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Ashok Radhakissoon, «La MBC est un commerce qui ignore les attentes de ses clients»

6 novembre 2019, 18:00

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Ashok Radhakissoon, «La MBC est un commerce qui ignore les attentes de ses clients»

Cette pluie de critiques qui s’abat sur la MBC en cette période électorale est-elle justifiée ? 
Les critiques contre la MBC sont quasi permanentes et justifiées dans la mesure où elle n’agit pas comme une institution indépendante, selon la loi.

Entre deux élections, elle devient la vitrine de l’action ou de l’inaction du gouvernement du jour. Le défilé quotidien des ministres à l’heure du Journal Télévisé en est la preuve flagrante. L’équilibre est absent dans le traitement de l’information politique, ce qui est vraiment déplorable, venant d’un parapublic. Qui de plus, est financé principalement à travers la redevance mensuelle de Rs 150. Au final, la MBC, c’est un commerce qui ignore les attentes de son principal et unique client : le public.

Quel est votre regard sur la couverture qu’accorde la MBC aux représentations politiques ?
La mission de la MBC est d’informer son public. La question se pose si elle agit en respectant les dispositions de la MBC Act. Tous les gouvernements au pouvoir sont responsables de cet état des lieux.

Il faut aussi attirer l’attention sur le fait que la nomination du directeur général (DG) de la MBC, de son adjoint et des membres du conseil d’administration a presque toujours été une affaire purement politique pour permettre l’asservissement de l’institution et pour la priver de sa liberté éditoriale. L’actuel gouvernement n’a rien fait pour changer les choses.

Posez-vous la question, comment une institution qui a changé trois fois de DG pendant les quatre dernières années peut connaître une stabilité sur le moyen terme pour répondre aux attentes des Mauriciens ? Sans compter le manque d’éthique ou encore la méconnaissance des règles de base de la «corporate governance» quand un président du conseil d’administration devient le DG…

Pourquoi l’IBA faitelle l’impasse sur les couvertures politiques de la MBC, qui montrent clairement un parti pris ? 
C’est une question pertinente au vu des récents événements. L’IBA a des pouvoirs non-négligeables. Elle peut agir dans tous les cas où il y a des plaintes du public et de son propre chef. Mais encore faut-il que ses dirigeants appliquent les dispositions de l’IBA Act et utilisent les pouvoirs qui leur sont octroyés dans un souci d’équilibre et de pluralité. Je les invite à lire les dispositions des articles 4 et 5 de cette législation. La véritable question est la suivante : l’IBA veut-elle vraiment agir ?

Est-ce normal que ce soit à l’Electoral Supervisory Commission (ESC) de se prononcer dessus ? 
La Constitution donne feu vert à l’ESC en ce qui concerne la supervision et la conduite des élections. À ce titre, l’instance est parfaitement habilitée à trancher dans les litiges portés devant elle par des candidats ou partis politiques. Elle donne son avis et à partir de là, les institutions concernées doivent prendre note et agir en conséquence.

Comment, selon vous, devrait être réparti le temps d’antenne à chaque parti politique ? Depuis l’Independance, le temps d’antenne a été accordé selon une formule acceptée par tous les partis politiques. Celle-ci, à mon avis, a bien fonctionné. De manière démocratique, la Cour suprême a été appelée pour trancher certaines questions ayant trait à ce sujet.

Tout système mis en place doit être juste et équitable et surtout non-discriminatoire. Au final ce système doit aider l’électorat à faire son choix avec discernement. C’est l’impératif du moment.

Dépolitiser la MBC, c’est un débat qui fait rage depuis des années maintenant. Est-ce du «wishful thinking» ? 
Certainement, si on prend note des prises de position des gouvernements successifs qui ont été à la barre du pays.

Ils ont de belles propositions dans leurs manifestes électoraux mais une fois au pouvoir, la MBC a continué à être perçue comme faisant le jeu du pouvoir en place. Cela s’est vérifié dans le temps, quel que soit le régime en place mais bien sûr, à différents degrés.

Autre phénomène qui marque cette campagne électorale : vidéos incendiaires et diffamatoires qui circulent sur la Toile. L’ICTA n’a-t-elle pas le devoir d’agir ? 
L’ICT Act donne le pouvoir au régulateur “to take steps to regulate or curtail the harmful and illegal content on the Internet and other information and communication services.” Le législateur a fait son travail et c’est l’institution qui doit, au regard du texte de loi, décider si elle doit intervenir. Ce phénomène était prévisible, surtout si on garde en tête les élections générales de 2014.

Encore une fois, c’est aux dirigeants choisis pour être à la tête de l’ICTA à qui il revient de prendre les décisions sur la base des textes de loi. Ici également se posent des questions sur les compétences, capacités intellectuelles et la volonté d’agir en toute indépendance.