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[Vidéo] Égalité des handicapés : zéro initiative

14 mai 2017, 00:31

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[Vidéo] Égalité des handicapés : zéro initiative

Le «Disability Bill» est en souffrance… D’autres projets de loi lui sont passés devant, pour faciliter autre chose que la vie de certains citoyens. En 2007, Maurice signait la convention des Nations unies relative aux droits des personnes handicapées. Ce faisant, le gouvernement s’engageait, entre autres, à tout mettre en œuvre pour assurer l’accessibilité des lieux publics aux personnes en situation de handicap. Près de dix ans plus tard, quel bilan ?

Rues et transports toujours inadaptés

Il suffit de parcourir les rues de Port-Louis pour se rendre compte que la question de l’accessibilité des lieux publics aux personnes à mobilité réduite est loin d’être réglée. Trottoirs étroits, encombrés, nids de poules, marches… Autant d’obstacles pour les personnes qui se déplacent en fauteuil roulant ou à l’aide d’une canne.

Jeehoo Mamade Nazim, en fauteuil roulant depuis 15 ans, confirme : «Les trottoirs ne sont pas accessibles et, quand ils le sont, des véhicules stationnés nous empêchent de passer. Je dois rouler sur la route pour pouvoir circuler.» Obligé de se mettre en danger pour se déplacer en ville…

Même constat du côté des transports en commun. Les modèles de bus les plus anciens, dont l’accès nécessite la montée de plusieurs marches et dont les couloirs étroits ne permettent pas le passage d’un fauteuil roulant, sont encore complètement inadaptés. Quant aux bus semi-low floor, si l’objectif de leur introduction était d’améliorer l’accessibilité aux personnes handicapées, ils ne sont pas une solution. Leur plancher bas facilite peut-être la montée des personnes ayant des difficultés à marcher ou munies d’une canne, par exemple. Mais tant que les bus ne seront pas équipés d’une rampe reliant leur plancher au trottoir, les personnes en fauteuils roulants seront exclues du système de transport en commun. Elles doivent alors se tourner vers les taxis pour leurs trajets, ce qui implique des frais de déplacement bien plus importants, pour lesquels elles ne touchent pas de compensation.

Abhishek N. Momine, directeur d’une blanchisserie, est en fauteuil roulant depuis six ans, à la suite d’un accident de la route. «Je dois aller faire un check-up à l’hôpital quatre fois par mois et je paie Rs 500 à chaque fois. Avec les autres trajets, je dépense environ Rs 4 000 à  Rs 5 000 en taxi par mois», déplore-t-il.

Certes, la sécurité sociale rembourse les frais de transport des collégiens et étudiants handicapés. Mais le remboursement, calculé selon les tarifs des bus, est bien inférieur au coût réel de leurs trajets. Pas d’aide financière non plus pour l’achat d’une voiture spécialisée. Les personnes autrement capables bénéficient seulement d’une baisse de taxe : elles ne paient que 15 % des 50 % de droits de douane initiaux.

Le «Disability Bill» tarde à venir

En laissant demeurer ces lacunes, le gouvernement ne respecte pas les engagements pris le 25 septembre 2007, lors de la signature de la convention relative aux droits des personnes handicapées des Nations unies. En effet, l’article 9 de celle-ci stipule : «Afin de permettre aux personnes handicapées de vivre de façon indépendante, (…) les États parties prennent des mesures appropriées pour leur assurer(…) l’accès à l’environnement physique et aux transports (…). Parmi ces mesures, figurent l’identification et l’élimination des obstacles et barrières à l’accessibilité.» Maurice avait bien émis une réserve sur l’article 9 lors de la signature, mais celle-ci portait sur deux points précis, qui étaient la mise en place de signalisations en braille et la mise à disposition d’aide humaine ou animale. Les autres mesures auraient donc dû être prises.

Contacté à ce sujet, le ministère des Infrastructures publiques nous a simplement renvoyés aux Buildings Regulations de 2017. Celles-ci mentionnent que «every building shall be constructed and maintained to (…) satisfy functional requirements such as (…) accessibility, to ensure that persons with impaired mobility are able to access and use the building comfortably». Ce qui ne concerne que les bâtiments.

Doit-on en déduire qu’aucun aménagement des trottoirs ni aucune mesure pour adapter le réseau de transport en commun ne sont à prévoir? Le Disability bill nous apportera peut-être la réponse. En février, le ministre de la Sécurité sociale avait annoncé que ce projet de loi verrait le jour bientôt. Pour l’instant, il ne figure pas sur le site du Parlement.

Selon Nalini Ramasamy, engagée dans différentes associations pour les droits des personnes handicapées, le Disability bill devrait être présenté devant l’Assemblée en juillet. Mais son contenu reste un mystère : la militante déplore que les ONG ne soient pas consultées pour l’élaboration d’un tel texte.