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Les Rajapaksa reviennent à la tête du Sri Lanka

17 novembre 2019, 10:34

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Les Rajapaksa reviennent à la tête du Sri Lanka

Après cinq ans dans l’opposition, le puissant et redouté clan des Rajapaksa est revenu dimanche à la tête du Sri Lanka, avec l’élection de Gotabaya Rajapaksa, surnommé «Terminator», à la présidence de l’île d’Asie du Sud.

Sept mois après les attentats jihadistes de Pâques qui ont meurtri le pays, le Sri Lanka renoue donc avec cette famille qui l’a gouverné d’une main de fer de 2005 à 2015 sous la présidence de Mahinda Rajapaksa, grand frère charismatique et controversé de Gotabaya, et avait réussi à mettre fin à la guerre civile au prix d’un gigantesque bain de sang.

Avant même la proclamation dimanche des résultats définitifs du vote de la veille, Gotabaya Rajapaksa, 70 ans, a revendiqué la victoire à l’élection présidentielle. Son principal adversaire a également reconnu sa défaite.

«Nous avons eu entre 53 et 54%» des voix, a déclaré à l’AFP Keheliya Rambukwella, porte-parole de Gotabaya. Les premiers résultats officiels montraient effectivement l’ex-militaire, bourreau de la guérilla tamoule, s’acheminer vers la majorité des voix.

«C’est une victoire nette. Nous l’avions envisagée. Nous sommes très heureux que Gota soit notre prochain président», a ajouté son porte-parole, indiquant que le candidat devrait prêter serment lundi ou mardi.

Sur près de six millions de bulletins dépouillés, l’ancien lieutenant-colonel obtenait 49,6% des voix. Les observateurs s’attendent à ce que les résultats des zones cinghalaises, la majorité ethnique du pays qui forme la base électorale des Rajapaksa, lui fassent franchir la barre des 50%.

Son rival Sajith Premadasa, le candidat du parti au pouvoir, était derrière avec 44,4% des voix, selon ces résultats provisoires.

Gotabaya Rajapaksa a mené une campagne nationaliste et axée sur la sécurité à la suite des attentats jihadistes qui ont fait 269 morts le 21 avril. Des kamikazes s’étaient fait exploser dans des hôtels de luxe et des églises chrétiennes en pleine messe.

L’élection présidentielle de samedi a été l’un des votes des plus pacifiques au Sri Lanka, historiquement habitué aux scrutins meurtriers.

Toutefois, des hommes armés ont ouvert le feu sur un convoi de bus d’élections musulmans, une attaque qui n’a pas fait de victimes, a indiqué la police.

Camionnettes blanches

Le nouveau président Gotabaya Rajapaksa était l’une des clés de voûte du régime de son frère Mahinda, battu en 2015 par une coalition d’opposants et empêché par la Constitution actuelle de se représenter.

En tant que plus haut responsable du ministère de la Défense à l’époque, il commandait de fait les armées sri-lankaises au moment de l’écrasement de la rébellion séparatiste tamoule en 2009. 40.000 civils tamouls ont péri au cours de cette ultime offensive, selon les défenseurs des droits humains qui accusent les Rajapaksa de crimes de guerre.

Ce carnage avait sonné la fin de 37 ans de guerre civile et vaut aux Rajapaksa d’être adulés au sein de la majorité ethnique cinghalaise, mais détestés et craints par la minorité tamoule qui constitue 15% des 21,6 millions de Sri-Lankais.

Gotabaya Rajapaksa est aussi accusé - ce qu’il nie - d’avoir dirigé sous la présidence de son frère des «escadrons de la mort» qui ont enlevé à bord de camionnettes blanches des dizaines de Tamouls, d’opposants politiques ou de journalistes. Certains de leurs corps ont été ensuite jetés sur la route, d’autres n’ont jamais été retrouvés.

Un célèbre journaliste a été assassiné en 2009 après la publication d’un article accusant Gotabaya de corruption dans le cadre d’un contrat d’armement avec l’Ukraine.

Un retour au pouvoir des Rajapaksa préoccupe l’Inde voisine et les Occidentaux en raison de la proximité du clan avec la Chine.

Pékin a prêté des milliards de dollars au Sri Lanka pendant les deux mandats de Mahinda Rajapaksa pour de grands projets d’infrastructures, une dette colossale qui place ce pays stratégique de l’océan Indien dans une situation de dépendance vis-à-vis de la Chine.