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Blouse blanche dans la rue : Quand ça dérange

17 juillet 2019, 22:00

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Blouse blanche dans la rue : Quand ça dérange

Le port de la blouse blanche et de l’uniforme est interdit en dehors des hôpitaux. Pourtant, le personnel soignant fait contagieusement fi de cette règle. Qu’en est-il ?

Depuis le mois de juin, plus de 9 000 cas d’infections respiratoires ont été enregistrés à Maurice. Le ministère de la Santé a demandé au public de prendre les précautions qui s’imposent. Et le personnel médical alors ? Prend-il suffisamment de précautions ? Les médecins et autres auxiliaires de santé observent-ils tous les règles de prévention des infections ? Quid de ceux qui les enfreignent, par exemple en quittant l’enceinte des établissements de santé sans enlever leur blouse blanche ?

Il est 11 h 30. Le soleil brille de mille feux près de l’hôpital Victoria, à Candos, et une petite chaleur se fait sentir. Un infirmier en blouse blanche mange de la compote de tamarin au bord de la rue, là où la circulation ne ralentit pas. Comme lui, plus d’une dizaine de ses collègues arpentent les rues, en uniforme. On remarque aussi des médecins et le personnel qui s’occupe du nettoyage de l’hôpital, tous en uniforme ou blouse blanche. Ils sortent pour manger, faire du shopping ou encore, pour «kas enn poz». Pourtant la règle des hôpitaux est claire : ils n’ont pas le droit de sortir de l’hôpital en uniforme.

C’est ce que nous confirmera un jeune infirmier de l’hôpital Dr A.G. Jeetoo, à Port-Louis. Rencontré dans les couloirs, à l’intérieur de l’établissement, un peu plus tôt, nous l’avons reconnu assis, à l’extérieur, sans sa blouse blanche. Le jeune homme, âgé d’une vingtaine d’années, est respectueux de la discipline. Pourquoi ? «Pa gagn drwa sa. Nou amenn infeksion dan lopital.» Mais pourquoi les autres le font-ils ? «Je ne sais pas. Personnellement, je ne le fais pas. Ena kontan glase, bann dokter-la sirtou.»

En effet, son stéthoscope dans la poche, une femme médecin en blouse blanche se dirige vers un marchand de roti, de l’autre côté de la rue. Nous nous approchons d’elle. La question l’embarrasse, elle fronce les sourcils et refuse de nous répondre. Les menaces fusent : «Vous avez intérêt à ne pas mettre ma photo sur les journaux !» Une infirmière, près d’un marchand de gâteaux, à côté, lancera pour sa part, d’un ton sévère : «Nou pa bizin manzé nou ?»

Pas hygiénique

Contacté, Ram Nowzadick, président de la Nursing Association, avoue que ce n’est pas autorisé et que c’est considéré comme un manque d’hygiène. «Ce n’est pas hygiénique. En faisant cela, le personnel propage des infections croisées. Les professionnels de santé peuvent transmettre des infections des patients au public et de la rue vers les patients rien que par le biais de leur blouse blanche.»

Toutefois, Ram Nowzadick explique que ce n’est pas seulement la faute du personnel. «Il faut enlever la blouse blanche quand on sort de l’hôpital, c’est certain. Mais, le revers de la médaille est aussi le fait que les infirmiers, par exemple, n’ont pas suffisamment de temps pour déjeuner. Il n’y a pas de cafétéria digne de ce nom dans nos hôpitaux. Comment faire pour manger ? Si le gouvernement avait pris des dispositions pour des cantines pour le personnel, nul n’aurait eu le besoin de sortir de son lieu de travail pour aller s’alimenter ailleurs.»

Quant aux médecins, Ram Nowzadick ne mâche pas ses mots à leur sujet. Il dira aussi que c’est pour le prestige que certains conservent leur blouse blanche en quittant l’hôpital. «Éna dokter kontan montré ki zot medsin. Ce n’est pas éthique.» Sollicité à ce sujet, le ministère de la Santé est resté injoignable.