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Vinay Sobrun: «Il y a une soif de renouveau politique»

20 novembre 2020, 11:57

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Vinay Sobrun: «Il y a une soif de renouveau politique»

Ces villageoises suscitent un engouement particulier. Comment expliquez-vous cela ? 
La mobilisation générée par les villageoises est particulièrement plus marquée chez les jeunes. La gestion déplorable des affaires de l’État, les inégalités généralisées, l’escalade de la fraude et de la corruption, ainsi que d’autres pratiques répréhensibles font que les jeunes se sentent de plus en plus interpellés et prêts à s’engager, à agir et à se faire entendre comme en témoigne leur participation aux récentes marches citoyennes. Ainsi, ils voient en un conseil de village ou de district une plate-forme pour s’exprimer, assainir le climat et participer au développement de leur village. Quant à savoir s’ils parviendront à leur fin, c'est là une autre question ! D’autre part, la rémunération des élus des collectivités locales à partir de 2012 est sans doute un autre facteur qui a stimulé cet engouement. 

Ces élections reflètent-elles une soif de renouveau politique ?
Une soif de renouvellement politique est très palpable dans la population. Mais aucun renouvellement politique ne peut intervenir sans le changement du système politique. Une métamorphose fondamentale de celui-ci s’impose d’abord. Il ne suffit pas de changer les hommes pour changer les pratiques. Idem pour les administrations régionales. À partir du 22 novembre, nombreuses seront les nouvelles têtes qui prendront la barre des conseils de village et de district. Mais la loi cadre, le système et l’administration resteront inchangés. Donc, du vin nouveau dans de vieux tonneaux ! 

Les futurs conseillers disposent-ils des moyens pour réaliser les projets ambitieux qu’ils préconisent dans leur manifeste électoral ? 
Comme à chaque élection, les futurs conseillers, dans l’ignorance des faits, promettent des projets les uns plus ambitieux que les autres. Mais, un conseil de village ou de district ne génère pas son propre budget et, par conséquent, ne dispose pas de fonds de capital pour financer ses projets capitaux. Il tire ses fonds du gouvernement central, mais quelque 80% de ceux-ci sont absorbés par les salaires et les dépenses de fonctionnement. Les fonds restants sont à peine suffisants pour les travaux d’entretien. Donc, le manque de fonds est le principal handicap des collectivités locales et ce n’est qu’une fois élus que les conseillers se rendent compte que la situation est bien moins reluisante qu’elle ne semblait. 

Le reflexe communal qui se manifeste lors des élections générales est-il présent lors des élections villageoises ?
Le facteur communal est malheureusement un élément constant dans les élections à Maurice, qu’elles soient générales ou villageoises. Et ce n’est pas demain la veille qu’on se débarrassera de ce mal odieux. Le communalisme, le ‘castéisme’ et le ‘noubanisme’ perdureront aussi longtemps que le système électoral actuel perpétuera.  

Nous sentons la présence des partis traditionnels à ces élections même s’ils insistent qu’ils ne s’y mêlent pas. D’aucuns parlent même d’une bataille entre le MSM et le PTr. Votre opinion ?  
Les partis traditionnels ne participent pas «directement» à ces élections dans la mesure où ils n’accordent pas leur couleur et symbole aux groupes en lice. Mais, il convient de reconnaître que les candidats aux villageoises sont pour la plupart des sympathisants fervents et actifs des partis traditionnels, ce qui conforte cette perception de politisation de ces élections. Dans l’état actuel des choses, il ne serait pas judicieux de leur part de s’y ingérer, car généralement dans les villages ces élections sont marquées par la participation de plusieurs groupes composés de candidats d’allégeances politiques différentes.  Quant à la perception de joute entre le MSM et le PTr, tout découle de la stratégie du gouvernement MSM de déclarer ces élections à un moment où l’on s’y attendait le moins. Il est clair que le MSM voulait prendre au dépourvu le PTr, son principal adversaire dans les régions rurales. D’où cette perception de bataille entre le MSM et le PTr. D’ailleurs, certains ministres, PPS et députés sont ouvertement à pied d’œuvre pour soutenir leurs poulains à ces élections. Ce n’est certainement pas Alan Ganoo qui nous dira le contraire !