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Urs Straub: «Il faut penser à des produits plus ergonomiques mais moins énergivores et plus recyclables»

6 mars 2020, 18:30

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Urs Straub: «Il faut penser à des produits plus ergonomiques mais moins énergivores et plus recyclables»

Demeurer 60 ans sur le marché mauricien requiert, entre autres facteurs, de l’endurance. Qu’est-ce qui est à la base de la place que vous occupez sur ce marché ? 
Nous pouvons parler sans crainte de succès. Il repose sur notre capacité à assurer une offre diversifiée. C’est un facteur qui nous a permis et qui nous permet encore de nous différencier en nous adressant à tous les segments du marché. Lafarge a toujours placé au cœur de sa proposition de valeur le consommateur et les bénéfices qu’il attend de nos produits. Les retours d’expérience positifs que nous recevons des consommateurs et des détaillants sont un gage de la qualité de nos produits et de notre niveau de service.

En quoi consiste cette gamme de produits diversifiés ? 
Ce sont Lakaz Mazik, Baobab 6 et Baobab haute performance. Baobab est, de notre point de vue, aujourd’hui, le ciment de référence nationale. Nous disposons de données qui nous permettent d’affirmer que Baobab est une marque qui jouit d’une grande notoriété auprès des revendeurs, des constructeurs, des maçons et des bricoleurs particuliers. Lakaz Mazik est un ciment d’utilisation générale indiqué pour toutes applications béton et mortier.

Baobab 6 est le dernier né de la gamme. C’est un ciment unique. Il est adapté à tous les travaux de maçonnerie. Ce produit offre une finition lisse et des caractéristiques améliorées, notamment des propriétés antifongiques et hydrofuges. Ces deux produits sont les déclinaisons de ciment mélangé à usage particulier. Notre ciment haute performance, Baobab, reste la référence pour les gros projets et les grandes structures.

Quelle posture adopter pour anticiper les besoins d’une clientèle qui, grâce à la technologie de l’information et de la communication, est en permanence exposée aux nouveautés ? 
Chez Lafarge, le concept d’innovation va bien plus loin qu’une question de mise en application industrielle et d’adaptation commerciale. L’innovation est l’indispensable levier de croissance. C’est elle qui nous permet d’anticiper et de répondre aux besoins de construction, de logement et de déplacement dans les prochaines décennies.

Aujourd’hui, les problématiques environnementales nous obligent à être encore plus attentifs dans notre processus de recherche et de développement. Demain, c’est déjà aujourd’hui. Il nous faut donc penser à des produits non seulement plus ergonomiques et esthétiques mais surtout moins énergivores et plus recyclables. L’innovation, pour Lafarge, c’est aussi être plus «local», plus près des clients pour pouvoir mieux les servir.

Comment les principes associés au concept de développement durable ont-ils été intégrés dans votre mode d’opération ? 
Le souci d’intégrer les valeurs de développement durable est un des fondements de notre stratégie. Notre posture consiste à nous assurer que nous déployons les ressources nécessaires pour faire avancer le concept de développement durable, pas seulement en interne, mais aussi au sein de l’industrie de la construction. Cela se fait, dans la mesure du possible, de concert avec d’autres acteurs pour une plus grande efficacité des actions. Cette politique s’appuie sur quatre grands axes. Il s’agit premièrement du climat et de l’énergie, deuxièmement de l’économie circulaire, troisièmement de l’environnement et enfin de bienfaisance communautaire.

En raison des traces indélébiles que l’utilisation du ciment laisse derrière elle, l’application de dispositions afin de réduire l’empreinte écologique est-elle envisageable au sein de cette industrie ? 
À Maurice, nous ne produisons pas de ciment. Nous le recevons par bateau et le distribuons en sacs ou en vrac. Il existe une tradition d’entreprise citoyenne foncièrement engagée dans la réduction du gaz à effet de serre. C’est une posture qui est inscrite à notre cœur de métier à l’échelle globale. Cela coule de source que nous héritions de cette tradition bien implantée au sein même de notre maison-mère. Le label de LafargeHolcim est l’un des plus efficaces au monde en matière d’émissions de carbone. Cette problématique mondiale, bien que nous y soyons extrêmement sensibles, ne touche pas notre activité locale.

