Sa photo a fait le buzz sur les réseaux sociaux. Shiksha Bheergoonath, 17 ans, assise sur son scooter, décoré en paon pour l'occasion, en route vers Grand-Bassin. Rencontre.

C'est avec un grand sourire que Shiksha Bheergoonath nous accueille chez elle à Lallmatie. Mais hors de question de lui faire la bise ou encore un câlin. C’est pas du tout son truc... Si vous êtes sympathique, elle vous serrera peut-être la main. Cette jeune fille, âgée de 17 ans, est atteinte de paralysie cérébrale et de scoliose. Mais elle n'en souffre nullement, si ce n'est que physiquement. Ceux qui connaissent Shiksha la décrivent comme une boule d'énergie qui croque la vie à pleines dents.

En ce vendredi, elle porte une jolie robe rouge. Ses cheveux sont bien coiffés, Shiksha aime se faire belle. «Je n'ai pas pu faire de brushing aujourd'hui, on n'a pas eu le temps… J'ai mis ma jolie robe, je suis prête pour partir à Grand-Bassin.»

Shiksha aime bien regarder défiler des kanwars et surtout y admirer les singes, son animal préféré, qui se chamaillent pour les bananes et autres offrandes. C’est le troisième jour d’affilée qu’elle se rend à Ganga Talao, s’enthousiasme-t-elle. De toute façon, elle y a garé son scooter auquel elle tient beaucoup.

«Le scooter est près d’un temple là-bas. On le ramènera à la maison le dernier jour des prières», indique Shiksha. Ce scooter, elle l'a depuis deux ans maintenant, car les longues marches s’avèrent pénibles pour elle.

Pour chaque fête, elle décore ainsi son fidèle destrier. C'est la deuxième fois qu'elle transforme son scooter en kanwar à l'occasion de Maha Shivratree. «Cette année, mon père m'a aidé à le décorer. On a fait un paon blanc. L'année dernière aussi c'était un paon. Sauf qu'il était bleu !» Cette fois, la déco lui a pris trois à quatre jours. Il a fallu découper les plumes du paon dans du papier un par un. «Mais j'ai eu de l'aide de mon papa !»

«Nous, nous voyons qu'elle est autrement capable, qu'elle est atteinte d'une maladie. Mais elle ne voit pas cela. Pour Shiksha, elle est une fille tout à fait normale», indique son papa. Il y a encore quelques années, Shiksha fréquentait un collège d'Etat, le Bon-Accueil SSS, où elle a complété la Form III. Mais ensuite, elle a dû bouger à l'Aventure Technical School for Disabled. Shiksha s'est vite adaptée à ce nouvel environnement. «Tous les jours c'est différent. Lundi on fait l’anglais, mardi les mathématiques, mercredi crafts, jeudi piscine et vendredi PE. J'aime bien les mathématiques.»

Par ailleurs, plusieurs étagères dans la maison des Bheergoonath sont remplies des oeuvres de Shiksha. Des cartes de voeux, des cadres photo, des sculptures en papier ou autres objets décoratifs fabriqués à la main. L'art tient une place importante dans la vie de Shiksha.

Son père, enseignant d'art justement, l'y a  initiée très tôt. La jeune fille est également une adepte de musique. Avec son papa, elle a même fait plusieurs vidéos, dont le disque de l'année 2016, catégorie Bhojpuri. Mais hors de question pour la jeune fille de pousser la chansonnette sur demande, elle chante quand elle le veut bien. Pour l'instant, elle est plus intéressée à aller voir ce qui mijote dans la marmite de sa grand-mère en cuisine. Shiksha est d'ailleurs très proche de cette dernière, avec qui elle partage sa chambre.

Si Shiksha ne cuisine pas, elle aime bien de temps en temps mettre la main à la pâte. Découper les légumes, qu’elle fait pousser dans son jardin. Par ailleurs, Shiksha a sa propre cabane dans son jardin, au bord d'une rivière. «C’est la cabane de Shiksha à Ilôt!» annonce-t-elle fièrement. Cette cabane est devenue son petit coin de paradis. «Nous nous y rendons souvent, car elle aime prendre soin de son jardin et jouer près de la rivière à côté. C'est un moment de détente en famille», indique Anil Bheergoonath.

«Elle nous apporte beaucoup de joie et beaucoup d'amour. Les autres la voient comme une personne autrement capable. Elle ne voit dans les gens que des êtres à aimer, car elle a beaucoup d'amour à donner…»