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Pour éviter un conflit, Rome devrait annoncer un déficit dans les clous européens

30 septembre 2019, 15:13

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Pour éviter un conflit, Rome devrait annoncer un déficit dans les clous européens

Le nouveau gouvernement italien, qui s’efforce de relancer une croissance atone, doit annoncer lundi son objectif de déficit public pour 2020, qui devrait tourner autour de 2,1-2,2% du PIB, montrant ainsi sa volonté d’éviter un conflit avec Bruxelles.

Entrée en fonction début septembre, la coalition, formée du Mouvement 5 Etoiles (M5S, antisystème) et du Parti démocrate (centre gauche), a choisi d’adopter une approche beaucoup plus constructive vis-à-vis de Bruxelles que le précédent gouvernement dominé par Matteo Salvini (extrême droite) qui avait multiplié les attaques frontales contre la Commission européenne.

«Il ne devrait pas y avoir de conflit cette fois avec l’Union européenne. Le gouvernement va essayer d’avoir un déficit proche de 2,1%», le chiffre indiqué en avril par la précédente coalition, «et chercher à trouver un accord avec la Commission», analyse pour l’AFP l’économiste Nicola Nobile, du cabinet Oxford Economics.

Cet objectif pour 2020, ainsi que celui d’un déficit de 2,04% pour cette année, avaient été fixés après un dur bras de fer avec Bruxelles et une flambée des marchés financiers.

Ces chiffres nettement inférieurs à ceux annoncés précédemment avaient, après des mois de tensions, permis à Rome d’éviter l’ouverture d’une procédure disciplinaire pour déficit excessif en raison de son niveau colossal d’endettement (2.400 milliards d’euros, 134,8% du PIB).

«Le plus probable est que l’Italie respecte cette fois les règles budgétaires, en négociant préalablement toutes les clauses de flexibilité possibles», estime aussi Lorenzo Codogno, ancien économiste en chef du Trésor italien et fondateur du cabinet LC Macro Advisors.

Le ministre italien de l’Economie, Roberto Gualtieri, a ainsi indiqué dimanche que Rome adopterait «une sage voie du milieu» d’un déficit compris entre 2,04% et 2,4% du PIB, afin de ne pas inquiéter les marchés et faire croître inutilement les taux d’emprunt pour la dette italienne.

Néanmoins, l’équation du gouvernement, qui plaide pour «une politique expansive» pour relancer l’économie, est complexe.

Croissance en berne

Pour éviter d’affecter la demande et de plomber encore davantage une croissance qui s’est révélée nulle au premier semestre, la majorité au pouvoir s’était engagée à empêcher la hausse automatique de la TVA prévue en 2020.

Mais trouver 23 milliards d’euros pour compenser cette mesure n’est pas simple.

M. Gualtieri a ainsi semblé dimanche revenir sur cette promesse, envisageant une remodulation des taux de certains produits. Une hypothèse qui a provoqué une levée de boucliers tant du M5S que de Matteo Renzi, qui a récemment quitté le PD pour créer son propre mouvement Italia Viva, mais qui avait oeuvré en faveur de la formation de la coalition.

Augmenter la TVA serait «une claque au visage des consommateurs, en particulier des plus pauvres», et «conduirait à la récession», a tweeté lundi l’ancien chef de gouvernement.

Peu après, à quelques heures du conseil des ministres prévu à 18H30 (16H30 GMT), le Premier ministre Giuseppe Conte a finalement confirmé que la hausse de la TVA serait gelée, le gouvernement ayant «trouvé» les 23 milliards.

Pour compenser partiellement cette mesure, le gouvernement va bénéficier de 4,5 à 5 milliards d’euros de dépenses moindres liées à la nette baisse des taux d’emprunt en raison de la confiance retrouvée des investisseurs. Il profitera aussi d’une demande plus faible que prévu pour les départs anticipés en retraite et le revenu de citoyenneté destiné aux plus pauvres.

Et il entend donner un coup d’accélérateur à la lutte contre l’évasion fiscale, estimée à au moins 100 milliards d’euros chaque année. Dans cette perspective, il réfléchit à accorder une réduction d’impôt pour ceux payant majoritairement avec la carte bancaire.

Mais, note M. Nobile, il faudra voir jusqu’à quel point la Commission européenne accepte des objectifs relativement hypothétiques dans ce domaine.

La croissance, plus faible que prévue, «complique encore l’équation», souligne l’expert, dont le cabinet prévoit une hausse du PIB de 0,2%-0,3% en 2020, en raison notamment d’une demande nationale en berne et du ralentissement de l’industrie allemande, à laquelle son homologue italienne est très sensible.

M. Codogno table lui sur +0,3%, tandis que le gouvernement, selon les médias européens, devrait prévoir +0,5-0,6% (contre +0,8% prévus en avril dernier).