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Le tourisme de masse, malédiction des plages de rêve d’Asie du Sud-Est

11 avril 2018, 10:53

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Le tourisme de masse, malédiction des plages de rêve d’Asie du Sud-Est

Comme tous les jours sur cette île paradisiaque de Thaïlande, des hordes de touristes débarquent ce matin sur la baie immortalisée par le film «La plage» avec Leonardo DiCaprio, armés de sticks à selfie.

«Il y a trop de monde ici», se désole Saad Lazrak, touriste de 61 ans venu du Maroc, pris dans la foule qui se bouscule sur cette petite plage cernée d’impressionnantes falaises de calcaire.

«Il n’y a pas un endroit de la plage sans quelqu’un en train de prendre des photos», ajoute Oliver Black, un touriste de 22 ans.

Les rangers surveillant ce joyau du parc national de Koh Phi Phi essayent de réguler la valse de hors-bord entrant et sortant sans relâche de la baie Maya, avec leur cargaison de touristes.

Les autorités estiment que près de 4.000 touristes visitent chaque jour cette baie aux eaux cristallines, ne restant pour la plupart que quelques dizaines de minutes, avant de rembarquer à bord de hors-bord affrétés par un des multiples tour-opérateurs de la région.

Mais les beaux jours de ces derniers sont comptés, assurent les autorités thaïlandaises, la baie Maya devant être fermée en juin -et ce jusqu’en septembre-, «pour permettre à l’écosystème de se régénérer», plaide Songtham Suksawang, directeur des parcs nationaux.

Phénomène régional

A travers l’Asie du Sud-Est, se retrouve ce même phénomène de surpopulation touristique et son impact sur le fragile écosystème des îles.

Les Philippines vont ainsi interdire pour six mois à partir du 26 avril aux touristes l’île de Boracay.

Le président Rodrigo Duterte a comparé cette île qui accueille chaque année environ deux millions de visiteurs (et génère un milliard de dollars pour l’économie philippine) à une «fosse septique», ses 500 hôtels étant accusés de déverser directement leurs eaux usées dans la mer. Une pratique largement partagée à travers l’Asie du Sud-Est.

En Indonésie, les autorités ont été les premiers à tirer la sonnette d’alarme l’an dernier, concernant six kilomètres de côtes de Bali, souillés par les déchets.

La crise environnementale de Bali s’est retrouvée en mars sous le feu des projecteurs avec la vidéo devenue virale du plongeur britannique Rich Horner, filmant sa plongée au milieu des sacs plastique et autres déchets, dans les eaux tropicales de Bali.

«Des sacs plastique, toujours plus de sacs plastique....», commente sur Facebook le plongeur, sous sa vidéo vue plus par d’un million d’internautes.

Aux déchets et absence de traitement des eaux usées s’ajoute souvent dans ces îles paradisiaques un problème de comportements des touristes, piétinant les récifs coralliens, également malmenés par les ancres des hors-bord.

«Le tourisme a toute une série d’effets négatifs sur la santé des coraux», confirme Eike Schoenig, biologiste marin du Centre de recherches océaniques de Thaïlande.

Pour les pays vivant de ce tourisme de masse comme la Thaïlande, l’Indonésie ou les Philippines, il s’agit de trouver des solutions sans tuer la poule aux oeufs d’or.

En Thaïlande, sur la baie Maya, les bateaux pourront approcher de la baie mais ne pourront pas accoster et personne ne sera autorisé à entrer dans la baie.

Quota

Et à partir du mois d’octobre, reprise de la haute saison touristique qui s’achève en avril-mai, les autorités réfléchissent à plusieurs options, dont un quota du nombre de touristes admis sur la plage.

la Thaïlande mène des études sur les mesures à prendre concernant six autres zones marines à protéger.

En Indonésie, le gouvernement a identifié dix autres zones comme l’île Lombok ou le lac Toba à Sumatra, où développer l’industrie touristique.

Avec comme but avoué de décharger Bali d’une partie de sa population touristique.

Les experts pointent du doigt la nécessité de prendre des actions sur le long terme, au delà des effets d’annonce et des fermetures de quelques mois, à la saison basse.

Car le nombre de touristes ne cesse de progresser, comme en Thaïlande, qui bat sans cesse son record de touristes entrant sur son territoire.

Le boom de visiteurs chinois, se déplaçant en groupe et sans prise de conscience écologique, pose un défi sur le long terme aux gouvernements d’Asie du Sud-Est.

Sur les plus de 35 millions de vacanciers ayant visité la Thaïlande en 2017, près de 10 millions venaient de Chine.