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Parlement: l’État durcit le ton envers le terrorisme

14 mai 2019, 10:58

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Parlement: l’État durcit le ton envers le terrorisme

Maurice veut montrer ses muscles face au terrorisme et aux menaces envers la paix et la sécurité internationale. En dépit de l’existence, notamment, de la Prevention of Terrorism Act et de la Financial Intelligence and Anti-Money Laundering Act, le Premier ministre, Pravind Jugnauth, introduit deux projets de loi en première lecture dans l’après-midi de ce mardi 14 mai, au Parlement. Ainsi, l’United Nations (Financial Prohibitions, Arms Embargo and Travel Ban) Sanctions Bill et l’Anti-Money Laundering and Combatting the Financing of Terrorism and Proliferation (Miscellaneous Provisions) Bill visent à renforcer et à consolider l’armada juridique dont dispose le pays face à la menace terroriste.

Ce dernier projet de loi, une fois la législation proclamée et opérationnelle, apportera des changements majeurs aux dix-neuf lois connexes qui sont déjà en vigueur à Maurice. C’est pour cette raison qu’il sera présenté par le chef du gouvernement et non pas par le ministre des Services financiers, Sudhir Sesungkur. Au gouvernement, l’on affirme que ce texte de loi survient dans le but de respecter les recommandations internationales émises par la Financial Action Task Force pour combattre le blanchiment d’argent, le financement du terrorisme et la prolifération d’armes de destruction massive.

Il est prévu que ce projet de loi aille de pair avec l’United Nations (Financial Prohibitions, Arms Embargo and Travel Ban) Sanctions Bill. Sous cette loi, Maurice pourra sanctionner financièrement, ou encore imposer des embargos, ou même interdire le déplacement ou l’entrée sur son territoire de personnes ou entités figurant sur l’United Nations Sanctions List. Outre des groupes terroristes, cette liste contient également le nom de certains pays.

Devant la complexité de ces deux projets de loi, ils sont peu nombreux les experts qui veulent se prononcer ouvertement sur leur mise en opération éventuelle ou sur les implications juridiques qui vont en découler avant de les avoir étudiés en profondeur. L’un de nos interlocuteurs, Milan Meetarbhan, ancien ambassadeur de Maurice à l’ONU, explique le principe derrière ces projets de loi. «Il y a deux choses. En tant que membre des Nations unies, Maurice a le devoir d’appliquer des sanctions contre le terrorisme et ses tentacules, en utilisant les instances juridiques nationales pour exécuter les décisions du Conseil de sécurité. De plus, le Conseil veut que les États se donnent eux-mêmes les moyens de prendre des actions. Cependant, ces moyens peuvent donner lieu à des débats», affirme l’ancien diplomate, qui n’a cependant pas encore terminé avec l’étude du document.

L’opposition appréhende, de son côté, que certaines sections de ces futures lois puissent empiéter sur les droits constitutionnels des citoyens en ce qui concerne, par exemple, le gel des avoirs. «La Constitution donne la garantie à chaque individu d’avoir des propriétés. Comment le gel des avoirs se fera-t-il dans la pratique ?» se demande un membre de l’opposition. Il nous revient que ces deux projets de loi ont été discutés au bureau politique du Mouvement militant mauricien, hier après-midi. Ce parti préfère étudier toutes les implications avant d’en discuter publiquement.

Par ailleurs, un expert financier pense lui aussi que ces mesures s’alignent sur les recommandations de la Financial Action Task Force ainsi que celles d’autres institutions internationales. «Maurice a toujours voulu être du bon côté sur le plan international, en montrant que notre juridiction est transparente», dit-il. De plus, ces mesures devront satisfaire l’Eastern and Southern Africa Anti-Money Laundering Group. Cette instance avait noté quelques manquements dans la législation mauricienne pour combattre le terrorisme.

Par ailleurs, un ancien cadre des Services de renseignement affirme que ces deux projets de loi ont leur raison d’être en dépit des lois existantes, d’autant que, dans le passé, il y a eu des soupçons que l’offshore mauricien puisse avoir été utilisé comme plateforme pour le financement d’achat d’armes notamment. «Il revient à la Banque de Maurice, à la Financial Services Commission et à la Financial Intelligence Unit de veiller aux mouvements suspects de grosses sommes d’argent», maintient-il.