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Bhai Ahmad : Le barbier de ces VIP

22 août 2017, 23:30

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Bhai Ahmad : Le barbier de ces VIP

Son lieu de travail n’a pas changé depuis… 1947. Durant ces nombreuses décennies, Bhai Ahmad en a vu défiler des clients, quelques-uns occupant des postes à la tête du pays. À coups d’anecdotes et de «zistwar létan lontan», il revient sur son parcours…

Est-il le plus vieux coiffeur de Maurice ? «Peut-être. Je crois qu’il y en a un à Mahébourg qui a 92 ans… », répond Bhai Ahmad, sans grande certitude. Il a lu cela quelque part, précise-t-il. À 79 ans, le vieil homme s’active toujours dans ce salon de coiffure qui l’a vu grandir. Il a commencé son apprentissage à 11 ans, avec son oncle, qui a tenu le salon avant lui. Puis, il y a eu ses cousins qui sont venus exercer ici. Aujourd’hui, Bhai Ahmad y travaille seul.

Dans le salon, il fait sombre. Il y flotte un parfum de vieux bois. Le savon qu’il utilise depuis des années imprègne la pièce. De temps en temps, une faible odeur d’alcool vient titiller les marines. C’est ce qu’il utilise pour désinfecter ses accessoires : ciseaux, tondeuses et rasoirs. «Mo fer zis lakoup klasik mwa. Bann lamod lamod mo pa dir ou mo pa fer, mé mo pa kontan», avoue le septuagénaire. Mais il n’a pas de souci à se faire, car il y a peu de chances que ses clients lui demandent une décoloration ou des dessins sur le crâne. La moyenne d’âge de ces derniers s’approchant de la sienne. Bhai Ahmad est avant tout un ami à qui ils aiment bien rendre visite. Il y en a qui ont été à l’école avec lui, d’autres qu’il a connus lorsqu’ils étaient bébés. Il y a des familles qu’il a coiffées pendant plusieurs générations. Les jeunes ? Ils ne viennent pas trop.

«Klib trwaziem az»

«Pa enn salon sa, li kouma enn klib trwaziem az. Népli fer diférans ant klian ek fami aster», souligne le coiffeur. D’ailleurs, un des clients du jour, Mehmood, vient de Sodnac. Ce monsieur a 75 ans et, bien qu’il n’habite plus à Plaine-Verte, fait toujours le déplacement pour venir se faire coiffer ici.

Sur la route des Pamplemousses, le salon de Bhai Ahmad est le seul bâtiment en bois toujours fonctionnel. Il est aussi l’un des plus connus, malgré le fait que le salon n’ait pas de nom. «Dan sa salon-la, tou antikité. Meb, klian, mwa…», raconte-il en riant. Si ses meubles pouvaient parler, ils raconteraient qu’ils ont vu passer les frères Boolell, Anil Gayan, des lauréats, des commissaires de police et autres personnalités de ce pays.

Le vieil homme interrompt sa coupe pour montrer une vieille planche posée sur les bras d’un fauteuil. C’est dessus qu’il installait les enfants venus se rafraîchir la coupe. Il n’y avait pas de chaises hautes à l’époque. Tous les meubles ont été faits par le menuisier du coin et un ami après le passage du cyclone Carol, en 1960. «Ou trouv sa kad-la ? Dépi avan mwa li la», dit le coiffeur sans quitter la barbe de son client des yeux. «Salon la kapav éna 85 ans parla…» Quand va-t-il raccrocher ? Bhai Ahmad nous laissera sans réponse…

Plaine-Verte

<p>Bhai Ahmad a commencé à travailler à Plaine-Verte du temps où la région était encore une forêt. Il explique qu&rsquo;à cette époque il y avait des arbres fruitiers partout. <em>&laquo;Zamalak, rousay, mangoustan&hellip; Tou kalité fri ti éna isi&raquo;</em>, se souvient-il. Le développement a commencé après le passage du cyclone Carol. Pratiquement toutes les habitations en tôle ont été détruites. C&rsquo;est là que le béton a envahi Plaine-Verte, qui a perdu peu à peu de sa verdure.</p>