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Slovénie: vol au-dessus d'un berceau du saut à skis

20 mars 2017, 19:52

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Slovénie: vol au-dessus d'un berceau du saut à skis

En un siècle, les Slovènes ont changé de frontières, de régime politique, de monnaie mais leur passion pour le saut à skis est restée intacte.

«Courir et sauter à skis, ce sont les sports numéro un ici». A 83 ans, Janez Gorisek est une figure dans le cercle restreint des concepteurs de tremplins de saut, et il rêve encore de records.

«N'importe quel enfant peut sauter», affirme ce solide vieillard qui fut lui-même un sauteur émérite.
L'ambition de tout jeune champion est de s'élancer un jour du haut d'un des tremplins conçus par Janez Gorisek et son frère à Planica, une vallée du nord de la Slovénie, mecque du saut à skis où se déroule à partir de vendredi la dernière épreuve de la Coupe du monde masculine.

Janez Gorisek est quasiment né en même temps que ce site, au milieu des années 1930, lorsque les sauts n'allaient pas au-delà quelques dizaines de mètres. A cette époque, son pays faisait encore partie de la Yougoslavie, un royaume devenu en 1945 une fédération au régime communiste, avant l'indépendance en 1991.

Aujourd'hui, Planica compte une dizaine de tremplins, dont l'un des plus hauts du monde qui permet des sauts à plus de 250 mètres. Sur ces monstres de hauteur - il en existe aussi en Autriche, en Norvège, en Allemagne - la discipline porte un nom à la mesure de l'exploit: le vol à skis.

«Lorsque j'ai commencé à travailler à Planica, la limite des sauts était de 150 mètres. J'ai dit +poussons à 200+, puis quand on a atteint 200 mètres, j'ai dit allons à 250».

C'est le Slovène Peter Prevc qui a le premier atteint la marque des 250 mètres, en 2015. Ce record mondial a depuis été amélioré à deux reprises, le plus récemment samedi, sur le tremplin norvégien de Vikersund, où l'Autrichien Stefan Kraft a atteint 253,5 m.

Janez Gorisek rêve désormais de sauts à 300 mètres, moyennant l'adaptation technique des tremplins.

«Comme un jeu»

Lorsqu'ils s'envolent, les skieurs slovènes le font généralement chaussés de skis... slovènes. Le pays produit depuis plus de 50 ans une des marques les plus reconnues chez les spécialistes de la discipline, développée pendant la Seconde Guerre mondiale par un groupe de résistants pour être plus efficaces dans leurs actions de sabotage et d'espionnage des Nazis.

L'atelier clandestin, dans les Alpes slovènes, d'où sont sortis des centaines de paires de ski durant la guerre est devenu après 1945 une entreprise à succès.

Des tremplins aux skis, «la Slovénie est autosuffisante», observe, satisfait, Peter Slatnar qui en 2016 a repris la fabrication des skis (anciennement «Elan») sous son nom.

Avides de nouveaux exploits, des milliers de Slovènes ont acheté leurs billets pour assister aux épreuves de la Coupe du monde ces prochains jours.

L'an dernier, la compétition de Planica s'est tenue à guichets fermés et près d'un habitant sur trois de ce petit pays de deux millions d'habitants était devant sa télévision pour les courses du dimanche, selon la télévision publique.
Avant cette dernière épreuve de la saison, le Slovène Domen Prevc, 17 ans, pointe parmi les dix premiers du classement général incarnant la relève après la dernière Coupe du monde dominée et remportée par son frère de 24 ans, Peter, une star dans son pays.

«Vous ne formez pas un Peter Prevc chaque jour ou chaque année, c'est un talent unique. Malgré cela, de nouvelles pousses suivent ses pas et chaque année de nouveaux noms émergent en Slovénie», explique Saso Komovec, qui dirige le programme sportif du centre sports/études de Kranj, ville voisine de Planica où une section est dédiée au saut à skis.

Grâce à l'un des 70 tremplins officiels que compte ce petit pays alpin, Ziga Jelar, 19 ans, a pu commencer à sauter lorsqu'il avait cinq ans. Membre de l'équipe nationale junior médaillée d'or au Championnat du monde de Park City (USA) en février, le jeune homme s'est lancé dans ce sport «comme dans un jeu», en s'entraînant chez lui, «dans le jardin».

Ce garçon longiligne, un trait physique commun à tous les sauteurs, définit sa passion en trois mots, «adrénaline, vitesse et hauteur» et résume: «Voler dans les airs, c'est la pure joie».