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Appartenance ethnique: que reste-t-il du Blok 104?

24 octobre 2019, 10:45

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Appartenance ethnique: que reste-t-il du Blok 104?

Rezistans ek Alternativ entame une nouvelle bataille en cour ce jeudi 24 octobre contre l’obligation des candidats aux élections de déclarer son appartenance ethnique. Cette bataille, ils étaient 104 à s’être engagés à la mener à travers le mouvement Blok 104. Nous sommes alors en 2010, année des élections générales. Et neuf ans plus tard, qu’en est-il des convictions de ces citoyens qui avait alors refusé de déclarer leur appartenance ethnique ?

Shenaz Patel, auteure, n’a pas oublié ce combat. Elle n’a pas raté le rendez-vous du Nomination Day, mardi 22 octobre. Et s’est rendue au n° 20 pour s’inscrire comme candidate aux élections. Une candidature refusée parce que l’auteure a refusé de rentrer dans une case ethnique. «Il me semblait important de réaffirmer la cohérence du combat entrepris par le Blok 104 en 2010 en reposant de la même façon, dans la même circonscription», dit-elle. 

Une candidature qui dérange est celle de Nilen Vencadasmy. A la veille du Nomination Day, Stefan Gua de Rezistans Ek Alternativ lui lançait ceci : «Si mo konpran bien pou sa eleksyon la to pe fer enn derogasyon a valer Morisianism ki to finn toultan defann.»

Nilen Vencadasmy est en fait candidat  du  Mouvement socialiste militant  (MSM)  dans  la circonscription n° 1 (Port-Louis Ouest–Grande-Rivière-Nord-Ouest). Mais il était aussi membre du Blok 104 et en 2010, il était aux côtés de Rezistans ek Alternativ. 

Et mardi, il a déclaré son appartenance ethnique lors du Nomination Day. Qu’est-ce qui a changé ? «Rien n’a changé en ce qui me concerne. Je reste le militant engagé que j’ai été depuis ces 15 dernières années, sauf que j’ai mûri (...) J’en ai conclu que si la finalité était de vraiment contribuer au changement, il n’y a pas d’autre moyen. Il faut être au Parlement. En rejoignant le MSM, je m’en suis donné les moyens», soutient le candidat au n° 1.

Philippe Forget, président du conseil d’administration de La Sentinelle, qui a «amenn so blok» en 2010, est lui d’avis que «l’on ne peut pas refaire une action symbolique dix fois. Je suis totalement convaincu qu’il faut sortir du Best Loser System et de son catalogue artificiel. Pour le reste, c’est aux dirigeants politiques d’agir».

En termes d’action, Bruno Raya, producteur et artiste, voit surtout un recul. Membre du Blok 104 en 2010, il affirme : «Le mini-amendement de 2014 m’avait rendu extra kontan. C’est triste à dire, mais la démocratie est en danger. Nous vivons dans une République compliquée pour ne pas dire bananière. Kan pou kapav dir ‘mo pé vini an tan ki Morisien’? Je n’ai pas pu me porter candidat cette année, mais je suis de tout coeur avec ceux qui mènent le combat. Soit on est fier d’être Mauricien, soit on ne l’est pas.»


Comment est né le Blok 104

Cette lutte commence d’abord en 2005, à la création de Rezistans ek Alternativ. «La première action politique», se souvient Ashok Subron, le porte-parole, c’est quand 11 candidats de Rezistans ek Alternativ décident de s’enregistrer pour les élections, sans déclarer leur appartenance ethnique. Mais en cour, les choses ne tourneront pas en sa faveur.

Dans un premier temps pourtant, la Cour suprême – en la personne d’Eddy Balancy, (aujourd’hui chef juge) – donne raison aux protestataires. «Notre nom a figuré sur le bulletin de vote.» Cinq mois plus tard, l’Electoral Supervisory Commission et l’État «rant enn case san ki nou koné. Nous n’étions pas en position de défendre le jugement d’Eddy Balancy», se souvient Ashok Subron. 

Le «full bench» de la Cour suprême – Ariranga Pillay, Kheshoe Parsad Matadeen, Paul Lam Shang Leen – renverse le jugement. Ils statuent qu’en l’absence de déclaration d’appartenance ethnique, la candidature est rejetée. 

Pour les élections générales de 2010, Rezistans ek Alternativ constitue une plateforme à laquelle se joint le Mouvement 1er-Mai de Jack Bizlall ainsi que des citoyens engagés. «Nous avons invité tous ceux qui n’étaient pas d’accord à nous rejoindre.» L’ensemble s’appelle le Kolektif pu enn nouvo konstitisyon. 

Il comprend alors 60 candidats de Rezistans ek Alternativ dans les 20 circonscriptions et 44 personnes de la société civile. Par la suite, le terme de «Bloc 104» apparaît dans un éditorial de «l’express» le 21 avril 2010. Signé Nad Sivaramen, il a pour titre «Votons pour le bloc 104», soulignent Christina Chan-Meetoo et Roukaya Kasenally dans un ouvrage intitulé «Enhancing Democratic Systems : The Media in Mauritius : a dialogue session».