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Mrinal Teelock: «Les voitures accidentées retapées sont des cercueils ambulants»

2 août 2017, 19:45

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Mrinal Teelock: «Les voitures accidentées retapées sont des cercueils ambulants»

En écho à la récente lettre du directeur de Salim Motors au bureau du PM, évoquant le danger des voitures accidentées et remises à neuf, Mrinal Teelock nous livre ses impressions.

Quel constat faitesvous au niveau des arnaques sur la revente des voitures accidentées ?
La Motor Vehicle Dealers Association (MVDA) a eu vent de ces allégations d’arnaques concernant des voitures accidentées. À ce stade, il n’y a rien de confirmé. Comme nous faisons partie du Road Safety Council, nous avons eu des rencontres avec le gouvernement, en particulier avec le ministère des Infrastructures publiques. Nous avons évoqué cette problématique. Face à cette situation, nous avons proposé des solutions…

Lesquelles ?
Depuis trois à quatre ans, nous avons pris contact avec la Vehicle Certification Agency, une organisation gouvernementale au Japon. Il s’agit d’une branche du ministère des Transports en Angleterre qui s’est implantée en Asie. Elle procède à la vérification des véhicules importés du Japon à Maurice. Avec un tel organisme, on peut s’assurer de la fiabilité des voitures. Cette agence veut nous aider. Maintenant, il faut que le gouvernement agisse et concrétise cette mesure.

Il faut que l’on s’assure que les consommateurs ne sont pas arnaqués. Si les voitures de seconde main deviennent un problème, ce sera lassant pour tous. D’ailleurs, le Budget 2016-2017 prévoyait des mesures réglementaires pour ces types de véhicules. Dans la réalité, rien n’est fait. Figurez-vous qu’il y a une société accréditée auprès du ministère du Commerce pour vérifier que les voitures importées du Japon répondent aux normes. Mais, elle n’existe même pas… C’est une compagnie fantôme. Plusieurs rencontres ont eu lieu avec les ministères du Commerce et du Transport. Mais jusqu’à présent, il n’y a rien de concret.

Revenons-en aux voitures accidentées. Qu’en est-il des risques qu’elles représentent sur la route ?
C’est dangereux. Des voitures total loss sont retapées et mises sur la route. On ne sait pas si la réparation a été faite selon les normes du constructeur. Par exemple, est-ce que le véhicule est pourvu des mêmes équipements de sécurité qu’à son état d’origine ? On peut voir que cela a été réparé, mais qu’en est-il dans la réalité ? C’est du bricolage. Ce ne sont pas des voitures mais des cercueils ambulants.

Qu’en est-il des arnaques de vols d’essence à la pompe ?
Si cela se passe réellement, c’est inquiétant. Surtout pour les consommateurs qui se font arnaquer. Il faut s’en enquérir auprès des stations-service qui sont contrôlées par la maison mère. En même temps, il est difficile de détecter cela. Car vous aurez deux voitures identiques et deux conducteurs, le comportement et la consommation seront différents.

Quels sont les problèmes auxquels font face les Motor Vehicle Dealers ?
Le premier est la taxe qui est fortement élevée. Pour les voitures thermiques, donc à moteur diesel ou à essence, le taux est de 45 % à 100 %. Ajoutez à cela la TVA et les frais de mise sur route. Certaines personnes ont accès aux acquisitions hors taxe et d’autres non. Le duty free sur les véhicules coûte plus de Rs 500 millions par an à l’État. On ne peut avoir une politique de deux poids deux mesures pour différentes catégories de citoyens. Pour les voitures électriques de 75 kilowatts, il n’y a pas de taxe. Au delà de cette capacité, la taxe est de 25 %. Quant aux voitures hybrides, cela varie entre 25 et 75 %.

Deuxièmement, il y a des lois, dont celle concernant la taxe carbone, qui ont été suspendues. Nous avons entamé une action en cour contre l’État. Les législations ne sont pas appliquées comme elles le devraient. La Mauritius Revenue Authority a pris d’autres standards. Cela nous pénalise. Il y a eu une répercussion négative dans la vente de voitures neuves depuis cinq ans.

Troisièmement, les importations illégales nous affectent aussi car les règlements du Consumer Protection Act ne sont pas respectés. Il y a une affaire en cour pour empêcher le dédouanement de ces véhicules.

Le parc automobile mauricien est souvent décrié pour sa saturation. Quel en est l’état actuel ?
Saturé ? Non, je ne le dirai pas. Il y a beaucoup à faire au niveau de la gestion du trafic. Si on prend le modèle singapourien, on note qu’il n’y a pas autant de congestion, alors que le pays est plus petit que Maurice. Ce qu’il faut, ce sont des zones de casse. C’est un projet… Mais en 2017, nous ne voyons toujours rien. Il est inquiétant de voir des véhicules de plus de 15 ans en circulation. Il faudrait encourager les conducteurs à changer de voiture.

Que deviennent justement les voitures qui ne roulent plus ?
Elles sont un peu partout. Elles pourrissent sur des terrains vagues. On les case ci et là ou dans des garages. Pourtant, la mise sur pied de zones de casse constituerait un nouveau secteur d’activité économique. On pourrait recycler et réexporter ces véhicules.

Plusieurs accidents ont été répertoriés depuis le début de l’année. Que faire pour y remédier ?
Soyons honnêtes. Le ministre Nando Bodha fait beaucoup d’efforts. Mais il ne peut pas entrer dans le cerveau des automobilistes pour leur dire de bien se comporter. Il n’y a pas de courtoisie sur la route. Cela me fait penser au critique Ralph Nader auquel il fut demandé de préciser quelle voiture est la plus sûre au monde. Il a répondu que c’était celle qui n’avait aucun conducteur à son bord… Il faut beaucoup d’efforts pour y remédier.

En 2016, le Budget prévoyait l’exemption de la taxe sur les voitures hybrides. Quelles sont les retombées un an plus tard ?
La taxe est plus légère, mais il y a d’autres choses à revoir. Par exemple, la teneur en soufre de l’essence est cinq fois plus élevée à Maurice depuis 1998. Il faut revoir la qualité et la spécification de l’essence. Pour revenir à la taxe, même s’il y a une exemption, le prix demeure élevé. Pour rendre les tarifs plus compétitifs, c’est au niveau de la taxe qu’il faut agir.

Bio express

<p>Mrinal Teelock a travaillé au sein d&rsquo;une entreprise familiale au début de sa carrière. Il a exercé comme vendeur, avant de gravir les échelons. Il a terminé son parcours comme<em> &laquo;Sales Manager&raquo;</em> chez <em>Jaguar</em> et pour<em> Land Rover </em>chez <em>Axess.</em> Retraité après 30 ans de service, il est le secrétaire général de la MVDA depuis cinq ans.</p>