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Athlétisme: Zango, un thésard chez les triple sauteurs

10 septembre 2020, 15:21

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Athlétisme: Zango, un thésard chez les triple sauteurs

 

Mener une carrière sportive de tout premier plan tout en suivant de hautes études universitaires n'est pas donné à tout le monde. C'est pourtant l'exploit que réussit le Burkinabé Hugues-Fabrice Zango, l'un des cadors mondiaux du triple saut et thésard en génie électrique.

Le sociétaire de l'Artois Athlétisme (27 ans), qui s'aligne samedi aux Championnats de France à Albi, est un cas à part. Sur le papier, jongler entre une activité de recherche et l'entraînement semble être une gageure. Pas pour le natif de Koudougou, habitué aux journées à rallonge et à combiner deux activités à première vue totalement dissemblables.

Du lundi à vendredi, de 8h à 16h30, Zango officie à Béthune au laboratoire «Systèmes Electrotechniques et Environnement» de l'université. A partir de 18h, il enfile sa casquette de triple sauteur pour des séances physiques. Le week-end, place au travail technique à l'Insep (Institut national du sport, de l'expertise et de la performance). Un menu chargé mais payant pour le Burkinabé, médaillé de bronze aux Mondiaux de Doha en 2019 derrière les deux références actuelles de la discipline, les Américains Christian Taylor et Will Claye.  

«J'ai eu le soutien de mes professeurs pour avoir un emploi du temps aménagé. Il y a des périodes durant lesquelles je suis plus actif au labo et d'autres où je peux me consacrer plus à mon sport», explique-t-il à l'AFP. 

Coaché par Tamgho 

De fait, Zango, repéré tardivement à 18 ans dans son pays et arrivé en France en 2015 avec un visa d'étudiant pour «s'ouvrir la porte du haut niveau», ne laisse rien au hasard et s'est particulièrement bien entouré pour assouvir son ambition et "son grand rêve": "amener le triple saut sur une autre planète."

Celui qui avoue être venu à l'athlétisme "par hasard" a ainsi intégré la structure de Teddy Tamgho en juillet 2018 et les résultats s'enchaînent depuis: après un record d'Afrique en salle en janvier 2018 (17,23 m) et une 6e place aux Championnats du monde en salle, il décolle à partir de 2019 avec la 3e place aux Mondiaux de Doha (17,66 m) suivi d'un nouveau record d'Afrique lors du meeting de Paris indoor en janvier 2020 (17,77 m).

Mais son cursus universitaire et sa thèse, intitulée "Machine électrique performante à rotor externe et convertisseur intégré pour application en environnement sévère", restent le fil rouge de son parcours.

«J'aime la recherche, je suis assez curieux. J'ai une soif de connaissance et je ne pouvais pas lâcher les études. Les études sans le sport, ça ne va pas, il y aurait une partie de moi qui manquerait. L'un me permet d'échapper au stress de l'autre, j'ai trouvé un certain équilibre», indique-t-il. 

 'En quête de perfection' 

Ce qui a frappé d'emblée Tamgho chez son poulain? "Sa discipline et sa détermination".

«Le fait d'avoir suivi de études lui permet d'intellectualiser l'entraînement, d'avoir une compréhension plus fine et une vision plus précise de son art. C'est un boulimique de travail, toujours à 200%, et un scientifique, il faut savoir parler sa langue», détaille le champion du monde 2013 du triple saut.  

Catarina Lopes, la psychologue du groupe dirigé par Teddy Tamgho, loue de son côté un athlète "en quête perpétuelle de perfection".

«Il a une facilité d'acquisition et il essaye de comprendre les exercices que l'on met en place, il n'est pas un simple exécutant», déclare-t-elle.

Le travail mental effectué depuis deux ans a en tout cas déjà porté ses fruits puisque Zango est parvenu à s'arracher au dernier essai pour monter sur le podium des Championnats du monde en 2019.

«Avec la psy, on prépare l'esprit guerrier, la concentration, affirme Zango. Je fais par exemple de l'auto-hypnose. Au début j'avais trop envie de prouver mais maintenant je suis relax. Ces techniques de relaxation et de concentration, je les ai appliquées à la lettre à Doha pour décrocher la médaille.»

Jusqu'où peut-il désormais aller? Si le record du monde mythique de Jonathan Edwards (18,29 m en 1995) est hors de portée, le Burkinabé ne jure que par les JO de Tokyo, reportés en 2021.

«Je suis déjà à la table des meilleurs, il faut maintenant être le meilleur. C'est l'étape d'après», clame-t-il.