bras. Je n’ai vraiment pas apprécié cela.»

Quoi qu’il en soit et malgré les différentes raisons pour lesquelles nos interlocuteurs n’ont pas participé à la marche, ils reconnaissent l’importance de se battre pour son pays, «même si nous ne partageons pas les mêmes idéaux. Il faut rester uni».