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Les «dhobis»…de classe !

9 avril 2017, 17:49

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Les «dhobis»…de classe !

Qui ne connaît pas la chanson de Jean-Claude Gaspard intitulée «Dhobi de classe» ? Nous avons rencontré le dernier blanchisseur – dhobi comme on les appelait autrefois – de La Butte. Il n’est cependant pas le fils de «Zean Robert kok dé ras». Lui, il s’appelle Kistney Venkatasamy.

Kistney est venu au monde en 1943 à la rue Vallonville, à Port-Louis. Aîné d’une fratrie de huit enfants, il est le seul à avoir suivi les traces de son père, blanchisseur. C’est en 1953 que sa famille emménage à la rue Moka, à Port-Louis, dans une case en tôle, où il vit toujours aujourd’hui en compagnie de son épouse. Cette maison, il la loue et espère pouvoir bientôt emménager dans celle qui lui appartient, actuellement en construction.

Le blanchisseur Kistney Venkatasamy habite dans une case à la rue Moka à Port-Louis depuis 1953.

N’étant pas un passionné d’études, il fréquentera l’école De La Salle RCA jusqu’à la Standard V et abandonnera ses études contre la volonté de ses parents. Il cumulera à partir de là divers petits boulots : il sera entre autres débardeur dans les docks avant de se consacrer entièrement aux lavages et aux repassages.

C’est, à l’époque, normal qu’un homme fasse des lessives à la rivière. Il rencontre d’ailleurs sa femme à Grande-Rivière-Nord-Ouest, où tous deux font des lessives. Ils comptent aujourd’hui 40 ans de mariage.

«Ek sa travay-la monn fer létour di mond»

Après s’être marié, il prend ce métier de plus en plus au sérieux car il veut fonder une famille. Il commence donc à prendre des commandes venant de la police, entre autres. «Ek sa travay-la monn fer létour di mond. Monn travay lor enn pakbo ki ti apel Astor. Ti pou Blyth ça. Ti bizin al prend bato l’Allemagne, é mo ti bizin swiv enn kour pou fer sa avan mo al lor bato. Nous ti wit dimounn a fer sa travay-la lor Astor.»

La journée type du dhobi

«Mo ti al la rivier 4 er di matin, mo ti ankor zenn ek mo ti kapav lav dé balo linz par zour. Mo ti al Grande-Rivière-Nord-Ouest pré kot vié pon ek kan la rivière ti pé débordé, mo ti al Pointe-aux-Sables ek enn ti saret. Mo ti pé retourn lakaz ver 14 er.» Le travail commençait très tôt.

«Ti pé lav lor ros. Ti bizin tourn linz-la kouma enn laliann, presé é tap lor ros-la.» Pour chaque type de vêtement, il y avait une méthode bien précise. Pour les chemises, il fallait faire plus attention. «Ti bizin bros bann simiz-la avek prékosion. Nou ti servi ‘kotomay’ ek bros sa ek délo.»

À 74 ans, Kistney Venkatasamy n’est toujours pas à la retraite car il s’ennuie s’il reste inactif.

Pour faire ce métier, il fallait que la météo soit clémente, rappelle le septuagénaire. En cas de cyclone ou de grosses pluies, les rivières étaient en crue. Il était alors confiné chez lui. Cela pouvait durer plusieurs jours. «Latet ti fatigé lerla, parski pa ti pé kapav rann komann

Les molletons les plus difficiles

Les plus difficiles à laver à la main selon lui, c’étaient les molletons, car ils étaient très lourds une fois qu’ils avaient pris l’eau. Mais le résultat était étincelant et donnait une grande satisfaction aux clients comme aux dhobis.

Kistney nous confie qu’il faut être en bonne condition physique pour faire ce métier. Cela demande beaucoup d’effort. À 74 ans, il n’est cependant toujours pas à la retraite car il s’ennuie s’il reste inactif.

Le salaire du dhobi

A l’époque, pour un costume en étoffe, le travail coûtait Rs 7. Pour une chemise, entre 50 et 75 sous. En gros, ils se faisaient entre Rs 15 et 25 pour une vingtaine de vêtements. Outre le lavage, il y avait le repassage qui se faisait au fer chaud et au fer à charbon.

«Aujourd’hui, le travail est plus profitable et on utilise des fers à repasser électriques.» Il n’arrive néanmoins plus à accepter toutes les commandes car il se fait vieux et n’a plus la même vigueur. Pour une chemise et un pantalon aujourd’hui, cela varie entre Rs 30 et Rs 50 et pour un costume entre Rs 450 et Rs 500.

Pourquoi ne pas acheter une machine à laver?

Pour lui, c’est indéniable, dix lavages en machine ne vaudront pas un lavage à la main. Il avoue cependant que cela devient de plus en plus dur pour lui et qu’il pense à bientôt «se calmer». Ses enfants n’ont de cesse de le réprimander.

Une publication de BonZour