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JO-2024 à Paris: un risque de dérapage du budget

11 septembre 2017, 17:23

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JO-2024 à Paris: un risque de dérapage du budget

L’un des principaux défis des sept prochaines années sera de tenir le budget, modeste, de 6,6 milliards d’euros annoncé par Paris-2024 alors que l’explosion des coûts des JO passés est le principal argument des opposants aux jeux Olympiques.

De Londres en 2012 à Athènes en 2004, en passant par Sydney en 2000, tous les budgets des villes candidates ont en effet grimpé en flèche -- pour en moyenne doubler -- entre les prévisions et la facture finale.

Des dépassements qui ont atteint leur apogée avec Pékin-2008, dont le budget a culminé à 32 milliards d’euros. «Le mécanisme économique qui explique ce dépassement des coûts, c’est la malédiction du gagnant d’une enchère», explique Vladimir Andreff, économiste du sport à la Sorbonne.

«La théorie démontre que celui qui gagne l’enchère est celui qui est le plus optimiste et prêt à surenchérir jusqu’au dernier», précise Andreff, l’un des trois experts internationaux ayant conseillé la rédaction de l’étude d’impact commandée par le Comité de candidature parisien. «Quand il y a beaucoup de villes candidates, le gagnant est piégé», ajoute-t-il.

Pour séduire le CIO, les candidats ont tendance à sous-estimer certains coûts, comme Londres-2012 avec la sécurité, et surestimer les retombées économiques.

A l’abri' des dérapages financiers

Paris, privé d’adversité avec les retraits successifs de ses rivaux, n’a pas vraiment eu à surrenchérir. Cependant, «les coûts liés à la sécurité, à l’aménagement (des sites) et à l’infrastructure temporaire sont peut-être sous-évalués», a prévenu début juillet la commission d’évaluation du CIO, à propos du projet parisien. «Mais ils pourraient être compensés par une éventuelle réduction des dépenses dans d’autres domaines».

«Ca me paraît très difficile en 2024 d’être en dessous de la facture d’Athènes-2004 ou de Londres-2012», soit autour de 11 milliards d’euros, explique Jean-Pascal Gayant, professeur de Sciences économiques à l’Université du Mans, reprenant les arguments des opposants aux JO parisiens qui redoutent une nouvelle explosion des coûts.

Du côté des responsables de la candidature, on n’a cessé de marteler que le budget était tenable. Bernard Lapasset, co-président du comité de candidature, estime que le projet est «à l’abri de tout dérapage financier», puisque 95% (93% selon le rapport du CIO) des sites existent déjà.

Le projet «n’est pas inconsidéré sur le plan budgétaire, il est extrêmement limité», a assuré le président de la République, Emmanuel Macron, à Lausanne mi-juillet.

Le budget du Comité d’organisation (Cojo), rarement dépassé, est en effet auto-financé par les jeux Olympiques eux-mêmes: les dépenses de 3,371 milliards d’euros annoncées seraient ainsi compensées par la contribution du CIO (1,41 milliard), le programme de sponsoring et la vente de billets.

«Objectif atteignable», a estimé la Commission d’évaluation du CIO.

Le dossier parisien a l’avantage de n’avoir que trois sites à construire: le Village olympique, de loin le plus gros investissement -- environ 1,3 milliard d’euros --, le Village des médias et le Centre aquatique.

Au total, le coût des infrastructures sportives pérennes, auxquelles s’ajoute les aménagements d’accessibilité pour les personnes handicapées dans les transports, est évalué à quelque 3 milliards, si aucun incident majeur ne vient frapper les chantiers. Auxquels s’ajouteront le coût de l’inflation.

La moitié de la facture sera acquittée par l’État (1 milliard d’euros) et les collectivités territoriales (villes concernées et Région), l’autre par des fonds privés, le Village étant financé par un partenariat public-privé (PPP).

Risque sur les infrastructures non sportives 

«Les gros dépassements de coûts observés dans l’histoire se font sur les infrastructures non sportives, c’est le cas d’Athènes ou de Barcelone», estime Andreff, qui met en garde sur l’utilisation des JO-2024 comme accélérateur du projet du Grand Paris. «Quand on accélère des investissements, ils coûtent plus chers».

«Ces coûts d’infrastructure et de transport ne devraient jamais être inclus dans un budget olympique, pas plus que ceux du village olympique (qui peut être revendu par le promoteur qui le construit)», conteste pour sa part Jean-Loup Chappelet, directeur de l’Institut de hautes études en administration publique associé à l’Université de Lausanne.

En ce qui concerne Paris, l’extension du réseau de transport destinée à mieux desservir les territoires de banlieue a été votée et budgétée bien avant l’attribution des Jeux à la France. Il sera donc difficile aux opposants d’en imputer le coût au dossier olympique comme ce fut le cas à Londres avec la ligne de métro construite pour les Jeux.