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Secteur financiers: pourquoi le marché de la dette ne décolle pas ?

12 décembre 2018, 01:00

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Secteur financiers: pourquoi le marché de la dette ne décolle pas ?

Ce ne sera pas demain qu’on assistera à la création d’un marché de la dette. Plusieurs fois évoqué, celui-ci demeure à l’étape embryonnaire. Analystes financiers, régulateurs et opérateurs avancent, eux, plusieurs raisons, les unes plus convaincantes que les autres, pour justifier ce statu quo.

Bilal Sassa, analyste financier et l’un des directeurs de Care Ratings Africa, filiale mauricienne de l’agence de notation indienne, explique qu’il n’y a pas mille raisons à cela. «À la base, c’est une question de liquidités. Les Primary Dealers, qui achètent les bons du Trésor de la Banque de Maurice, ne veulent pas à leur tour les vendre aux investisseurs locaux et accessoirement aux membres du public, vu qu’ils ne souffrent pas d’une pénurie de crédits. Ils en ont en excédent.»

Bilal Sassa précise qu’aussi longtemps que les Primary Dealers (MCB, SBM, Barclays et AfrAsia Bank) qui sont autorisés par la Banque de Maurice (BoM) à se livrer à cette transaction, ne mettront pas ces billets de trésorerie sur le marché, tous les appels lancés jusqu’ici pour que tous les partenaires financiers qui s’impliquent pour développer ce marché de la dette, resteront sans réponse. Ce qui a amené le gouverneur de la Banque centrale, Yandraduth Googoolye, à affirmer, lors de son discours de fin d’année aux acteurs économique, le 23 novembre, que «la BoM avait engagé avec les banques des discussions pour qu’elles ouvrent ces instruments aux membres du public à travers un second marché».

Il a ajouté dans la foulée que les titres sont sans risque et peuvent potentiellement bénéficier aux épargnants comme un instrument alternatif d’investissement. Il est réconfortant, dit-il, «de noter les investissements massifs par des individus sur ce marché qui ont augmenté de Rs 1,8 milliard à la fin de décembre 2017 à environ Rs 6 milliards à ce jour».

Entre-temps, Yandraduth Googoolye plaide, une nouvelle fois, en faveur de l’avènement d’un tel marché, arguant que le terrain a déjà été balisé auprès des banques commerciales et autres sociétés sur les nouvelles directives ; celles régissant notamment l’émission de titres de créances négociables par les entreprises qui sont achetés par d’autres nécessitant des financements pour leurs opérations. Le patron de la BoM est convaincu que l’introduction de billets de trésorerie permettra de soutenir le développement des marchés financiers, tout en offrant la possibilité aux émetteurs de diversifier leur source d’emprunts pour des instruments à court terme et aux investisseurs locaux, d’autres alter- natives pour faire fructifier leur argent.

Le taux d’intérêt élevé sur les instruments à court terme face à celui des banques peut-il être un argument de marketing pour attirer le public afin de privilégier cette nouvelle classe d’actifs ? Pour le gouverneur de la BoM, la comparaison est claire. Pour preuve, la moyenne des rendements sur les bons du Trésor affichée lors des adjudications primaires a augmenté de 1,78 % de novembre 2017 à 2,91 % en février 2018 pour passer encore à 3,60 % en octobre. Alors que la moyenne du taux d’intérêt bancaire a été de 1,7 % durant la même période.

Valeur plutôt faible 

Certes, l’avènement d’un marché de la dette à Maurice passe forcément par l’intérêt affiché par les investisseurs étrangers. Or, là où le bât blesse, ces intérêts, appliqués à la roupie, ne sont peut-être pas d’un grand intérêt pour des investisseurs étrangers. Swadicq Nuthay, économiste, soutient que si ces titres ne sont pas libellés en devise étrangère, qu’elle soit en dollar, euro ou livre, il faudra oublier l’idée de créer un marché de la dette à Maurice.

Le Chief Executive de la Bourse de Maurice, Sunil Benimadhu, pose cette problématique différemment. Selon lui, la valeur liée aux bons du Trésor émis par la BoM est relativement faible par rapport au seuil minimum des billets émis par certains principaux investisseurs institutionnels internationaux. En même temps, il ne faut surtout pas qu’on soit obsédé par le peu d’intérêt exprimé par des investisseurs étrangers face aux obligations d’État. «La taille, la fréquence et le calendrier du programme d’émission du gouvernement devraient être guidés par les impératifs de financement du budget de l’État et viser à optimiser les coûts pour le gouvernement de ces opérations d’emprunt. Si ces objectifs sont atteints par les investis- seurs locaux opérant sur le marché domestique, nous ne devrions absolument pas nous inquiéter de l’absence d’investisseurs étrangers sur le mar- ché de la dette de l’État.»

En clair, le programme d’émission d’obligations, insiste le patron de la Bourse de Maurice, ne devrait pas être dicté par les exigences des investisseurs étrangers mais par celles de l’État. Les investisseurs étrangers peuvent devenir importants si le marché local est incapable de répondre aux besoins de financement du gouvernement ou si leur participation peut aider à réduire les coûts d’emprunt pour l’État.

Obligation d’État, billet de trésorerie, titre de créance, autant de termes qui donnent le tournis mais qui soulignent simplement que le marché de la dette mettra du temps avant son décollage.

Définition 

<p>Aussi connu comme le marché de taux, c&rsquo;est le marché de la dette ou marché de crédit, qu&rsquo;on appelle aussi <em>&laquo;obligations</em>&raquo;. C&rsquo;est un marché mondial, historiquement réservé aux institutionnels. Les émetteurs sont des sociétés, mais aussi les collectivités locales, les associations, les entités publiques, etc. À Maurice, l&rsquo;État. Ce marché est extrêmement liquide, peu volatil, et s&rsquo;adresse donc plutôt aux investisseurs à longterme. Il se divise en deux :</p>

<p>i) Marché monétaire : durée strictement inférieure à 1 an Produits cash : bons du Trésor, certificats de dépôts, <em>&laquo;commercial paper</em>&raquo;&hellip;</p>

<p>ii) Marché obligataire : durée supérieure ou égale à 1 an Produits cash : obligations&hellip;</p>

<p>Les marchés d&rsquo;actions (Bourse) et les marchés de crédit sont interconnectés. Les interactions entre les marchés d&rsquo;actions et les marchés de crédit résultent par ailleurs de l&rsquo;émission de titres complexes, qui sont de nature à transformer de la dette en capital à des conditions déterminées.</p>