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Ils ont du métier-Sylvio Tsia Sit Siu : le marchand de lunettes qui n’a pas froid aux yeux

13 mai 2017, 20:49

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Ils ont du métier-Sylvio Tsia Sit Siu : le marchand de lunettes qui n’a pas froid aux yeux

 

Des chaussons, des pantoufles, des sacs, des gâteaux «batat». Des «minn bwi», vendus à Rs 5 dans des sachets en plastique à des collégiens affamés. Au milieu de ce bazar, un homme à la mine tristounette. À côté de lui, des lunettes, de vue, de soleil. Confidences entre quat’z yeux.

Sylvio Tsia Sit Siu a 59 ans. Sur sa nuque, une houppette grisonnante, sur sa tête, une casquette de soldat branché. Il ressemble vaguement à Jackie Chan, version marquée par la vie. Une cicatrice zèbre son visage, le destin lui a balancé des coups de katana.

Quand il était jeune, il travaillait dans des restaurants. Ceux qui se trouvaient jadis à proximité de la gare Victoria et qui ont  aujourd’hui fermé leurs portes. Alors Sylvio est devenu marchand ambulant. C’était il y a vingt ans.

Il est de ceux qui s’adaptent aux saisons, à la demande, à la mode. «Monn vann boukou zafer. Pom, zoranz, baget fromaz, pistass, ankor enn ta zafer.» Depuis 6 mois environ, il essaie les lunettes.

Mais le marchand de «Ray-Ban» ne voit pas la vie en rose. Il en voit même de toutes les couleurs au quotidien. «Parfwa vann zis enndé, parfwa zéro. Pa gagné mem klian aster.» Pour s’en sortir, «bizin pran krédi laboutik, demann fami enn ti léd, trasé koupé.» Dans son regard, de la résignation. Dans sa voix, de l’amertume. «Éna fwa mo travay 7 lor 7. Bann dimans la fin di mwa, éna dé-trwa klian anplis.» Le chiffre d’affaires ? «Sif ? Ki sif ? Éna zour pa vann nanyé mem, éna zour Rs 400 swa Rs 500.»

La majeure partie de son temps, Sylvio le passe là, sur sa chaise. À observer les passants, à lorgner les potentiels clients, à faire un brin de causette avec les collègues. Qu’en est-il de sa famille ? Temps d’arrêt, silence gêné. Il sort la loupe pour passer en revue les souvenirs. Parfois douloureux. «J’avais deux fils, j’en ai perdu un.»

Et puis soudain, son armure se fissure, Sylvio esquisse même un semblant de sourire. Les responsables de ce changement : ses petits-enfants, âgés de 8 et 12 ans. Ses rayons de soleil avec qui il passe du temps, dès qu’il le peut.

Autrement, du matin au soir parfois en passant par l’après-midi, il essaie de faire contre mauvaise fortune bon cœur, comme toujours. En tout cas, Sylvio a bon pied bon œil.