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[Vidéo] Victime de kidnapping à Madagascar: «Nous nous sommes installés à Maurice pour notre sécurité», soutient Yanish Ismaël

20 octobre 2017, 19:52

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[Vidéo] Victime de kidnapping à Madagascar: «Nous nous sommes installés à Maurice pour notre sécurité», soutient Yanish Ismaël

Toute la famille Ismaël déménage à Maurice. Parmi elle, Yanish, 27 ans, qui avait été enlevé à Madagascar le 14 mai. Dans un entretien qu’il nous a accordé dans les bureaux de la direction du Trianon Shopping Park, vendredi dernier, le jeune homme revient sur cet épisode sombre de sa vie. Un kidnapping long de 23 jours.

Bien installé ?

Ma mère, ma sœur et mes neveux sont déjà là. Pour nous, la transition est en cours, tout comme nos démarches pour avoir nos permis de résidence.

Depuis votre rapt, votre souhait était de quitter Madagascar. Pourquoi ?

Il y avait encore de la peur et de la colère. Je me suis toujours demandé pourquoi moi, après tout ce que fait ma famille pour l’économie malgache. Nous sommes tellement impliqués et dévoués. Mais, au fil du temps, j’ai appris une chose. Je suis né à Madagascar et je vais mourir à Madagascar. C’est d’ailleurs pourquoi je fais toujours des allers-retours. Mon but est d’aider les gens. J’ai vécu un cauchemar pendant 23 jours, mais il y a des personnes qui vivent cela pendant toute leur vie. Si nous, nous ne les aidons pas, qui va les aider ? Je veux innover, devenir un role model.

Que retenez-vous de ce cauchemar d’une durée de 23 jours ?

Gérer cette situation a été très compliqué. Dès le premier jour, mes ravisseurs m’ont frappé à la tête dans la voiture. Ils menaçaient tous les jours de me tuer avec des kalachnikovs, de petits pistolets et des couteaux. Je ne pouvais pas me battre contre eux. En 23 jours, j’ai pu parler à mon père deux fois seulement. La première fois, une semaine après et pendant 45 secondes que j’ai comptées dans la tête. Les 45 secondes les plus précieuses de ma vie.

Qu’avez-vous dit à votre père pendant ces 45 secondes ?

Que je les aimais et de me sortir de là. Dans tout cela, ce n’est pas d’être enfermé et de dormir sur un matelas pendant 23 jours qui sont les plus durs, mais c’est de se savoir déconnecté de sa famille sans qu’elle ni moi ne sachions si j’allais m’en sortir vivant.

Votre cousin Owne Alek a eu moins de chance en 2014…

Malheureusement. C’est une douleur qui est toujours là. Owne avait le même âge que moi. Il avait toute la vie devant lui. Il travaillait très bien. Il avait été enlevé un mois de juin. Cela a pris une autre tournure. On n’a toujours pas retrouvé son corps. Quand j’étais en captivité, cela a pesé sur mon moral et sur celui de ma famille. Surtout que ses parents étaient là, le jour où j’ai été enlevé.

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Vos ravisseurs ont-ils été arrêtés ?

Je ne sais pas. Je n’ai même pas demandé. J’essaye de ne pas revenir sur ce sujet. Mais je confirme une chose. On n’a pas porté plainte pour des raisons personnelles. C’est trop dangereux pour ma famille. J’espère qu’un jour ou l’autre, ils vont payer le prix.

Y a-t-il un moyen de mettre un terme à ces enlèvements ?

C’est notre seul souhait. Il faut que le gouvernement coopère. Il faut qu’il y ait une justice. À Madagascar, rien n’a changé. Les rapts continuent. En tant qu’homme d’affaires, cela impacte sur nos décisions stratégiques. Cela complique tout. Madagascar est un pays où Dieu a tout donné. Les gens sont sympathiques, on mange bien, mais la seule chose qui manque est la sécurité. Si on n’a pas la sécurité, cela ne sert à rien de vivre dans un pays.

