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Les avocats de Rachna Seenauth contestent la légalité du mémo émis par la police

23 avril 2020, 21:45

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Les avocats de Rachna Seenauth contestent la légalité du mémo émis par la police

«Ce n’est pas à police de décider au cas par cas avant de remettre un mémo. Cela va à l’encontre de la Constitution.» Verbalisés pour «breach of curfew order», Mes Rouben Mooroongapillay et Lovena Sowkhee, avocats de Rachna Seenauth, se tournent vers la justice. Sanjeev Teeluckdharry, l’homme de loi de Jameel Peerally, s’est aussi joint à eux.

«Illégal.» C’est ainsi que Mes Rouben Mooroongapillay, Lovena Sowkhee et Sanjeev Teeluckdharry qualifient le mémo de la police, qui leur a été octroyé, pour pouvoir assister leurs clients respectifs, Rachna Seenauth et Jameel Peerally. Les avocats, verbalisés pour «breach of curfew order» le 16 avril, ne comptent pas rester les bras croisés. Alors que Me Rouben Mooroongapillay envisage d’intenter «une private prosecution» pour abus d’autorité contre l’officier qui l’a verbalisé, Me Lovena Sowkhee a juré un affidavit en ce sens, hier.

«On nous a montré, à moi et à Me Lovena Sowkhee, deux documents officiels. L’un du Mauritius Bar Council et l’autre du commissaire de police. L’explication du mémo avant que nous puissions assister notre client se lit comme suit : "Concerned In-Charge Police Station Unit would be required to confirm the necessity to record such statement. Request of this nature would be considered on a case-to-case basis"», avance Me Rouben Mooroongapillay.

Il souligne que «l’officier en charge de l’enquête à la Cybercrime Unit aurait dû nous remettre ce mémo, mais cela n’a pas été le cas. Je conteste sa légalité. Nous verbaliser est considéré comme un acte d’intimidation envers ceux de la profession légale qui ont prêté serment.» Me Rouben Mooroongapillay estime que Rachna Seenauth n’aurait pas dû être privée de ses droits constitutionnels, même en période de couvre-feu. «Ce n’est pas à la police de décider au cas par cas avant de remettre un mémo. Cela va à l’encontre de la Constitution. C’est aberrant que ma cliente ait été placée à l’unité de la SSU pendant plusieurs heures, pendant que je suis resté sans aucune nouvelles d’elle malgré plusieurs appels.»

L'avocat dit être en consultation avec des seniors de sa profession et envisage d’intenter «une private prosecution» pour abus d’autorité contre l’officier qui l’a verbalisé. Contacté pour une déclaration, Me Gavin Glover, dont les services ont été sollicités pour représenter ce dernier, n’a pas souhaité faire de commentaires car il va comparaître dans cette affaire.

Quant à Me Lovena Sowkhee, elle a juré un affidavit, hier. Elle intente une action en Cour suprême contre le commissaire de police, indiquant que ce mémo est illégal. Elle demande aussi un laissez-passer et non pas un work access permit. Elle n’est pas d’accord, en tant qu’avocate, de produire un mémo pour représenter son client. Car le «right to counsel» se trouve à l’article 5, «Protection of right to personal liberty», et à l’article 10, «Provisions to secure protection of law» de la Constitution. Elle a retenu les services de l’avoué Me Pazany Thandarayan et l’avocat Me Nawaz Dookhee.

Me Sanjeev Teeluckdharry explique,  pour sa part, qu’un couvre-feu a été instauré par un décret du ministère de la Santé, le 20 mars, sous les Regulations 14 du Prevention and Mitigation of Infectious Disease Coronavirus-GN No 58 de 2020 – règlement fait en vertu de l’article 79 de la Public Health Act 1925. Il ajoute que la Police Act 1974, à l’article 25, donne des pouvoirs discrétionnaires au commissaire de la police et au ministre de l’Intérieur pour émettre des décrets afin de maintenir l’ordre public sans avoir à les déposer à l’Assemblée nationale.

Par contre, Me Sanjeev Teeluckdharry soutient qu’il y a une autre école de pensée : on ne peut, par voie de décrets ministériels uniquement, restreindre le droit à la liberté et la liberté de mouvement de l’individu. «Ce sont des droits constitutionnels garantis au Chapitre 2 de la Constitution. La Constitution étant la loi suprême du pays, tout acte qui contrevient à celle-ci peut être déclaré nul et non avenu.» Il ajoute que l’individu a le droit d’être représenté par un avocat est un droit constitutionnel. «L’avocat a une obligation de représenter son client à travers la Law and Practi- cioners Act. Il a le devoir d’offrir ses services. À travers un règlement, on ne peut empêcher un avocat de faire son travail.»