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State Trading Corporation: négoce entre proches

14 février 2021, 15:30

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State Trading Corporation: négoce entre proches

La State Trading Corporation (STC) reste sous le feu des projecteurs. Cette semaine, les travaux de l’enquête judiciaire sur la mort de Soopramanien Kistnen, en cour de Moka, ont fait émerger des informations accablantes sur des contrats valant plusieurs millions de roupies octroyés notamment par l’organisme gouvernemental pendant le confinement. Même le nouveau ministre du Commerce ne s’en est pas privé pour annoncer un état des lieux à la STC d’ici lundi. Cela, avec la bénédiction du chef du gouvernement.

Des sanctions vont tomber à la STC. C’est ce qu’a déclaré le ministre du Commerce, Soodesh Callichurn, lors de sa première conférence de presse à la tête de ce nouveau portefeuille. «Dès ce lundi», le ministre, qui conserve également son maroquin ministériel au Travail, compte faire un état des lieux. «J’agirai en toute transparence car il n’y aura pas de ‘cover-up’. La population a le devoir de connaître la vérité sur cette affaire.» Pour lui, le plus important est de mettre de l’ordre. «Si nous devons prendre des sanctions, nous les prendrons. Toutes les sanctions seront prises en consultation avec le Premier ministre. Il m’a donné sa bénédiction pour y mettre de l’ordre.»

Pourquoi cet intérêt soudain du gouvernement? En cour, le 4 février, Krishnamurthy Ragaven, responsable de l’administration à la STC, a déclaré que le choix des sociétés pour la fourniture d’équipements médicaux durant le confinement a été fait par le ministère du Commerce, et non par la STC. Il précise que du 2 au 6 avril 2020, la compagnie Bo Digital a obtenu des contrats à hauteur de Rs 308 millions pour des équipements médicaux. Il est allé jusqu’à concéder que la STC n’a pas cherché à vérifier si cette société s’y connaissait dans le domaine médical vu que les instructions venaient du ministère du Commerce. «La STC n’est qu’un agent payeur qui est remboursé par la suite.»

Une autre confirmation en cour de Moka concerne le lien familial entre Vinay Appanna de Bo Digital et AV Technoworld et le directeur général de la STC, Jonathan Ramasamy. Ce dernier est marié à la sœur de Vinay Appanna.

Par ailleurs, les auditions d’Ashvind Poonyth, secrétaire des sociétés Bo Digital, AV Digital World et BCA Consulting, ont mis en lumière d’autres contrats directs obtenus par Vinay Appanna pour des services publicitaires. En l’occurrence, ceux de Mauritius Telecom (MT), de ministères et de la National Transport Corporation (Rs 30 millions par an). Appanna avait aussi été sollicité pour aménager gratuitement des abribus à condition que le gouvernement utilise les espaces publicitaires.

On en sait un peu plus sur le contrat alloué par la STC à l’hôtesse de l’air femme d’affaires Neeta Nuckchhed. Cette amie d’enfance de l’ancien ministre Yogida Sawmynaden, s’est vu confier le nettoyage et la désinfection de la STC. Sans expérience aucune dans le domaine, sa société a été enregistrée le 21 avril 2020.

Sollicité hier pour une réaction, le directeur général de la STC, Jonathan Ramasamy, nous a référé à son avocat, Me Ravi Rutnah. Ce dernier n’a pas répondu à nos sollicitations.

Aruna Radhakeesoon: «Si un directeur se retrouve dans une situation de conflit, il devrait ‘step down’»

Aruna Radhakeesoon, présidente du National Committee on Corporate Governance.

Aruna Radhakeesoon est la présidente du National Committee on Corporate Governance (NCCG). Cette semaine, elle a présidé le premier atelier de la Corporate Governance Scorecard for Mauritius (CGSM). Interrogée sur les révélations concernant la STC, elle réplique qu’en règle générale, dans de telles circonstances, un directeur d’entreprise devrait ‘step down’ en attendant l’issue de l’enquête initiée.

La Corporate Governance Scorecard for Mauritius a été lancée cette semaine. Quel est justement le but recherché?

La Corporate Governance Scorecard for Mauritius permettra aux entreprises et aux institutions publiques d’évaluer leur niveau d’adhérence aux pratiques de bonne gouvernance. Il faut savoir que cet outil a été développé en partenariat avec une équipe d’analystes du département Finance et comptabilité de l’Université de Maurice.

La bonne gouvernance se résume à quoi, selon vous ?

Dans la loi, il y a des organes pour faire fonctionner une société. Il y a des parties prenantes telles que les actionnaires, le conseil d’administration, et puis, il y a le corps des employés qui inclut le CEO, la direction et tous les employés. Tout cela se fait dans un écosystème où il y a des stakeholders, tels que les régulateurs, le marché, le gouvernement entre autres. Ce sont les interactions de tous les stakeholders avec les organes à l’intérieur de la compagnie qui la fait marcher.

Comment réagissez-vous au fait qu’un directeur général et un conseil d’administration comme la STC qui seraient impliqués dans une enquête judiciaire, soient toujours en poste et faire comme si de rien n’était?

Je ne connais pas tous les détails de l’affaire Kistnen et la STC. Je ne veux pas me prononcer sur quelque chose où je n’ai pas tous les faits. Mais il est clair que l’on ne peut pas mettre à l’écart un board parce que si c’est le cas, la compagnie ne peut pas fonctionner. Il est vrai qu’il y a le senior management, mais il y a des comptes à rendre au board. Et il me semble qu’il y a des doutes qui persistent sur les directeurs de ce board, et suivant le texte de loi, si un directeur est sujet à un quelconque conflit, il devrait « stepdown ». Se mettre à l’écart pour permettre à ce que l’enquête puisse se dérouler correctement.

Au sein du National Committee on Corporate Governance, est-ce que vous pouvez prendre des sanctions contre des écarts de pratique?

Le NCCG n’est pas un régulateur. Nous avons été constitués par la Financial Reporting Act sous le ministère de la Bonne gouvernance. Nous sommes davantage un policy-making qu’un régulateur. Nous conseillons le ministre sur les sujets de bonne gouvernance et aussi sur comment remédier aux lacunes.