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Transferts de fonds: et si la diaspora contribuait à la relance économique ?

5 janvier 2021, 20:45

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Transferts de fonds: et si la diaspora contribuait à la relance économique ?

La hausse de la rentrée de fonds d’expatriés mauriciens en une année est une assez bonne nouvelle. Elle pourrait inspirer une stratégie pour accroître l’apport financier de la diaspora dans le développement du pays.

Rs 847 millions. C’est le montant des transferts de fonds vers Maurice (inward remittances) des Mauriciens habitant ou travaillant à l’étranger au troisième trimestre 2020 contre Rs 671 millions pour le troisième trimestre 2019, selon les chiffres de la Banque de Maurice (BoM). Même s’il ne faut pas négliger l’impact de la dépréciation de la roupie sur la valeur de ces transferts, en pleine récession économique, toute entrée d’argent dans le circuit monétaire local est bienvenue. Toutefois, une question se pose : l’argent rapatrié par la diaspora à Maurice peut-il contribuer à la relance économique ? Le débat est ouvert.

«Les inward remittances sont une contribution certes, mais ils ne sont pas suffisamment significatifs pour avoir un impact conséquent sur la relance économique. Il faut comprendre que nous ne pouvons pas comparer le flux des transferts de fonds de la diaspora mauricienne vers le pays aux transferts massifs des travailleurs migrants dans des pays comme le Bangladesh ou l’Inde», explique l’économiste Rajeev Hasnah. Selon lui, pour ces pays ayant une grande population, la main-d’œuvre est une ressource, une ressource exportée pour travailler à l’étranger et ensuite renvoyer l’argent dans leur pays à leurs familles.

«À Maurice, nous n’avons pas cette masse de population ; au contraire, c’est nous qui accueillons des travailleurs étrangers dans divers secteurs. On ne peut donc pas se comparer à ces pays et s’attendre à ce que les transferts de fonds deviennent un gros pourcentage de la contribution au PIB ou à l’économie», dit-il. D’ajouter toutefois : «Maurice a quand même su développer ce créneau surtout à travers le global business. Il faut donc le préserver.»

Il faut souligner que, pour le premier trimestre de 2020, le pays a reçu Rs 738 millions en transferts de fonds et Rs 591 millions pour le deuxième trimestre. Le premier pays émetteur reste la France à hauteur de 28,4 % pour le troisième trimestre 2020. «Les transferts de fonds de la diaspora mauricienne ont contribué à soutenir l’économie dans la mesure où ces transferts de fonds représentent une source supplémentaire de revenus pour les familles mauriciennes, surtout face aux répercussions de la pandémie», dit-on à la BoM.

En effet, les transferts de fonds du troisième trimestre 2020 à hauteur de Rs 847 millions représentent une hausse de 28,4 % par rapport aux flux entrant dans le pays pour la même période en 2019. «En termes de pourcentage du PIB, les transferts de fonds ont augmenté pour atteindre 0,79 %. Les Mauriciens en France et au Royaume-Uni ont envoyé plus d’argent dans le pays au cours du troisième trimestre 2020, soit Rs 241 millions et Rs 122 millions respectivement.»

Cependant, nous pouvons difficilement nous comparer aux pays qui exportent leur main-d’œuvre, à l’instar du Bangladesh. «Bangladesh received $922.10 million as remittance in just 10 days from September 1-10, which is almost double compared to the corresponding period in last year 2019», peut-on lire dans un article du Dhaka Tribune de septembre 2020.

Si Maurice est un petit joueur dans ce créneau face à ces pays ayant de grandes populations, cela ne veut pas dire que nous ne pouvons pas accroître le montant de ces transferts de fonds à travers des initiatives pour encourager la diaspora à envoyer plus ou à investir dans le pays. «Les transferts de fond de la diaspora ne sont peut-être pas massifs mais ils sont conséquents. Il nous faut une stratégie spécifique visant la diaspora pour capter ces fonds des Mauriciens qui sont à l’étranger. Nous parlons souvent de flux des investissements directs étrangers (IDE), mais nous ne parlons pas des IDE en provenance de la diaspora. Il faut commencer par un recensement aussi précis que possible des Mauriciens partout dans le monde», dit Kevin Teeroovengadum, économiste et également Mauricien vivant à l’étranger.

Une idée serait en effet de créer une petite unité dédiée à ces recherches dans les ambassades mauriciennes à l’étranger. «Pour la diaspora habitant dans les pays développés surtout, il y a plusieurs initiatives à être lancées ici pour les amener à rapatrier leur argent, à l’instar de diaspora bonds pour les Mauriciens se trouvant à l’étranger. Pour les Mauriciens à la retraite, il faudrait des plans immobiliers, par exemple, pour les encourager à habiter à Maurice sur le long terme; des rabais sur les billets d’avion ou pas de taxe à payer sur les loyers, entre autres. Il y a plusieurs plans à mettre en place pour encourager la diaspora à investir leur argent dans leur pays natal.»

Dans cet effort, le secteur privé n’est pas en reste et devrait aussi concentrer ses exercices de marketing vers la diaspora. «Les hôtels peuvent aussi avoir des offres destinées à la diaspora pour les encourager à venir ici pour travailler à distance ou pour de longues vacances pendant la pandémie mais aussi dans un esprit de solidarité», déclare Kevin Teeroovengadum. Il ressort que le gouvernement a mis en place les Mauritian Diaspora Scheme Regulations sous la loi sur la promotion des investissements en 2015.

L’objectif de ce programme est d’attirer la diaspora mauricienne à Maurice afin de participer au développement économique du pays, à travers un ensemble d’incitations et d’avantages. Ces avantages incluent des avantages fiscaux, des facilités d’investissement par le biais de plans de développement immobilier et le droit à la résidence permanente pour les non-citoyens. L’université de Maurice a organisé en 2018 une conférence impliquant une trentaine d’universitaires mauriciens de la diaspora pour partager leurs connaissances sur différents sujets d’intérêt, tels que l’intelligence artificielle, la robotique, la médecine, les sciences sociales et humaines, entre autres.