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Tennis: pour le jardinier de Wimbledon, l’herbe sera plus verte en 2021

30 juin 2020, 18:43

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Tennis: pour le jardinier de Wimbledon, l’herbe sera plus verte en 2021

 

En temps normal, Neil Stubley devrait être en train d’observer anxieusement son gazon: mais non, c’est avec mélancolie et un «étrange sentiment de calme» que le jardinier en chef de Wimbledon contemple ses courts bien verts laissés au repos pour cause de coronavirus.

Face à la pandémie de Covid-19, et alors que l’US Open et Roland-Garros sont pour l’heure maintenus, les organisateurs de Wimbledon, protégés par une assurance, ont très vite décidé d’annuler le tournoi londonien. Une première depuis la Seconde Guerre mondiale.

Et Neil Stubley trouve aujourd’hui surréaliste de parcourir le club et de voir ses 38 «bébés», comme il appelle les courts du All England club, sans vie.

«Beaucoup de sang, de sueur et de larmes ont coulé pour les mettre en valeur», souligne-t-il lors d’une conférence de presse en ligne.

Alors l’atmosphère fantomatique qui règne dans le club en lieu et place de l’effervescence feutrée du tournoi du Grand Chelem lui rappelle celle qui suit d’ordinaire la fin de la compétition, lorsque joueurs et public sont rentrés chez eux.

«Je comparerais cela au fait d’être allé à un concert: vous avez ce sifflement qui reste dans vos oreilles pendant plusieurs jours», tente d’expliquer celui dont le titre officiel est Chef des courts et de l’horticulture de Wimbledon.

Fierté 

Stubley précise que ses 17 employés, ainsi que trois travailleurs temporaires - contre neuf habituellement en période de tournoi -, continuent leur travail malgré la déception de l’annulation.

«La fierté vous pousse à continuer le travail, souligne-t-il. Bien sûr, il est décevant de ne pas jouer, mais la situation dans son ensemble nous permet de remettre cela en perspective.»

«Bien que nous adorions notre travail, il doit se situer dans le monde réel», relève encore Stubley.

Et ce monde réel, c’est un monde où le Covid-19 a bouleversé les habitudes les plus ancrées, y compris dans le tennis où le circuit professionnel a été gelé en mars et ne doit reprendre officiellement qu’en août... sans être passé, donc, par le All England Club.

Aussi déçu soit-il, Stubley assure avoir soutenu la décision d’annuler l’édition 2020, bien que d’autres sports aient repris depuis. Pour lui, les difficultés d’organisation du tournoi dans ces circonstances sanitaires dépassent largement la fragilité de la surface de jeu.

«Les courts en gazon étaient en bon état avant l’annulation, assure-t-il. Ce sont les infrastructures qui prennent du temps à mettre en place. Il ne s’agit pas de dire qu’en deux semaines, nous pourrions jouer dessus», détaille-t-il.

«Il faut huit à dix semaines pour être prêt. Début avril, au beau milieu de la pandémie (quand a été prise la décision d’annuler le tournoi prévu du 29 juin au 12 juillet, ndlr), ce délai était intenable. Encore maintenant, avec les restrictions en place, il serait impossible de les tenir».

Pour autant, son équipe va continuer sa routine habituelle et se concentrer sur la saison prochaine.

Arracher les courts

«J’essaie toujours d’aller voir les gens et de leur dire qu’on ne +répare+ pas les courts, on les +prépare+ pour la saison prochaine», raconte Stubley.

«A partir d’août, début septembre, le processus sera le même: arracher les courts, les réensemencer, laisser pousser tout l’automne et l’hiver, puis faire le même travail préparatoire pour le tournoi 2021.»

Cette 134e édition de Wimbledon a été reprogrammée du 28 juin au 11 juillet 2021. Nul doute qu’elle restera dans la mémoire de Stubley, mais pas au même titre que celle de 2013 qui avait vu le sacre d’Andy Murray, premier Britannique a remporter le tournoi masculin depuis Fred Perry en 1936.

«Être sur le court central lors de cette victoire, c’était un de ces moments où les poils dans votre nuque se dressent», décrit le jardinier. Malgré l’émotion, par déformation professionnelle, «je regardais les pieds de Murray», se souvient-il.

«Je regarde toujours comment les courts réagissent et ce n’est que quand j’ai levé les yeux et vu qu’il avait jeté sa raquette que j’ai réalisé qu’il avait remporté la balle de match et le titre», raconte-t-il.

Il devra attendre un an encore avant de voir les regards de toute la planète tennis à nouveau rivés sur SON gazon.