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Parlement: retour sur les discours de ces novices qui donnent de l’espoir

5 février 2020, 17:34

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Parlement: retour sur les discours de ces novices qui donnent de l’espoir

Ils sont novices comme députés mais ces parlementaires se sont démarqués lors de leur toute première intervention pour débattre du discours-programme à l’Assemblée nationale, lundi. Cela, que ce soit dans leur prise de parole, leur capacité de capter l’attention dans l’Hémicycle aussi bien que celle du spectateur télé et Web.

Fabrice David. Tout en sobriété et ouverture d’esprit

Le député du Parti travailliste Fabrice David est sans doute l’élu qui a fait la plus forte impression lors de son intervention. Des membres de la majorité, comme Dorine Chukowry, l’ont même applaudi. Un autre de ses adversaires aux élections générales, dans la circonscription n°1, Nilen Vencadasmy, l’a félicité sur Facebook. Prenant la parole peu après Tania Diolle, Fabrice David aurait pu consacrer une bonne partie de son intervention à répondre aux critiques de la députée ou encore rejeter catégoriquement le contenu du discours-programme, mais il ne l’a pas fait. Le fils de James Burty David était plutôt conciliant, avec même une certaine neutralité dans le ton.

S’exprimant tantôt en anglais tantôt en français, le député de l’opposition a rassuré ses adversaires, en affirmant qu’il n’avait pas l’intention de faire de la démagogie. À chaque fois qu’il a proposé une idée nouvelle ou noté des manquements dans des mesures du gouvernement, il a rappelé qu’il le faisait «par pragmatisme». À titre d’exemple, il s’est demandé comment le gouvernement financera les différents projets annoncés alors que la dette publique est de l’ordre de Rs 327 milliards.

Cependant, il n’a pas manqué d’encourager le gouvernement, en lui conseillant d’aller vers l’économie bleue. L’exploitation des fonds marins, croit-il, ferait du bien à notre économie. Fabrice David a aussi proposé que le gouvernement s’associe à de grandes firmes, pour le développement de la technologie de pointe. Le député n’a pas manqué d’avoir une pensée pour les démunis et les handicapés tout en faisant aussi un plaidoyer pour la protection de l’environnement.

Kalpana Koonjoo-Shah. Respect aux anciens et maîtrise des dossiers

Tout laisse croire que la ministre de l’Égalité du genre, Kalpana Koonjoo-Shah, députée du n°7, ne ferait pas l’objet de railleries comme c’était le cas avec son père, l’ancien ministre de la Pêche, Prem Koonjoo. Très à l’aise dans la langue de Shakespeare, elle a trouvé un moyen subtil de rendre hommage à ce dernier, tout en esquivant les critiques, en faisant l’éloge de trois anciens élus des élections de 1976 : Paul Bérenger, sir Anerood Jugnauth et Prem Koonjoo, qui étaient au Parlement avant la dissolution d’octobre dernier. De plus, elle n’a pas manqué de saluer la présence du leader du MMM dans l’Hémicycle, en invitant Paul Bérenger à partager son expérience avec les jeunes parlementaires.

N’empêche, elle s’est montrée critique à l’égard de l’opposition et a égratigné les membres de la minorité pour leur boycott du discours-programme, une attitude qu’elle qualifie de «défaitiste». Kalpana Koonjoo-Shah n’a pas perdu son sang-froid quand un membre de l’opposition a crié «requin», pour essayer de la déstabiliser, en référence aux déclarations de Prem Koonjoo, à l’époque où ce dernier était ministre de la Pêche. Poursuivant, la ministre a non seulement fait les éloges du gouvernement mais elle a aussi fait un bilan de son ministère. Elle a annoncé une série de mesures qui seront prises pour améliorer le sort de la femme et de l’enfant, tout comme pour le combat contre la violence conjugale. Un signe qu’elle maîtrise bien ses dossiers.

Karen Foo Kune. Clarté des idées et critiques constructives

Karen Foo Kune, députée du n°20 du MMM, a été l’autre élue de l’opposition qui a été applaudie par des membres du gouvernement. Son intervention, d’une durée de vingt-cinq minutes environ, était en français. La jeune députée n’est nullement tombée dans la démagogie. «Le discours-programme contient quelques bonnes idées, mais il manque de cohérence», a-t-elle noté. Cependant, elle ne s’est pas contentée de critiquer juste parce qu’il fallait critiquer. Elle a fait un plaidoyer pour que le gouvernement s’engage davantage dans le combat contre la drogue. Elle souhaite aussi plus de place pour les femmes dans la politique et qu’elles y soient respectées. La députée a aussi parlé de la méritocratie et du népotisme. Elle n’a pas caché son inquiétude face au réchauffement climatique. C’est probablement la clarté de ses idées qui lui a valu des félicitations des deux côtés de la Chambre.

Mahend Gungapersad. Le pédagogue droit dans ses bottes

Comme attendu, le pédagogue et ancien recteur qu’est Mahend Gungapersad, qui en est à son premier mandat de député, a choisi l’éducation comme thème principal de son «maiden speech». Mais, loin de lui l’idée «d’utiliser des mots désobligeants, comme ceux utilisés par Steven Obeegadoo contre la ministre de l’Éducation» a-t-il soutenu, en s’adressant au PPS Ismaël Rawoo. Au contraire, le député travailliste du no6 dit «respecter» Leela Devi Dookun-Luchoomun pour ce qu’elle a pu accomplir car «ce n’est pas facile d’être ministre de l’Éducation».

Ferme dans ses propos du début à la fin, le député rouge a sorti surtout des propositions concrètes de ses notes. Ce, après avoir fait une autopsie du secteur éducatif qui, rappelle-t-il, connait année après année un taux d’échec de 30 %, allant du Primary School Achievement Certificate au Higher School Certificate en passant par le School Certificate. Il propose notamment la révision du curriculum le plus tôt possible, de même que celle de la méthode d’enseignement. Il plaide ainsi pour l’introduction de la différenciation pédagogique, pour davantage d’autonomie offerte aux recteurs, de réunions plus régulières avec les parents, entre autres acteurs concernés, ainsi que la révision du nombre de zones d’éducation. Mahend Gungapersad encourage aussi une meilleure considération aux slow learners et demande à reconsidérer le système des cinq «credits» car il est persuadé qu’avec ou sans ce seuil minimum, l’on peut maintenir la qualité tout en s’assurant qu’aucun enfant ne soit laissé pour compte.

Hormis l’éducation, le député-pédagogue, tout en applaudissant le gouvernement dans son ambition d’améliorer la qualité de vie des citoyens, a fait un plaidoyer pour ses mandants, dont les habitants de Fond-du-Sac et de Camp-Carol, «ceux-là mêmes qui vivent dans la frayeur à chaque grosse pluie». Il s’est adressé à la majorité en ces termes : «Vous y étiez après avoir été élus. J’y étais avant d’être élu».

Par ailleurs, il a tenu à donner la réplique au PPS Ismaël Rawoo. Ce dernier, rappelé à l’ordre par le speaker, a égratigné le PTr, qu’il a qualifié de «Parti Titanic», affirmant que «le parti est en mode quarantaine après avoir attrapé le coronavirus». Ce à quoi Mahend Gungapersad a rétorqué que «Gentlemanship is an art that cannot be cultivated by any Tom, Dick and Harry». Ajoutant que «rien n’est permanent et on ne doit pas être arrogant».