Lorsque vous affirmez qu’à Maurice vous ne produisez pas de ciment, cela veut-il dire qu’en ce qui concerne votre prédisposition éventuelle à vous engager en faveur d’une empreinte de plus en plus écologique, vous ne faites que suivre les directives conçues sans égard à la spécificité locale ? 
Pas du tout. Ce qu’a réalisé notre station de mélange, la première à Maurice, constitue une petite révolution écologique dans le secteur. Nous sommes en mesure de mélanger du ciment de qualité supérieure à d’autres produits locaux recyclables. C’est ce qui nous permet de disposer d’une gamme de ciments mélangés à usage spécifique. L’emballage pour le ciment portant le label «Lakaz Mazik» se dissout dans la bétonnière. C’est une démarche qui, de surcroît, permet de mobiliser la conscience de l’utilisateur pour participer à une activité qui évite d’encombrer l’environnement de produits non-recyclables. Nous pouvons ainsi envisager une réduction de déchets sur les chantiers, de même que le contact direct de l’utilisateur avec le produit.

On ne saurait ignorer la contribution du ciment en général au phénomène d’accumulation d’eau. Cette problématique fait-elle partie de vos préoccupations ou, plutôt, de votre responsabilité environnementale ? 
C’est vrai que la réalisation de bénéfices est cruciale pour toute entreprise, mais pas à tout prix. Nous n’en faisons pas une obsession au point de négliger notre devoir envers l’environnement. Par exemple, le changement climatique étant pour nous un sujet de préoccupation, nous avons conçu un béton poreux, un produit unique à Maurice, qui prévient des problèmes d’accumulation d’eau en surface. Il est vendu sous le label Hydromedia. Grâce à l’apport d’une technologie de pointe, son utilisation permet à l’eau de pluie de rejoindre les nappes phréatiques. C’est un produit utile, notamment au niveau des surfaces de stationnement, des allées et les trottoirs. Ce qui contribue à réduire le risque d’inondation. Cette solution perméable allie propriétés du béton et technologie de drainage avancée.

Quels sont les défis majeurs qui ont jalonné votre parcours que vous avez dû relever pour tenir votre engagement au fil de ces 60 ans ? 
Les défis, il y en a eu. Cependant, celui qui nous a obligés à nous tenir toujours en éveil et sur nos gardes, c’est celui qui consiste à repérer au sein même de notre cœur de métier des relais de croissance susceptibles de pérenniser notre activité. D’où ce souci de toujours anticiper l’évolution, ce à quoi nous devons notre position de leader aujourd’hui. Nous avons, durant 60 années, accompagné Maurice et ses habitants dans leur quête de construire un territoire sûr, durable et connecté pour toutes les générations à venir. Cette riche aventure nous donne l’avantage certain de connaître les besoins du marché et d’avoir les moyens d’y répondre sans compromettre le projet d’ensemble.

Comme n’importe quel acteur de l’industrie de la construction, Lafarge a vécu des périodes peu reluisantes de son activité sous la dégradation du marché. Cependant, nous ne sommes pas du genre à se dire «quand le bâtiment ne va pas, rien ne va plus !». À Maurice, les mesures de soutien au marché ont toujours été une préoccupation des pouvoirs publics et la nôtre. La construction est un écosystème autour duquel gravitent d’importants piliers industriels et commerciaux, générateurs d’emplois et de produit intérieur brut (PIB). Les périodes creuses ont aussi cela de positif qu’elles nous offrent d’excellentes opportunités de revoir nos copies, de remettre à niveau nos ressources humaines et matérielles ainsi que nos procédures opérationnelles pour être encore plus en phase avec notre charte santé et sécurité. Nous faisons des défis du secteur une opportunité pour nous consacrer pleinement à un investissement optimal de notre outil et du développement de nos collaborateurs.

La construction durable fait-elle, elle aussi, partie de votre vocabulaire ? 
Pas seulement de notre vocabulaire, mais elle fait partie intégrante de nos activités au quotidien. Ce n’est nullement un concept nouveau pour nous. La construction durable est un facteur dans lequel notre groupe s’est toujours investi dans le cadre de son engagement social. À l’échelle internationale, le groupe LafargeHolcim a développé le modèle «Affordable Housing» dans 25 pays. L’idée est de permettre aux populations à faible revenu d’accéder au logement décent par le biais d’un programme de microfinancement, du support d’experts du logement et par une offre intégrée de solutions de construction.

À travers les LafargeHolcim Awards, un des concours les plus prestigieux au monde en matière de construction durable, nous récompensons aussi des projets architecturaux audacieux et novateurs, indépendamment des matériaux utilisés. Quand nous évoquons la question de la construction durable, elle est, à notre sens, fortement liée à l’esthétique. Nous avons pour cela lancé, grâce au support du centre de recherche du groupe LafargeHolcim en France, une gamme de bétons décoratifs, Artevia, destinée à apporter plus de chaleur et de charme, et contribuer à embellir davantage Maurice.