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Enseignement secondaire: cette réforme qui inquiète

9 juillet 2018, 22:25

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Enseignement secondaire: cette réforme qui inquiète

Si le Nine-Year Schooling a été déjà entamé dans le primaire, tout reste à faire dans le secondaire. Depuis le début de l’année, le ministère de l’Éducation essaie de mettre en application, à temps, les mesures qui ont été annoncées.

Les plus gros chantiers concernent la refonte des collèges d’État d’élite en académies mais aussi, le National Certificate of Education (NCE). Cependant, malgré l’assurance donnée par le ministère, enseignants et recteurs sont toujours sceptiques par les changements à venir.

Au ministère de l’Éducation, on avance qu’une équipe travaille sur le NCE, dont la première édition aura lieu en 2020 et concerne les élèves en grade 9 (ex-Form III). Cet examen est une refonte du National Form III Assessment. «On travaille sur les manuels scolaires destinés aux élèves en grade 8 et en grade 9. Le Mauritius Examinations Syndicate et le Mauritius Institute of Education planchent sur ce dossier. Le syllabus a déjà été revu, en accord avec le National Curriculum Framework», explique-t-on au ministère de l’Éducation.

«Un rapport sur la performance des élèves au niveau du National Form III Assessment a été fait mais n’a jamais été rendu public par le ministère de l’Éducation. Nous pensons que la performance dans certains collèges, privés ou d’État, laisse à desirer.»

Contrairement au National Form III Assessment, le NCE se veut un examen sélectif qui permettra, surtout, d’accéder aux académies. D’où le côté compétitif, qui n’existait pas jusqu’à présent dans le lower secondary, mais qui se faisait sentir au niveau des épreuves du School Certificate (SC) et Higher School Certificate (HSC). Deux ans avant leur application, ces épreuves sélectives font déjà sourciller les recteurs.

«Nous avons fait parvenir nos inquiétudes au Mauritius Examinations Syndicate. Il faudrait que ces examens se fassent dans les mêmes conditions que ceux du SC et du HSC. Déjà, rien qu’avec le SC et le HSC, nous avons d’énormes problèmes avec des enseignants qui quittent leurs fonctions dès le début de septembre pour agir comme surveillants au Mauritius Examinations Syndicate», souligne Soondress Sawmynaden, le président de l’Association des recteurs.

Autre élément qui inquiète : le niveau des épreuves et la véritable performance des élèves. «Un rapport sur la performance des élèves au niveau du National Form III Assessment a été fait mais n’a jamais été rendu public par le ministère de l’Éducation. Nous pensons que la performance dans certains collèges, privés ou d’État, laisse à désirer», déclare-t-il. Il fait ressortir que les enjeux du NCE seront encore plus importants, d’où le besoin pour les enseignants de prendre des mesures correctives, dès maintenant.

«Je suis d’avis que l’élite continuera à exister, peu importe le collège. Cette réforme, on la perçoit comme un exercice de ‘trial and error’.»

Un avis que partage Munsoo Kurrimbaccus, secrétaire de l’Union of Private Education Employees. Selon lui, peu importe le niveau des élèves, tous auront à prendre part au NCE. «Il y aura des soucis au niveau de la sélection. Avant de proposer cette option, le ministère aurait dû s’assurer qu’il y ait une répartition correcte dans les collèges. Il devrait s’assurer qu’il y ait aussi un quota d’élèves performants, qui sont répartis dans les établissements secondaires de toutes les régions. Ce problème aurait dû être réglé dès cette année-ci», avance-t-il.

Et d’ajouter que de perpétuer le système du choix parental ne «sert à rien», étant donné que certains collèges continueront à recevoir des élèves considérés faibles. Ces établissements ne pourront, donc, pas afficher un taux de performance satisfaisant aux examens du NCE et «cela faussera complètement l’idée de la réforme, qui veut éliminer les stéréotypes».

«Je me demande si les parents ont bien compris que les écoles deviendront mixtes. Il aurait fallu que les élèves des deux sexes soient ensemble dès le grade 7. Il y aura beaucoup de réticences chez les parents.»

Une refonte totale devrait également avoir lieu dans les établissements secondaires qui seront convertis en académies à la rentrée 2021. Ils sont : le Droopnath Ramphul SSS, le Queen Elizabeth College, le Mahatma Gandhi Institute, les collèges Royal de Port-Louis et Curepipe, le collège John Kennedy, le Dr Maurice Curé SC, le Sookdeo Bissoondoyal SC, le ForestSide SSS, le GMD Atchia Secondary School, le Sir Leckraz Teelock SSS et le Sir Abdool Raman Osman State College. Ces collèges seront désormais «mixtes».

«Le dernier Budget prévoit des fonds pour revoir les infrastructures de ces établissements. Par exemple, dans des collèges pour filles, il faudra emménager des salles de Design & Technology. Et dans ceux des garçons, il sera question de créer des ateliers pour les besoins du Fashion & Design ou encore de Home Economics», fait-on valoir au ministère de tutelle. Les travaux devraient bientôt débuter et se faire par étapes.

Mais dans le milieu éducatif, l’on souligne qu’il s’agit là de gros projets d’infrastructures. «Beaucoup de collèges sont dans un état déplorable. Il faudrait pouvoir les rendre attirants», avance Soondress Sawmynaden. Le véritable problème, selon lui, demeure la mixité. «Je me demande si les parents ont bien compris que les écoles deviendront mixtes. Il aurait fallu que les élèves des deux sexes soient ensemble dès le grade 7. Il y aura beaucoup de réticences chez les parents.»

Pour le président de l’Association des recteurs, il faudrait également former les enseignants pour travailler avec les salles de classe mixtes. «Les profs ne sont pas préparés pour. La majorité ne travaille qu’avec des garçons ou des filles. Il faut que les enseignants aient des cours en leadership et sachent gérer les salles de classe différemment.»

Pour Munsoo Kurrimabaccus, le simple fait de mettre sur pied des académies plombe la réforme éducative. Car, dit-il, ce concept vient, encore une fois, «catégoriser» les élèves. «Je suis d’avis que l’élite continuera à exister, peu importe le collège. Cette réforme, on la perçoit comme un exercice de ‘trial and error’.»