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[Portrait]: Neeta Nuckchhed, l'hôtesse de l’air businesswoman bénéficiaire du contrat convoité par Kistnen

10 février 2021, 12:30

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[Portrait]: Neeta Nuckchhed, l'hôtesse de l’air businesswoman bénéficiaire du contrat convoité par Kistnen

Neeta Nuckchhed, employée comme hôtesse de l’air chez Air Mauritius, est l'amie d'enfance de Yogida Sawmynaden. Les conditions dans lesquelles elle a raflé un contrat de la STC au nez et à la barbe de Soopramanien Kistnen surprennent.

C’est d'ailleurs une des histoires qui avait mis Soopramanien Kistnen hors de lui : Yogida Sawmynaden lui avait promis, entre autres, de lui faire avoir le contrat de nettoyage et de désinfection des entrepôts de la State Trading Corporation mais c’est cette proche du ministre qui l’a eu. Une manne tombée du ciel grâce au Covid-19 car la situation d’urgence permettait d’avoir recours à l’Emergency Procurement Procedure. Il n’y avait que deux soumissionnaires pour ce contrat, soit Final Cleaning de Kistnen et Neeteeselect de Neeta Nuckchhed, et c’est cette dernière qui l’a remporté, grâce au prix gonflé artificiellement de Final Cleaning.

Mardi 9 février, Neeta Nuckchhed a été pressée de questions par l’avocat du bureau du Directeur des poursuites publiques (DPP), Me Azam Neerooa, sur son expérience du secteur de nettoyage, hier au tribunal de Moka. C’est ainsi que l’on a appris que l’hôtesse de l’air est devenue directrice d’une compagnie d’import/ export alors que l’administrateur d’Air Mauritius n’avait pas encore autorisé les membres du personnel à chercher du travail supplémentaire à la suite des congés forcés. «C’est en prévision du Redundancy Plan que je me suis lancée dans le business», explique-t-elle, sans rire. Elle admet qu’elle n’a pas reçu l’autorisation de sa direction pour s’engager dans le business. Elle détient un diplôme en ressources humaines et reconnaît n’avoir aucune qualification, ni expérience en nettoyage et désinfection. Et encore moins en décontamination sous le Covid-19. «Mais personne n’a cette expérience à Maurice», s’est-elle défendue lors de l’enquête judiciaire sur le décès de l’activiste Soopramanien Kistnen.

«Il faut voir avec M. ou Mme Poonyth»

Les réponses de Neeta Nuckchhed aux interrogations de Me Azam Neerooa démontrent que l’hôtesse de l’air ne s’occupait de rien et n’était même pas au courant de la façon dont fonctionnait son entreprise. Lorsqu’on lui a demandé le montant du capital et d’autres détails concernant l’entreprise, elle répondra invariablement : «Il faut voir avec M. ou Mme Poonyth.» Elle ne savait même pas le nom de tous les produits qu’elle utilisait. À un certain moment, Me Neerooa lui dira : «Mais vous ne faites rien dans la compagnie ! Qu’est-ce que vous faites, au juste ?» Réponse : «J’ai préparé le Business Plan et j’ai appris à propos de la désinfection en faisant des recherches.» On apprendra aussi que Neeteeselect n’a aucun autre employé, à part Mme Poonyth et Neeta Nuckchhed, pour la bonne et simple raison qu’elle sous-traite les travaux à d’autres personnes. «Vous avez sous-traité à Soopramanien Kistnen ?» lui demandera Me Neerooa. «Non, c’est un certain K. N. qui l’a eu.»

Deux contrats entre avril et septembre

Neeteeselect a bénéficié du contrat de la STC rien qu’un mois après la création de sa compagnie. Jusqu’en septembre, quand elle renonce à son poste de directrice dans la compagnie, elle ne remporte qu’un autre contrat auprès d'une entreprise privée. C’est l’occasion pour Me Neerooa de lui rappeler que le bâtiment de cette enseigne à Bambous appartient à Yogida Sawmynaden. Bref, une compagnie créée manifestement pour décrocher des contrats de la STC et de cette enseigne sous le Covid-19.

«Je ne parlais à Yogida Sawmynaden que deux à trois fois la semaine… »

Neeta Nuckchhed a aussi expliqué sans convaincre que si Neeteeselect a été parmi les rares et chanceuses compagnies approchées par la STC, c’est parce qu’elle avait adressé une offre précédemment à l’institution. Elle affirme aussi la main sur le cœur qu’elle ne connaît personne à la STC et qu’elle ne savait même pas que cette dernière tombait sous le ministère du Commerce de Yogida Sawmynaden. Si elle reconnaît avoir souvent bavardé avec le ministre, elle jure que jamais le sujet ne concernait ce contrat. Les contacts, dit-elle, ne furent que par téléphone. Cependant, elle a refusé que la cour consulte ses relevés téléphoniques. «Je ne lui parlais que deux à trois fois par semaine mais jamais de la STC.» Neeta Nuckchhed a précisé être une amie d’enfance de Yogida Sawmynaden, «not a good friend», et qu’ils étaient voisins.

«Mo pas konn sa misié Kistnen-la»

Concernant Kistnen, Neeta Nuckchhed reconnaît, sur l’insistance de Me Neerooa, qu’elle le connaissait pour l’avoir rencontré une ou deux fois. Et quand l’avocat du DPP la confronte à sa déclaration faite à la police où elle a affirmé : «Mo pa konn sa misié Kistnen-la», elle dit que c’est sans doute un oubli. À Roshi Bhadain qui a été plutôt tendre envers elle, l’hôtesse de l’air explique que quand elle a dit oui, le policier Norbert Manoovalloo lui avait fait comprendre par un signe que ce n’était pas la bonne réponse. Et c’est pour cela qu’elle aurait «menti» en disant à la police qu’elle ne connaissait pas Kistnen.

Son avocat se retire en pleins travaux

Et lorsqu’elle a pris à témoin de cet incident un de ses avocats, Me Kreshen Luximon, celui-ci s’est levé sur le champ en déclarant qu’il se retirait non seulement de la salle mais aussi de l’affaire.