Votre neveu qui était avec vous le jour de votre kidnapping se porte-t-il mieux aujourd’hui ?

Le traumatisme est là. Il avait perdu six kilos en une semaine parce qu’il avait vu toute la scène. Il était dans la voiture avec moi quand je me suis fait enlever. C’est aussi la raison pour laquelle toute la grande famille Ismaël a décidé de déménager à Maurice.

Pourquoi avoir choisi Maurice comme pays d’adoption et pas La Réunion ou les Seychelles ?

On est attaché à Maurice depuis notre premier projet ici, le Trianon Shopping Park. On adore le peuple mauricien qu’on remercie pour son soutien. Vous avez de belles plages, un beau climat, similaire à Madagascar. La seule différence, c’est que vous avez la sécurité. Pour nous, c’est un plus. Vous avez aussi un système éducatif anglais. Ce qui fait que l’adaptation ne sera pas difficile pour mes neveux et nièces.

Quand vous parlez de sécurité, cela signifie-t-il que vous marchez enfin sans garde rapprochée ?

On est libre. Ma mère et ma sœur sont libres. Je suis libre de faire ce que je veux. Si j’ai envie de prendre un peu d’air le soir ou si je veux manger dans un restaurant à 20 heures, je peux le faire. Je peux aussi laisser ma maison ouverte (la famille s’est installée dans un quartier résidentiel clôturé). À Madagascar, je n’ai jamais marché seul dans les rues. Je n’oserai pas. Je suis obligé d’être gardé matin, midi et soir par des hommes armés. C’est ce que je trouve très dommage.

Quelles sont vos activités professionnelles ici ?

À part le Trianon Shopping Park, nous avons plusieurs biens dans l’immobilier. Nous avons beaucoup de projets à Maurice, qu’on dévoilera au moment venu. J’espère qu’on pourra faire de belles choses ici, avec le soutien de tous.

Que deviennent vos affaires à Madagascar ?

On continue à faire beaucoup de choses. On ne va pas s’arrêter. Nos projets sont toujours accompagnés d’un volet social. À chaque fois qu’on fait un nouveau projet, nous pensons à la population malgache.

Êtes-vous l’unique famille karane (riche famille d’origine indienne) à quitter Madagascar pour Maurice ?

Pas du tout. Je n’ai pas de chiffre exact. Mais je sais qu’il y a une grande communauté karane prête à faire le grand déménagement, surtout à cause de l’insécurité qui persiste. Après mon enlèvement, qui était le 91e kidnapping et aussi le plus long, il y a eu trois autres cas, dont celui de mon meilleur ami, Nahid Meralli Ballou, 28 ans, qui, à l’heure actuelle, est retenu en otage.

Connaissez-vous les circonstances du kidnapping de votre meilleur ami ?

C’est arrivé dans la capitale, Tananarive, à côté de sa résidence. Je suis tombé malade lorsqu’on m’a annoncé son enlèvement. Nahid et moi avions beaucoup discuté après ma libération. Il m’avait demandé des conseils si cela lui arrivait un jour. Je lui ai dit : «Tu coopères.» Je suis confiant qu’il en sortira indemne. J’ai dit à ses parents que je l’attends à Maurice.

Tout à fait autre chose. Vous avez quitté Madagascar en pleine épidémie de peste. Quelle est la situation là-bas en ce moment ?

Je peux vous confirmer qu’il y a eu quelques cas. Le gouvernement lutte contre cela. On est là pour les aider s’il y a des choses qu’on peut faire. Nous sommes le distributeur d’un insecticide et nous avons fait des dons au peuple malgache pour la dératisation.

Administrateur de la société familiale

<p>Yanish est le fils de Danil Ismaël, riche homme d&rsquo;affaires propriétaire du Trianon Shopping Park et de la Société malgache de transformation des plastiques, à Madagascar. Suivant ses études au Menlo College dans la Silicon Valley, le jeune homme est depuis un an et demi, administrateur de la société familiale.</p>