Publicité

Pourquoi un tel projet de loi ?

24 septembre 2019, 10:37

Par

Partager cet article

Facebook X WhatsApp

Pourquoi un tel projet de loi ?

Le Children’s Bill institue un cadre juridique approprié pour mieux protéger les enfants dans le respect de la Convention des Nations unies relative aux droits de l’enfant et de la Charte africaine sur le sujet. Nous ne pouvons que nous réjouir, qu’au bout de 13 ans, ce Bill soit enfin présenté, et espérer qu’il sera adopté, même avec des amendements sur des questions délicates. Le sujet est trop important pour qu’on ne trouve pas un consensus dans l’intérêt de nos enfants.

L’âge du mariage

Peu de gens ont remarqué que la définition même du mot child a changé. Il s’agit de tous les enfants de moins de 18 ans, alors que la loi actuelle parle de personnes non mariées de moins de 18 ans. C’est un amendement capital quand on sait que beaucoup de défenseurs de la cause des enfants, dont moi-même, souhaiteraient un retour à la situation qui a prévalu de 1981 à 1984 en ce qui concerne l’âge du mariage.

En effet, en 1981, le Code civil a été amendé pour repousser cet âge à 18 ans, pour les filles comme pour les garçons. En 1982-83, j’ai moimême, en tant que ministre, maintenu cet âge. Mais en 1984, celle qui m’a succédé a dû l’avancer à 16 ans pour filles et garçons, qui se marient désormais avec l’autorisation de leurs parents ou, à défaut, du juge en chambre. J’avais voté contre.

Personne n’a pu changer cet âge depuis 35 ans. Sachant qu’il y a eu des cas dramatiques de mariage forcé, une clause du Bill rend illégale toute coercition sur l’enfant qui n’aurait pas consenti à un mariage. L’idéal est cependant de rétablir à 18 ans cet âge qui correspond à celui de la majorité civile, électorale, etc. Même si le mariage à 16 ans entraîne légalement une émancipation du mineur, celui-ci n’a pas pour autant, du jour au lendemain, la maturité d’un adulte. Il doit continuer ses études ou suivre une formation professionnelle et non pas pouponner un enfant et gérer un foyer.

Faute de consensus sur l’âge de 18 ans, je propose que l’on impose de nouveau la demande de dispense d’âge au juge en chambre, qui ne l’accordera que s’il est convaincu que c’est dans l’intérêt de l’enfant. Le Permanent Secretary du ministère de l’Égalité de genre peut présenter la demande du mineur au ministère public avec un dossier très complet sur la situation du mineur. La clause pénale à l’encontre des parents ne sera alors plus aussi importante.

L’âge de la responsabilité pénale

Dans notre Code pénal, on fait déjà la différence entre les mineurs de moins de 14 ans selon qu’ils ont agi avec ou sans discernement. On aurait pu garder cet âge, même si chacun est conscient que la délinquance commence de plus en plus tôt. Mais ce n’est pas au système pénal de régler ce problème de société qui mérite une autre approche.

Il n’empêche que le Bill prévoit une procédure plus humaine concernant les enfants mineurs qui sont en conflit avec la loi. Ils ne sont pas nécessairement arrêtés et placés dans une prison pour enfants. Les Probation Officers joueront un rôle plus important auprès d’eux. De plus, une Children’s Court est enfin introduite ainsi que le droit à un avocat dès que la police commence à enquêter.

Les enfants victimes et témoins de la violence

J’apprécie la clause qui prévoit la nomination d’un tuteur (guardian ad litem) pour les enfants victimes, témoins ou même auteurs de violence quand il y a un conflit entre les parents ou entre eux et les enfants. Souvent, les parents refusent d’être présents quand des enfants sont arrêtés par la police. La formalisation de la déposition par vidéo est un pas en avant mais doit s’étendre à l’enquête de la police.
Les autres clauses

La définition de la nondiscrimination ne correspond pas à l’article 2 de la Convention qui comprend aussi «birth or other status». En complétant cette définition, il faudra aussi amender l’Equal Opportunities Act. L’enfant d’une famille pauvre ou venant d’une région défavorisée est victime de toutes sortes de discriminations. C’est celui-là même qui ne mangera pas à sa faim, ne pourra pas avoir une bonne scolarité ou n’ira pas à l’école. Ce sont aussi des filles pauvres qu’on pousse à se marier jeunes. Les élites privilégient la réussite scolaire et professionnelle. Si on veut vraiment lutter contre la pauvreté, il faut que la loi reflète cet engagement. 

Concernant les châtiments corporels, l’amendement est courageux, mais il faut bien couvrir tous les cas et ajouter «harm» et pas juste «pain or sufferng». Le terme «harm» est déjà défini. Quant au bullying, on responsabilise les établissements scolaires. Il faut cependant s’assurer que l’on détecte les cas et que les victimes et les auteurs suivent une thérapie.