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Zimbabwe: des chars vus près d’Harare après des menaces du chef de l’armée

14 novembre 2017, 23:46

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Zimbabwe: des chars vus près d’Harare après des menaces du chef de l’armée

Un convoi militaire en mouvement a été vu mardi près de la capitale zimbabwéenne, Harare, ajoutant au climat de tension au lendemain d’une mise en garde sans précédent du chef de l’armée à l’encontre du président Robert Mugabe.

«J’ai vu un long convoi de véhicules militaires, dont des chars (...) Je ne sais pas dans quelle direction ils allaient», a déclaré à l’AFP une vendeuse près du centre commercial Westgate, à environ 10 km du centre de la capitale.

Une deuxième témoin, au même centre commercial, a confirmé à l’AFP avoir vu le convoi. Plusieurs autres personnes ont également témoigné mardi sur les réseaux sociaux l’avoir vu.

La raison de la présence de ce convoi n’était pas claire dans l’immédiat.

Le porte-parole de l’armée n’était pas joignable pour le moment.

Ces événements ajoutent à l’incertitude régnant dans le pays depuis la décision la semaine dernière du président Mugabe, 93 ans, de révoquer le vice-président Emmerson Mnangagwa, longtemps pressenti comme dauphin du président.

«On voit très rarement des chars dans les rues. Normalement, ils se déplacent peu», a relevé auprès de l’AFP Derek Matyszak, analyste à l’Institut des études sécuritaires, basé à Pretoria. «Chiwenga (chef de l’armée, NDLR) a lancé un défi à Mugabe (...) Mugabe n’a pas répondu dans l’immédiat mais il serait opportun pour Chiwenga d’organiser des manoeuvres militaires pour faire monter les enchères», a-t-il estimé.

Pour sa part, le parti du président Mugabe a accusé mardi le chef de l’armée de «conduite relevant de la trahison» après que ce dernier eut adressé lundi une mise en garde sans précédent au chef de l’Etat. Dans un communiqué, ce parti, la Zanu-PF, affirme que les critiques du chef de l’armée sont «clairement destinées à perturber la paix nationale (...) et démontrent une conduite relevant de la trahison de sa part étant donné que cela a été fait pour encourager au soulèvement».

L’ancien vice-président Mnangagwa, 75 ans, a été humilié et démis de ses fonctions et a fui le pays, après un bras de fer avec la première dame, Grace Mugabe, 52 ans. Figure controversée connue pour ses accès de colère, Mme Mugabe compte de nombreux opposants au sein du parti et du gouvernement.

Dans une mise en garde sans précédent, le chef de l’armée, le général Constantino Chiwenga, a dénoncé lundi l’éviction du vice-président du pays et prévenu que l’armée pourrait «intervenir» si cette «purge» ne cessait pas au sein du parti présidentiel.

Ses déclarations semblent viser les efforts de plus en plus offensifs de Grace Mugabe pour se rapprocher du pouvoir et critiquer ses opposants, dont M. Mnangagwa. Avec l’éviction de ce dernier, elle se retrouve en position idéale pour succéder à son époux.

«Tournant majeur»

A la tête depuis 37 ans d’un régime autoritaire et répressif, Mugabe a été investi par la Zanu-PF pour la présidentielle de 2018, malgré son grand âge et sa santé fragile. Sous son régime, le Zimbabwe s’est considérablement appauvri et traverse une grave crise économique.

Réagissant à la menace du chef de l’armée, le principal parti d’opposition zimbabwéen, le Mouvement pour le changement démocratique (MDC), s’est clairement positionné contre une prise du pouvoir des militaires.

«Personne ne veut voir de coup d’Etat - et je ne dis pas qu’il va y en avoir un. Il n’est pas souhaitable que l’armée prenne le pouvoir. Cela donnera un coup d’arrêt à la démocratie, et ce n’est pas sain pour le pays», a déclaré un haut responsable du parti, Gift Chimanikire.

La branche jeunesse de la Zanu-PF a également fait savoir qu’elle s’opposait vivement à une prise de pouvoir de l’armée.

Mardi à Harare, les rumeurs allaient bon train sur une possible révocation par Mugabe du chef de l’armée, qui est considéré comme un allié de M. Mnangagwa. Le général Chiwenga, 61 ans, et M. Mnangagwa ont tous deux été des figures majeures - tout comme Mugabe - de la lutte pour l’indépendance du Zimbabwe.

M. Mnangagwa était vu comme l’un des lieutenants les plus fidèles de Mugabe, ayant travaillé à ses côtés depuis plus de 40 ans, et l’ancien vice-président entretient des liens étroits avec les militaires.

Cette crise «marque une nouvelle étape alarmante dans la course à la succession» de Mugabe, a relevé l’analyste politique Alex Magaisa (Mugabe) a déjà par le passé demandé à l’armée de rester à l’écart de la course pour prendre la tête de la Zanu-PF. Son autorité sur l’armée n’a jamais été testée à ce point. S’il ne fait rien, cela pourra être interprété comme un signe de faiblesse. S’il intervient, cela pourrait déclencher une confrontation ouverte».