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La seconde vie des métaux des smartphones

9 mai 2017, 02:41

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La seconde vie des métaux des smartphones

 

Dans le port du Havre, des carcasses d'ordinateurs et de smartphones arrivent par conteneurs entiers, prêtes à être réduites en pièces afin d'en récupérer les précieux matériaux, qui serviront à fabriquer de nouveaux appareils.

Le constat est relativement simple: les matières premières qui servent à fabriquer les appareils électroniques ne sont pas inépuisables. «Les industriels sentent la raréfaction du métal», constate Serge Kimbel, le directeur général de Morphosis, la première entreprise à intégrer toute la chaîne du retraitement des déchets électriques et électroniques en France.

Or, nos placards sont pleins de vieux appareils. Il y aurait en France, par exemple, plus de 100 millions de téléphones portables inutilisés qui dorment dans les tiroirs!

Le but est donc de les récupérer et de les reconditionner s'ils sont réutilisables (en effaçant toutes les données), et sinon de les dépiauter pour recycler les composants et récupérer le plus de matériaux possible.

«Il y a vraiment une seconde vie. (...) Les matières qui arrivent dans notre usine sont transformées sous forme de sels et permettent la fabrication d'autres objets», explique Serge Kimbel. «Le métal que l'on produit aujourd'hui est réinjecté principalement chez des industriels français, dans le domaine du solaire par exemple, dans le domaine des contacteurs, dans le domaine des batteries...»

Morphosis emploie 50 personnes sur deux sites plutôt discrets, près du port du Havre. Le premier, un hangar, sert surtout au tri et aux différents tests. C'est dans le second, une petite usine sécurisée installée dans les anciens abattoirs de la ville, que l'on récupère la quarantaine de métaux contenus dans les appareils: surtout du cuivre, mais aussi de l'argent, du palladium, du cobalt, de l'étain, du tungstène, du platine, un peu d'or... 

On fait concrètement subir aux cartes électroniques une succession de traitements thermiques, chimiques et mécaniques, pour dissocier les métaux, qui seront ensuite fondus et affinés par électrolyse.

Vieux portables africains

«Les industriels ne veulent pas savoir si un métal est recyclé ou pas», ce qui compte pour eux, c'est «qu'il respecte un cahier des charges très précis», relève le patron de la PME normande. 

La filière intéresse cependant les opérateurs qui se veulent responsables en termes environnementaux.

«L'univers des télécommunications est extrêmement concurrentiel, excessivement agressif, avec une guerre des prix dont on peut voir les effets constamment. (...) Nous savons que c'est souvent sur d'autres terrains que nous pouvons faire la différence», argumente l'ancienne ministre de la Culture Christine Albanel, chargée de la responsabilité sociétale des entreprises (RSE) à Orange.

Et, parmi les attentes des clients, «l'environnement (...) est extrêmement important», souligne-t-elle.

L'opérateur historique veut récupérer d'ici 2020, «par des offres commerciales intéressantes», 30 téléphones usagés pour 100 appareils placés auprès de ses clients français, contre «autour de 20» aujourd'hui.

Une partie de ces mobiles est reconditionnée et revendue d'occasion, notamment en Afrique. Orange -très présent sur ce continent- et Emmaüs y ont d'ailleurs lancé en 2010 un système de collecte de vieux appareils en s'appuyant sur Les Ateliers du Bocage, une entreprise solidaire de l'Ouest de la France, qui recycle notamment les appareils électroniques. 

L'association est présente dans cinq pays (Burkina Faso, Bénin, Niger, Côte d'Ivoire, Cameroun), l'objectif étant d'ajouter un pays par an, sur ce continent où les filières de récupération des déchets sont quasi inexistantes. Morphosis a ainsi récupéré au Havre 21 conteneurs de composants issus de ces portables africains. 

Il faudra accélérer la cadence si l'on veut aller plus loin dans l'économie circulaire et arriver un jour à fabriquer des appareils en n'utilisant que des matériaux recyclés, un but que s'est récemment donné le géant informatique américain Apple - sans toutefois se fixer d'échéance.

«C'est tout à fait faisable», s'enthousiasme Serge Kimbel, interrogé par l'AFP. «On essaie de prendre contact avec eux pour voir comment réintégrer les métaux qu'on récupère dans la fabrication de leurs nouveaux appareils!»